LUTTE DE
CLASSES
EN UNION
SOVIÉTIQUE
PENDANT LES
ANNÉES 30
Les purges au sein du Parti
Communiste et les procès politiques
Mário
Sousa
2001
Avant-propos
Les purges ou les exclusions au sein du Parti Communiste
et les procès politiques de Moscou au cours des années 30 sont les deux thèmes
favoris des patrons de la propagande bourgeoise. Ils sont systématiquement
repris dans la presse bourgeoise laquelle présente au public une image
mensongère et erronée des purges et procès politiques et de l´Union Soviétique
d´alors. L´objectif de cette action est de salir le socialisme et l´Union Soviétique
afin d´empêcher les gens d´aujourd´hui d´écouter les communistes et de leur
amener à accepter le capitalisme comme quelque chose d´inévitable. Il est par
conséquent important d´éclairer ce chapitre de l´histoire de l´Union Soviétique
afin de pouvoir à la fois combattre les mensonges bourgeois et comprendre les
difficultés que les Bolcheviques rencontrèrent pendant la révolution. La
présente brochure est en partie basée sur une étude historique récente menée
sur ce domaine particulier de l´histoire de l´Union soviétique. Pour le reste,
l´auteur utilise la littérature et les documents remontant aux années 1930 et
1940 lesquels sont tombés dans l´oubli depuis longtemps ou sont tout simplement
inconnus de la plupart de gens.
Les
faits sur la décennie 1930
Commençons par dire au lecteur que la décennie
Au cours de la décennie 1930, la production augmenta, en
Union soviétique, à un rythme jusque-là inégalé dans l´histoire de l´humanité.
Au début de cette décennie, la valeur de l´ensemble de la production
industrielle atteignit 21 milliards de roubles. Elle dépassa 100 milliards de
roubles huit ans plus tard. (Ces chiffres ont été obtenus sur base des pris des
années 1926-1927). La production industrielle du pays avait donc presque
quintuplée sur une période de huit ans!
Au début de 1930, la surface cultivée pour l´ensemble des plantations
était de 118 millions d´hectares. Elle était de 139,9 millions d´hectares en
1938. Au cours de cette même période, le pays avait réalisé la collectivisation
complète de l´agriculture, et résolu de gigantesques problèmes liés à la fois à
la collectivisation des terres et à la modernisation de l´agriculture. Le
nombre total des tracteurs utilisés en Union Soviétique était de 34.900 au
début de 1930. En 1938, ce chiffre était de 483.500. Le nombre de tracteurs
avait augmenté presque quatorze fois en huit ans! Pendant la même période, les
moissonneuses-batteuses augmentèrent de 1.700 à 153.500 et les batteuses à
grains de 4.300 à 130.800.
Le développement culturel de l´Union Soviétique a été
aussi très rapide au cours de la décennie 1930. Le nombre d´étudiants dans
toutes les écoles était de 14 millions. En 1938, ce nombre augmenta jusqu´à
environs 34 millions et le nombre de l´ensemble des étudiants, y compris ceux
qui étudiaient à temps partiel était évalué à plus de 47 millions! Presque le
1/3 des citoyens du pays prenait part au système scolaire. Au début des années
30, il y avait toujours 33% d´analphabètes en Union Soviétique (67% en 1913).
L´analphabétisme fut totalement éliminé en 1938. Le nombre d´étudiants de
l´enseignement supérieur avait également augmenté de 207.000 à 601.000, presque
un triplement! Le nombre de bibliothèques était de 70.000 en 1938, à comparer
avec 40.000 en 1933. La quantité de livres atteignit le chiffre colossal de 126
millions, à comparer avec 86 millions en 1933. Pendant la décennie 30, il y eût
une mesure unique qui montre la force idéologique et matérielle de l´Union
soviétique ainsi que la volonté de traiter les citoyens du pays de manière
juste: L´éducation primaire générale obligatoire fut instaurée sur l´ensemble
du pays, dans les langues propres de toutes nationalités du pays. Ceci était un
travail culturel colossal, avec un grand nombre de nouveaux livres, des livres
pour les enseignants et du matériel didactique dans des langues qui n´avaient
jamais jusque-là existé sous la forme écrite. Des livres furent pour la
première fois publiés dans plusieurs langues nationales du pays. C´est donc en
fonction de cette expérience que la lutte des classes en Union soviétique, au
cours de la décennie 1930, doit être jugée. Ayez cette réalité à l´esprit en
lisant la présente brochure.[1]
Le
développement du Parti Communiste
Au cours de la décennie 1930, de nouveaux membres
affluèrent par millions au Parti Communiste soviétique et prirent une part
active dans la production et le développement de la société. Cette grande
affluence ainsi que l´augmentation très élevée de la production qui avaient eu
lieu n´étaient pas toujours seulement positifs. C’est la raison pour laquelle le Parti était obligé de réévaluer
la contribution de nouveaux et d´anciens membres dans le travail du Parti
Communiste et dans le service national et d´en exclure, ou d´en purger ceux qui
ne remplissaient pas les conditions requises pour tout bon communiste. Ceci
n´était pas un processus dont le résultat pouvait être connu d´avance. Le
combat contre la bureaucratie, la corruption, l´opportunisme et les abus de
pouvoir au sein du parti et des structures de État était mené de plusieurs
manières et n´était pas toujours plein de succès et sans échecs. Mais c´était
un processus nécessaire. Le développement d´une société socialiste implique des
débats et des critiques qui permettent de corriger les erreurs et de trouver
des solutions nouvelles. Les purges étaient aussi importantes pour des raisons
de politique étrangère.
Pendant la décennie 1930, les menaces extérieures contre
l´Union Soviétique provenaient des ennemis d´un type nouveau. Au-delà des
sanctions économiques, du sabotage et des menaces d´agression communes à cette
époque, il y eût un nouvel ennemi dont l´objectif prioritaire était
l´écrasement de l´Union Soviétique socialiste; cet ennemi menaçait l´existence
même des peuples slaves. Arrivé au pouvoir en janvier 1933, le régime nazi
avait entre autre pour promesse d´écraser le communisme, de se procurer de
nouvelles colonies à l´est et d´utiliser les peuples de l´est comme de la main
d´oeuvre esclave dans l´économie allemande. Déjà, à partir de 1925, Hitler
détaillait ses plans de conquête dans son Mein
Kamf: ”Nous, nationaux-socialistes tirons une croix sur la politique
étrangère d´avant la guerre. Nous continuons à partir de l’endroit où nous nous
étions arrêtés il y a six siècles. Nous arrêtons le déplacement éternel du
peuple allemand vers le Sud et l´Ouest de l´Europe et nous dirigerons plutôt
vers l´est. Nous arrêtons la politique coloniale et commerciale d´avant guerre
et nous passons à la politique territorial du future. Lorsque nous parlons de
politique territorial dans l´Europe d´aujourd´hui, nous devons en premier lieu
penser à
La montée en puissance de l´Union Soviétique au cours de
la décennie 1930 était d´une importance vitale. Elle constitua le fondement de
la victoire de l´Union Soviétique sur l´Allemagne nazie lors de la deuxième
guerre mondiale. Le combat contre les errements au sein du Parti Communiste
ainsi que les purges ont été la condition sine qua non des succès dans la
production et la sécurité du pays. Les historiens bourgeois parlent très
rarement de ce fait.
Selon les mythes bourgeois, les exclusions ont été des
poursuites sanglantes contre les critiques du régime, le moyen par lequel une
bureaucratie avide de pouvoir a utilisé un immense service d´administration et
un important appareil de violence ainsi que de méthodes les plus cruelles pour
éliminer systématiquement une opposition progressive; une opposition au sein de
laquelle se trouvaient, selon la description historique bourgeoise, les ”vrais”
socialistes et les ”vrais” communistes. Derrière ces poursuites se trouvait
bien sûr Staline, avec sa prétendue suspicion et son comportement maladif.
Lequel Staline avait, selon la bourgeoisie, un plan détaillé d´élimination à
long terme de tous les opposants ainsi que tous les vieux bolcheviques afin
qu´il puisse seul s´accaparer le pouvoir. C´est de cette manière que les purges
et les procès politiques ont été décrits pendant des dizaines d´années par les
historiens bourgeois et les personnalités du monde de la culture. Mais le fait
que cette bourgeoisie qui enregistre, poursuit, emprisonne et exécute les
communistes qui dans les pays où elle a le pouvoir, accuse l´Union Soviétique
de poursuivre ”les vrais” communistes, montre que les choses ne sont pas telles
qu´elles sont présentées. Les historiens bourgeois mentent et nous allons le
démontrer. Mais c´est beaucoup plus grave que nous ne le pensons. Les
historiens bourgeois détiennent depuis 1945 des documents qui montrent que la
situation à l´intérieur de l´Union Soviétique était le tout contraire du mythe
autour duquel ils se sont suspendus.
Les
archives de Smolensk
Les faits sur les purges, l´évolution de la production
ainsi que les procès politiques constituent une partie de l´histoire du Parti
Communiste soviétique. Et comme beaucoup d´autres choses, les données sur ces
événements se trouvent assemblés dans les archives du parti. Les archives du
parti avaient été fermées aux chercheurs étrangers jusqu´à l´année 1989, année
au cours de laquelle Gorbatchev leva cette interdiction. Il y a cependant une
exception. Une grande partie du matériel des archives était arrivée aux
États-Unis et en Europe depuis 1945. L´histoire est simple mais
fantastique.
Lorsque l´Allemagne nazie envahit l´Union Soviétique au
cours de la deuxième guerre mondiale, ses forces avaient avancé si profondément
à l´intérieur de ce pays qu´ils atteignirent les environs immédiats de Moscou
et de Leningrad. Depuis 1941, les forces allemandes occupaient déjà l´Ouest
oblast soviétique -c.à.d
Les archives de Smolensk sont très volumineuses. Elles contiennent, à quelques exceptions près
l´essentiel de ce qui concerne les activités du Parti Communiste dans
Les archives de Smolensk n´ont jamais été à la une des
médias occidentaux. La raison est que la vie politique de
Possibilité
de tirer ses propres conclusions sur les archives
En 1985, un livre fut publié à partir de nouvelles
recherches menées sur les archives de Smolensk. Le titre du livre était Origins of the Great Purges -The Soviet Communist Party Reconsidered,
1933-1938. Son auteur est l´historien américain J. Arch Getty. Le livre produit des statistiques et des
documents d´une très grande valeur dans l´étude de l´histoire de l´Union
soviétique. Getty est l´un de principaux
personnages responsables de la publication aux États-Unis, en 1993, des rapports de recherche sur le système de
santé criminelle soviétique pendant le règne de Staline (sujet sur lequel l´auteur de la présente brochure a écrit, Avril
1998, la brochure Les mensonges sur l’histoire de l’Union Soviétique – D’Hitler
à Hearst, de Conquest à Soljenitsyne). Les rapports de recherche russes
révélèrent les mensonges qui ont été propagés pendant des dizaines d´années
dans les médias capitalistes. Quinze après l´apparition de ce livre, le même
auteur publia en 1999, un nouveau livre sur la décennie 30 de l´Union
soviétique. Cette fois-ci, le titre était The
Road to terror -Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, 1932-1939.
Le livre contient des documents provenant des anciennes archives soviétiques
lesquelles avaient été rendues publiques pour la première fois. Cependant, comme le dit Getty lui-même, ces
documents avaient été tirés d´une grande masse d´autres et l´on peut se
demander si ces documents étaient les plus importants et s´ils ont été
interprétés de la manière la plus correcte – “Like all historical documents
they can be read in various ways”[3] (comme tous les documents historiques on peut
les interprétés des différents manières). Et on peut aussi demandé quel est le
propos du livre quand Getty écrit, “our study does not touch on all questions …
we are unable to deal comprehensively with foreign policy, agricultural or
industrial affairs, or cultural matters”[4] (notre étude ne touche pas toutes les
questions …nous sommes incapacité de traiter dune manière compréhensible avec
politique étrangère, des affaires agricoles ou industrielles, ou des questions
culturelles). N’était pas la politique dans ces questions qui était le but de
la lutte dans le parti bolchevique ? Il y a dans ces documents beaucoup
des rapports des discussions internes au parti mais très peu de faits sur
l´évolution de l´Union Soviétique au cours de la décennie 1930. Ceci est à
retenir.
Le travail de recherche de Getty a détruit une partie des
mensonges et des mythes sur l´Union Soviétique mais le plus important est avant
tout qu´il donne à quiconque a la possibilité
d´accéder aux documents, aux faits, de les comprendre et d´en tirer ses propres conclusions. Tirer ses
propres conclusions est en fait important. Car en ce qui concerne l´Union soviétique,
il n´y a, en Occident, aucune grande personnalité qui peut se prévaloir de tout
comprendre et de tout expliquer. Getty est lui-même avant tout un écrivain
bourgeois dont les capacités de compréhension de la lutte de classes en Union
Soviétique sont limitées. Dans The Road
to Terror qui veut démontrer que les Bolcheviques se sont décimés eux-mêmes
dans des combats internes au cours de la décennie 30, rien n´est par exemple
dit de l´incomparable développement de la société jamais observé dans l´histoire
de l´humanité et qui a eu lieu en Union Soviétique pendant la décennie
1930. Quand il s´agit par exemple de la
menace de l´Allemagne nazie, on ne s´y réfère dans The Road to Terror, un grand livre de 635 pages, que par une ligne,
dans une demie phrase, en tout six mots, ”the elite at the time obviously felt
a continuing crisis in the wake of collectivization and with the rise of German fascism”[5] (l’élite de cet temps a senti une crise
continue dans le commencement de la collectivisation et avec le levée du fascisme Allemand). Imaginez-vous alors que la
plus grande partie de la décennie 1930 soviétique avait été marquée par une
lutte contre le temps dans les préparatifs de défense contre la menace
d´invasion de l´Allemagne nazie. Ne pas accorder de l´importance à ce fait doit
absolument conduire à des conclusions erronées. Si les Bolcheviques s´étaient
détruits eux-mêmes au lieu de développer le pays au maximum et de construire la
défense, les Nazis auraient gagné la guerre, l´Union Soviétique ainsi que les
peuples slaves seraient décimés. Il n´en a pas été ainsi. L´Union Soviétique
avait donc gagné la guerre et le nazisme fut vaincu. Nous disons ainsi pour
faire comprendre au lecteur que les recherches académiques ont foncièrement
tort de laisser de côté les réalités de la vie au profit des intrigues et des
bêtises de toutes sortes qui conduisent à des conclusions de même niveau qu´un
acte de roman de kiosque bon marché. Ce
qu´il y a de particulier dans les recherches occidentales sur l´Union
Soviétique est la quantité colossale de mensonges et de déminéraliser qui ont
été produites et propagées par les universités occidentales pendant une période
de plus de cinquante ans.
”Origins
of the Great Purges”
Les deux livres de Getty sont parmi ceux qui constituent
la base de cette brochure. Origins of the
Great Purges est, contrairement à The
Road to Terror publié ultérieurement, un livre basé sur des faits concrets,
avec des statistiques et d´autres éléments qui donnent une image réelle de la
société. On est frappé de surprise en en lisant la seule introduction. Nous ne
sommes pas habitués à voir des professeurs parler le langage de la vérité. En
tout cas pas les professeurs suédois. Le professeur Arch Getty constate avec
conviction que la recherche sur les archives de Smolensk montre que la plupart
de rapports occidentaux sur les purges en Union Soviétique sont basés sur des
”affirmations indéfendables”.[6]
Le résultat de la recherche montre tout d´abord que les
événements politiques de la décennie 30 n´étaient pas un ”un phénomène uniforme
(les grandes purges), qui peu être étudier comme un processus..., planifié,
préparé et réalisé” par Staline et ses proches. Ensuite cette recherche montre
que l´affirmation selon laquelle ”les vieux bolcheviques de la génération de
Lénine (et de Staline), étaient la cible des purges”[7] n´a rien à avoir avec la réalité. De plus,
Getty affirme martèle qu´il est temps de reconsidérer tout ce qui avait été
enseigné sur l´Union Soviétique des années 1930.
Il s´agit donc ici des constats et non des spéculations
qui ne peuvent être écrits par un chercheur et un professeur d´histoire s´il ne
dispose pas de très solides preuves.
Ceci n´en constitue pas moins une contradiction directe du livre de
Fainsod Smolensk under Soviet Rule paru
en 1958. Fainsod écrivait à propos des purges: ”Le meurtre de Kirov en décembre
1934 entraina une nouvelle série des purges presque infinies lesquelles se sont
étendues à un cercle beaucoup plus large et se sont développées en un crescendo
destructif dans une véritable destruction de la direction régionale du parti de
Ce n´est pas que le livre de Getty dépasse toutes sortes
de falsificateurs de l´histoire. Getty remet en question le livre de Fainsod, Smolensk Under Soviet Rule lequel fut
pendant un temps le livre de référence dans la matière. Parlant de Smolensk, Getty déclare que ”les
événements des années 1933-1939 n´étaient pas du tout une partie du même
crescendo de terreur planifié ni non plus un sole phénomène ou processus. Les
purges de membres des années 1933-1936 n´étaient pas un simple antécédent de la
terreur policière de 1937 et n´étaient liées à celle-ci que de manière
indirecte”[9].
Nous allons d´abord présenter l´interprétation que se
fait Arch Getty des purges des années 1930. Nous tirerons par la suite nos
propres conclusions politiques sur les statistiques de Getty. Laissez-nous
toutefois commencer par donner au lecteur un aperçu de la situation du Parti
Communiste soviétique pendant la décennie 1920.
Bref
aperçu sur les purges des années 20
Après la victoire de la révolution, lorsque le Parti
Communiste était déjà devenu le parti dirigeant, la direction du parti ainsi
que Lénine étaient obligés de constater qu´un certain nombre d´éléments
inconnus s´étaient introduits dans le parti et dans l´appareil de l´État. Il
s´agit de gens qui, par leur simple adhésion, voulaient se faire une place au
sein du parti. A la huitième conférence du parti, en décembre 1919, Lénine
souleva cette question. ”Il est naturel”, déclarât il, ”que les pires éléments
s´accrochent au parti au pouvoir pour la simple raison que c´est le parti au
pouvoir”[10].
Il était pour cette raison important d´évaluer, d´examiner la contribution des
membres. On procéda donc à un nouvel enregistrement de tous les membres, comme
le proposait Lénine. Chaque membre fut interrogé devant l´ensemble de membres;
ceux en qui on ne pouvait avoir confiance furent exclus du parti. C´était le
premier nettoyage de l´appareil du parti. Cette méthode qui consiste à épurer
le parti en en chassant les éléments opportunistes devait marquer le Parti
Communiste pendant plusieurs années à venir.
Les critères généraux de l´exclusion des membres du parti
étaient la corruption, la passivité, les manquements à la discipline du parti,
l´alcoolisme, la criminalité et
l´antisémitisme. Pour les bourgeois et les paysans propriétaires qui cachaient
leurs origines, ils ne devaient donc qu´être exclus. (Cette forme d´exclusion
ne frappa pas toutefois ceux qui avaient été admis au parti et qui avaient reconnu
leur vraie appartenance de classe). Même
les anciens officiers tsaristes qui avaient caché leur état passé furent aussi
exclus sans hésitation. Tous les exclus pouvaient à leur tour exercer un
recours contre leur exclusion auprès de la commission centrale de contrôle pour
avoir leurs cas réexaminés à un niveau plus élevé.
Comme nous le verrons plus tard, beaucoup d’eux furent
repris dans le parti. Les décisions prises au niveau des assemblées du parti
avec leurs centaines de membres étaient, en principe, plus dures que celles de
la direction centrale du parti. Le Comité Central du parti qui avait déclenché
le processus des purges et en avait déterminé les règles, essaya d´abord
d´amener les membres ordinaires du parti à prendre leurs responsabilités, à
hausser la voix et à mettre hors d´état de nuire les fonctionnaires corrompus
et leurs complices.
Mais l´on découvrit que ceci était un travail difficile.
Des bureaucrates corrompus s´étaient ingéniés à user de milliers d´astuces qui leur
permirent d´échapper aux critiques et à toutes situations difficiles. Ce qui
fit que la plus grande partie de victimes des purges devinrent les membres de
base du parti lesquels n´avaient dans la plupart de cas aucun moyen de défense
vis-à-vis des accusations des secrétaires du parti, accusations portant sur la
passivité, l´ignorance politique ou l´alcoolisme.
Les
purges des années 1920
Après le nouvel enregistrement de 1919, Lénine ainsi que
la direction du parti constata que des manquements significatifs persistaient
dans le parti. L´enregistrement n´avait pas atteint son objectif. Les
recrutements de nouveaux membres continuaient toujours sans que l´on put tenir
compte du fait que c´était la qualité de travailleur ainsi que la confiance
qu´inspiraient les éléments provenant des autres classes sociales qui devaient
prévaloir. De nouvelles exclusions eurent donc lieu en 1921, 1928 et 1929.
Le tableau ci-dessous donne des informations sur le
nombre de membres exclus à ces trois différentes occasions. Dans le reste des
cas, c.à.d concernant les exclusions faites les autres années, celles-ci ont
varié entre 3 et 5 % des membres du parti.
Grandes
purges des années 1920[11]
(Getty: Origins of
the Great Purges) % des exclus
1919 Nouvel
enregistrement 10-15
1921 Purge
25
1928 Vérification
dans 7 districts 17
1929 Purge 11
En ce qui concerne l´épuration de l´année 1929, il existe
une description détaillée des causes ayant donné lieu à toutes les exclusions.
Cette description fournit en fait une bonne information et elle met tout au
moins fin à un mythe - celui selon lequel les purges auraient été décidées pour
se débarrasser des opposants au parti. Le processus d´épuration du parti avait,
au cours de l´année 1929, atteint 1,53 millions de membres. De tout ce chiffre,
seuls 170.000 membres, soit environs 11% de l´ensemble furent exclus du parti.
Avec les recours effectués auprès de la commission centrale de contrôle, 37.000
membres reprirent leur place dans le parti, (soit 22 % de l´ensemble des
exclus). Le pourcentage de ceux qui avaient été réadmis au sein du parti fut
plus élevé à Smolensk, soit 43 %. Selon
l´une des investigations menées plus tard sur les purges, il fut constaté que
la plupart des exclus étaient des membres de base qui avait été épurés par les
fonctionnaires locaux du parti pour passivité. Personne n´avait pris en
considération les conditions de vie des membres lesquelles rendaient difficile
leur participation aux activités du parti.
Purges
de 1929[12]
(Getty: Origins of the Great Purges)
Les causes des exclusions Pourcentage
Manquements relatifs au comportement des personnes
(par ex. l´alcoolisme)
22
Éléments inconnu (étrangers) ou liens avec pareils
éléments 17
Passivité
17
Criminalité
12
Manquements à la discipline
10
Autres
22
Selon Getty, les membres qui ont été exclus pour des raisons
politiques -”fractionnisme ou activités oppositionnelles”-, sont parmi ceux qui
l´ont été exclus pour ”manquements à la discipline”. Ceux-là constituent 10% de ces 10 %. Ceux qui
étaient exclus pour des raisons politiques étaient donc seulement 1% de toutes
les exclusions faites au cours de 1929[13].
Comparez ceci avec le mythe habituel selon lequel ”les staliniens ont éliminé
tous les opposants”. Par ailleurs, la bourgeoisie suggère d´habitude que les
exclus courraient un risque de mort certain soit parce qu´ils étaient envoyés
dans les goulags, soit parce qu´ils disparaissaient purement et simplement. La
vérité est tout autre. De tous les exclus, ce fut seulement ceux qui avaient
commis des crimes - vol, escroqueries, chantage, sabotage ou des infractions
similaires- qui furent traduits devant
les cours et tribunaux. Hormis le fait qu´ils ne pouvaient plus jouir des
avantages que la qualité de membre du parti procurait et qu´ils n´en
observaient plus les obligations, tous les autres exclus menaient une vie
tranquille.
Des
purges au sein du SUKP (b) pendant les années 30
Laissez-nous maintenant aborder l´Union Soviétique des
années 30. Ce sont justement les purges des années 30 qui sont évoqués par tous
ceux veulent salir le socialisme et construire le mythe de l´Union Soviétique
comme un régime d´oppression. Parmi les historiens les plus connus, on trouve
l´agent des services secrets anglais Robert Conquest, le fasciste Alexander
Soljenitsyne et le social-démocrate russe
Roy Medvedev. Parmi leurs thuriféraires suédois, on peut citer le poète
manqué Per Alhmark, le vaurien Staffan Skotte, ”l´historien” trotskiste Peter
Englund (récemment élu au sein de l´Académie Royale de
Démasquer les falsificateurs de l´histoire est capital.
Ils utilisent l´ignorance des gens pour forcer les sympathisants du socialisme
à la défensive et amener les communistes à prendre des distances avec leur
histoire.
Robert Conquest a joué un rôle central dans la campagne
de dénigrement du socialisme et de l´Union Soviétique pendant l´après-guerre.
Conquest est un désinformateur formé à l´un des plus grands et plus vieux
services de sécurité, les services secrets britanniques.[14] Conquest était leur plus grand agent
spécialisé dans la désinformation sur l´Union Soviétique. C´est sa façon de
manipuler l´information et de confondre le vrai et le faux et vice-versa qui font sa particularité. Conquest cessa de
travailler pour les services britanniques MI5 vers la fin des années 50. On le
crut parti pour toujours, mais on sut qu´il était actif à les États-Unis où
L´oeuvre la plus connue de Conquest,
Le même texte fut repris, avec quelques modifications,
dans l´un des livres de Englund (Brev
från nollpunkten). Selon Englund, The
Great Terreur de Conquest est une ”oeuvre indispensable”[15].
Cependant, Conquest déclare dans les notes de référence de son livre que ”la
vérité peut se révéler sous forme des rumeurs” et d´ajouter: ”Quand il s´agit
de questions politiques, la meilleure source, sinon la plus incontestable,
devrait être celle qui circule dans les milieux politiques et policiers les
plus élevés”[16]. Les ”ont dits” et les rumeurs provenant des
fascistes et des collaborateurs nazis ont été utilisés par Conquest comme base
de sa ”terreur” des années 30 en
Union soviétique, mais ceux suffisent pour ”l´historien” Englund. Des
historiens sérieux ne touchent aux rumeurs et aux ont dits, même pas à l´aide
des pinces.
Les
purges de 1933
Au cours de la décennie 30, l´appareil du parti a subi
trois grandes purges: 1933, 1935 et 1937-1938.
La première purge (1933) eut lieu dans un climat de grand
enthousiasme dans la société lorsque les coopératives agricoles se
multipliaient sur l´ensemble de
l´Union Soviétique avec grand succès et lorsque la production industrielle
atteignait des records jamais observés dans l´histoire de l´humanité. Le Parti
avait ouvert ses portes à tous ceux qui voulaient se battre pour le socialisme
et des centaines de milliers de nouveaux membres y avaient été admis pendant
les trois premières années de la décennie
La direction du Parti avait décidé que les purges
devaient se faire dans un atmosphère amicale dans laquelle il n´était pas
toléré de fouiller très sérieusement la vie privée des gens. De plus, la
direction du Parti avait encouragé les membres de base à critiquer les
bureaucrates locaux et mis en garde les directions locales du Parti contre
toute exclusion des membres de base pour passivité ou ignorance politique. Les
erreurs de 1929 ne devaient pas être reprises. L´on devrait mettre l´accent sur
le développement général des membres et dans des cas où il fallait
nécessairement agir, les membres du Parti pouvaient être dégradés au niveau de
candidats à l´adhésion ou de sympathisants jusqu´à ce que ces membres
améliorent leurs connaissances politiques ou leur participation aux activités
du Parti. Les purges devraient si possible être évitées.
Malgré les directives, l´épuration de 1933 ne devint pas
ce que la direction centrale du parti avait souhaité. Dans un pays aussi grand
que l´Union soviétique, les secrétaires locaux du Parti avaient tellement un
grand pouvoir ce que quelque fois devint désastreuse. Les faits montrent que
les secrétaires locaux avaient fait de leur mieux pour que les purges ainsi que
les critiques ne les touchent pas eux et leurs proches. Aussi, pour montrer
qu´ils entendaient accomplir une meilleure épuration possible, certains
secrétaires locaux chassèrent plusieurs membres de base, des paysans et des
travailleurs, des membres fidèles, exactement ceux qui ne devaient pas être
exclus. La plupart des exclus étaient ceux qui avaient adhéré au parti au cours
des années 1930-1933 et qui n´avaient pas eu le temps d´assimiler toutes les
questions relatives au parti. Nombreux sont ceux qui n´avaient pas eu le temps
d´étudier sérieusement le programme du parti et le marxisme-léninisme et qui
étaient considérés par les secrétaires locaux du parti comme étant trop
ignorants. D´autres étaient ceux qui pour des raisons de famille ou de travail,
avaient difficile à participer pleinement aux activités du parti. Au cours des
purges de 1933, 18,5 % de membres et de candidats, soit environs 792.000
personnes, avaient été exclus.
Purges de 1933[17]
(Getty: Origins of the Great Purges)
Causes de l´épuration
Pourcentage
Corruption morale, carriérisme, bureaucratisme 17,5
Éléments inconnu (étrangers) / passé cachée 16,5
Manquements disciplinaires
20,9
Passivité
23,2
Autres
17,9
Non mentionnés dans ”Origins
of Great Purges” 4
Achevées au milieu de l´année 1934, les purges de 1933
montrèrent qu´il y avait des contradictions très sérieuses dans le parti. Le
Comité central voulait renvoyer les voleurs et les bureaucrates corrompus mais
le plus grand nombre des exclus, soit près d´un quart, furent épurés pour
passivité. Pourtant, la passivité n´était pas parmi les critères retenus dans
la directive du parti comme cause d´exclusion. Avec l´aide des méthodes
bureaucratiques ou d´une réputation acquise sur base des mérites antérieurs,
les dirigeants locaux du parti faisaient ce qu´ils voulaient sans se soucier
des directives du Comité Central. L´étendue des contradictions apparaît donc à
travers le quart de membres qui avaient été frappés d´exclusion pour passivité.
Le Comité Central se devait donc d´agir contre la violation par les dirigeants
locaux de la directive du parti, mais l´avenir démontrera que la tâche n´était
pas facile. Ceci demeura donc une question d´actualité surtout qu´il devint
claire que l´Union Soviétique devait renforcer le rythme de son développement
dans l´intérêt de sa propre survie.
Un autre aspect des statistiques de Getty touche aux
allégations faites par Conquest et d´autres hommes de droite selon lesquelles
les purges de 1933 avaient été organisées pour exclure du parti les vieux
bolcheviques - les vieux cadres du parti du temps de Lénine - devenus opposants
à Staline. Cette affirmation est selon Getty, invraisemblable. La plus grande
partie des exclus, en fait, les deux tiers (2/3) étaient entrés au parti après
1928 et étaient pour cette raison, considérés comme des membres relativement
nouveaux. La répartition des exclus entre 23% d´agriculteurs/paysans, 14,6% de
fonctionnaires et environs 62% de travailleurs montre que la plus grande part des
exclus, 85%, étaient de travailleurs et
qu´il n´y avait pas des cadres du temps de Lénine. Dans The Great Terror, Robert Conquest parlant des purges de 1933
sous-entend que plus d´un million de membres avaient été exclus pour des
raisons politiques. Si l´on connait l´histoire des purges, l´on remarquera que
déclaration de Conquest est un mensonge manifeste.
”Proverka”-
1e contrôle des cartes du Parti de 1935
L´épuration de membres de 1935 révéla l´existence d´une
très grande désorganisation du parti sur l´ensemble du pays. Les registres du
parti ne correspondaient nullement à la réalité: Dans plusieurs sections du
parti, le nombre de membres ne correspondait pas à celui du registre. Plusieurs
membres déménageaient, d´autres quittaient le parti, certains autres étaient
exclus ou étaient morts sans qu´il en fut fait mention dans le registre. Les
secrétaires locaux du parti étaient préoccupés par l´exécution du plan
quinquennal et la collectivisation. Pour cette raison, par négligence ou par manque d´intérêt, ils ne se
sont pas souciés de mettre à jour le registre des membres. Suite à cette
situation, un grand désordre avait été constaté dans les comptes du parti.
Lorsqu´on remédia à toutes les irrégularités et que la direction du parti eut
une image d´ensemble de la situation catastrophique des cartes de membres, il
s´avéra donc indispensable de procéder à une réévaluation de ces cartes.
Aussi, le Comité Central du parti décida, en octobre
1934, que le parti, dans son ensemble, devrait initier un nouvel enregistrement
de membres. Le Comité Central envoya des représentants dans toutes les régions
du pays à la fois pour s´enquérir de l´état véritable des documents du parti et
pour exiger, dans la mesure du possible, une solution et apporter de l´aide au
travail d´enregistrement.
Le camarade Ostrovski fut envoyé au Comité de ville de
Smolensk (garraikom). Il commença par exiger, de ce comité, certaines décisions
simples et à nommer un chef de documentation lequel devait s´assurer que les
documents du parti furent mieux gardés soit dans un local soit dans un
coffre-fort. Il exigea aussi qu´on ne délivra plus de nouvelles cartes à ceux
qui avaient perdu les leurs. Ostrovski exigea encore qu´on commença
l´élaboration d´un nouvel registre de membres à partir de janvier 1935 et que
tous les comités du parti subordonnés au comité de la ville devraient subir la
même procédure.
On remarqua bientôt que le problème était tellement grave
que Ostrovski ne pouvait le résoudre. Les autres représentants du Comité
Central en mission dans d´autres parties du pays étaient confrontés aux mêmes
difficultés. Au point que vers la fin du mois d´avril 1935, on constata que
très peu de progrès avait été accompli avec le nouvel enregistrement. Un
rapport du Comité de ville de Smolensk montra qu´”au cours du processus
d´investigation des documents du parti, une série de disfonctionnements massifs
avaient été découverts et ceux-ci exigeaient
un traitement spécial ainsi qu´une
investigation approfondie”[18].
Le
Parti Communiste au début des années 1930
Pour le lecteur de la présente brochure, ceci peut
apparaître difficile à comprendre. Bien de gens en Occident ont été formés par
les médias bourgeois, à croire qu´il y avait une discipline des cadavres au
sein du Parti Communiste de l´Union Soviétique dans lequel tout et tous étaient
enregistrés et soigneusement contrôlés et cela par des contrôles répétitifs et
de longues listes de noms. La même discipline des cadavres sous-entendant,
selon les mêmes médias bourgeois, que personne n´avait réussi à échapper à ce
contrôle total qui aurait été d´application permanente et qui, de plus, aurait
coûté beaucoup d´argent et donné un très grand pouvoir aux bureaucrates du
parti.
Cette image est totalement fausse. En réalité, on sera plus proche
de la vérité si on met sens dessus dessous ces affirmations. Préoccupés par le combat pour la production et enivrés
des résultats incroyables de la production qui évoluaient de records mondiaux
en records mondiaux, bien de secrétaires locaux du parti avaient négligé le
reste des activités du parti. Ils considéraient que les résultats de la
production étaient le facteur le plus important, le seul à résoudre tous les
problèmes, le reste étant insignifiant. Même une question de grande importance
pour le parti, et plus spécialement pour un parti au pouvoir – le fait que
chaque membre du parti devait avoir une carte – avait été considérée dans bien
d´endroits comme une question secondaire. Les cartes du parti étaient
généralement gardées dans une armoire/une table ordinaire ou dans un coffre
dans des endroits accessibles dans les locaux du parti et elles disparaissaient
par milliers sur l´ensemble du pays. De manière aussi irresponsable que les
cartes étaient gardées, on en donnait sans problème à tous ceux qui déclaraient
avoir perdu les leurs. Dans la plupart des cas, il n´y eut jamais d´enquête
pour savoir ce qui se passait avec les cartes déclarées comme perdues. Même les
membres exclus gardaient leurs cartes, personne n´exigeait qu´on les rende au
parti. En ce qui concerne les membres défunts, leurs familles gardaient leurs
cartes, et celles-ci pouvaient être utilisées pour commettre des crimes ou la
corruption. Les résultats de la production qui étaient si écrasants firent
croire aux dirigeants locaux du parti qu´il y aurait bientôt une si grande
surproduction si grande qu´elle éloignait toutes les autres difficultés.
Deux
cents milles cartes du parti sont perdues
Au début de 1935, le
Comité Central fut obligé de constater que plus de 200.000 cartes de membres
avaient disparu! La plupart de ces
cartes avaient été données à ceux qui avaient perdu leurs cartes ou à ceux dont
les cartes avaient été volées. Plus de 1.000 cartes toutes nouvelles étaient
volées des locaux du parti et 47.000 avaient été délivrées à des gens qui
n´avaient jamais été enregistrés comme membres du parti. La carte du parti
était un document très important. Un détenteur d´une carte de membre pouvait
entre autres choses avoir accès aux locaux du parti dans tous le pays, locaux
dans lesquels des documents de grande valeur étaient conservés et où des
réunions du partie avaient lieu. Les cartes du parti étaient donc une
marchandise très recherchée par les espions, les ennemis, les opposants et les
agents étrangers. On se rendit malheureusement compte que ceux-ci n´avaient pas
de gros efforts à faire pour se procurer une carte du Parti Communiste et
l´utiliser comme protection dans leur mission de renseignement. En 1935, la
situation était telle qu´il n´était pas sûr
que derrière chaque carte du parti il se trouvait un membre fidèle et
loyal. Il pouvait bien s´agir d´un ennemi, d´un espion ou d´un saboteur.
Le 13 mai 1935, le Comité Central décida qu´un nouveau
contrôle national de documents du parti -”proverka”- devrait avoir lieu. Le
contrôle était dirigé à partir du centre par une commission du secrétariat du
Comité Central sous l´autorité de Ejov et du chef adjoint Malenkov. Le contrôle
consistait dans le fait que chaque membre du parti devait être interrogé par un
secrétaire du parti de sa localité ou de son lieu de travail sur sa vie, son
histoire, son travail ou autre, et les données ainsi obtenues étaient utilisées
pour réactualiser le registre du parti. En cas d´informations incorrectes, une
enquête plus approfondie sur la personne concernée était engagée et la carte de
membre était confisquée. Pour tous ceux qui ne pouvaient pas apporter la preuve
de leur appartenance au parti, une exclusion pure et simple était décidée et la
carte de membre était confisquée. Tous les exclus avaient, conformément aux
statuts du parti, le droit d´exercer un recours contre toutes les décisions
prises à leur encontre auprès d´une instance laquelle avait deux semaines pour
déclencher une nouvelle enquête et prendre une nouvelle décision.
L´ordre
bolchevique
Il était temps ”d´un introduire l´ordre bolchevique dans
notre parti”[19].
Le Comité Central s´était s´adressé de manière tout à fait particulière
aux leaders locaux qui étaient en fait,
la vraie cause du désordre dans le parti: ”Le Comité Central met en garde les
leaders de diverses organisations du parti, des organisations de base jusqu´au
niveau des régions sur le fait que s´ils ne mettent pas en place ... une
direction pour cette importante mission ... et qu´ils n´y remettent
immédiatement de l´ordre, des mesures contraignantes seront prises contre eux
par le Comité Central, mesures qui pourront aller jusqu´à inclure leur
exclusion du parti”[20].
Contrairement à ce qui se passa lors des purges
précédentes, il n´y eut pas, dans les contrôles des cartes de membres de 1935,
des raisons politiques ou sociales particulières qui pouvaient conduire à
l´exclusion. En 1935, seule la question de l´authenticité de la carte du parti
fut privilégiée. Ce qui mérite d´être noté. Malgré tout ceci, le contrôle de
1935 est présenté, dans la propagande bourgeoise, comme une partie de la
campagne des purges contre les opposants à la direction du parti. Cette information est totalement fausse. Nous
reviendrons plus tard sur cette question
Quel
a été le résultat du contrôle des cartes du parti?
On a pu remarqué que les secrétaires locaux du parti qui
avaient pourtant été chargés du contrôle des cartes n´ont pu, dans la plupart
de cas, prendre cette mission au sérieux. Ils n´ont pas, comme le comité
central l´avait recommandé, su donner à cette mission la priorité nécessaire à
sa réussite. Des rapports arrivaient au Comité Central qui montraient que la
tendance générale était de faire un contrôle aussi rapide que possible dans le
seul but d´en finir avec cette mission. L´engagement des secrétaires locaux du
parti était donc nul.
Dans
Nouveau
système de contrôle des cartes
Le Comité Central devait constater que le contrôle des
cartes allait être un échec. Il décréta, le 27 juin 1935, nu nouveau contrôle
des cartes qui devait avoir lieu au même moment que les assemblées générales du
parti. Tous les membres pouvaient alors se prononcer contre ceux qu´ils ne
considéraient pas comme des membres à part entière. Les choses prirent donc une
tournure différente à cette étape précise. Le Comité Central avait publiquement
critiqué les secrétaires locaux du parti d´avoir fait un mauvais travail. Ceci
qui amena les membres à exiger des critiques et à se faire des critiques à
eux-mêmes dans les réunions, ce qui firent de ces dernières de véritables
forums de débats. Les secrétaires du parti qui avaient à se reprocher, eurent
peur craignant qu´un contrôle continu des cartes du parti allaient révéler des
erreurs au sein de la direction locale du parti. Certains essayèrent de freiner
les débats en affirmant que la campagne était une campagne de contrôle des
cartes du parti et non une campagne des purges du parti. Il ne fut de toutes
façons pas possible de freiner les critiques des membres. Dans Origins of the Great Purges,Getty nous
donne un point de vue intéressant concernant les accusations proférées lors de
la réunion des membres du comité de la ville de Smolensk en juillet 1935. 616 accusations avaient été formulées à cette
réunion.
Accusations
pendant le ”proverka” à Smolensk en juillet 1935[21]
(Getty: Origins of the Great Purges)
Koulaks, commerçants et cas apparentés 226
Les dégénérés, les ivrognes, les oppresseurs des
femmes,
manquements disciplinaires 143
Fonctionnaires involontaires, voleurs, escrocs 106
Cartes perdues ou d´origine douteuse 62
Trotskistes, mencheviques, etc. 28
Officiers de l´armée blancs, policiers tsaristes 41
Antisémites 10
Total 616
Comme on peut le constater, les trois quarts des
accusations concernent les koulaks ainsi que les personnes qui s´étaient
enrichies pendant
Les réunions du parti de juillet 1935 devinrent un forum
de la campagne contre les fonctionnaires arrogants et d´autres oppresseurs. Malgré les critiques et
autocritiques, il n´était pas toujours sûr que tout se fasse de la même manière
au niveau de la base du parti. Mais à cette étape particulière tout au moins,
les conditions avaient radicalement changé à l´avantage des membres de base.
Staline s´était exprimé sur la nécessité des critiques et d´autocritiques et il
avait montré que le manque de critiques était une erreur fatale qui ”détruisait
les cadres” en ce que leurs défauts ne furent jamais inclus dans la discussion.
Le contrôle des cartes du parti de 1935 fit aussi découvrir un autre défaut grave
dans le parti: Les cartes du parti étaient faciles à falsifier et n´étaient pas
digne de confiance. Le besoin de nouvelles cartes devint une question qui
exigeait une solution immédiate.
La
campagne de mensonges de la bourgeoisie et la réalité
Laissez-nous maintenant évoquer certains mensonges
véhiculés dans les médias capitalistes sur le contrôle de 1935. Comme nous
l´avons vu dans l´exemple de la réunion des membres de Smolensk, les débats
tenus à cette occasion furent un coup dur contre les bourgeois qui s´étaient
introduits furtivement dans le parti, des gens qui poursuivaient des avantages
économiques et sociaux. De koulaks aux commerçants en passant par les voleurs,
d´anciens officiers blancs et d´anciens policiers tsaristes. Contrairement à la
version des falsificateurs, les opposants politiques n´ont été que très peu
touchés. Ce qui était arrivé lors du contrôle des cartes du parti était que les
travailleurs avaient chassé du parti les bourgeois qui y avaient été infiltrés.
C´est cet acte qui en soi a énormément fâché les
falsificateurs de l´histoire. Habitués à se voir accordés des privilèges dans
la société et à détester les travailleurs, ”la masse”, à ne jamais les voir protester, ils se
fâchent très sérieusement lorsqu´ils sont obligés de constater que dans un
parti des travailleurs, ces derniers décident et que la découverte des valeurs
bourgeoises hostiles conduit à l´exclusion. La chance de la bourgeoisie de
faire de la résistance après des années de travail de minage ne marcha plus.
Un autre mensonge est que le contrôle des cartes du parti
aurait été un acte de vengeance de la direction du parti – on vise Staline bien
entendu – pour le meurtre de Kirov. Kirov qui était membre du comité central et
président du parti à Leningrad, avait été tué le 1 décembre 1934 au siège du
parti de cette ville. (Le meurtrier Nikolaïev avait eu accès au siège du parti
en utilisant une carte du parti ancienne et non valable). Les allégations de
vengeance – celle-ci aurait été terrible et sanguinaire vu le nombre
d´exécutions qu´elle aurait entraînées -, tiennent leur origine de Robert
Conquest. Celui qui lit son livre, The Great Terror, et qui n´est pas
familier de ces questions historiques, aura beaucoup de difficultés à découvrir
ses mensonges. Pour tout celui qui veut
vraiment comprendre l´histoire et s´y met réellement, ces allégations
constituent un véritable non-sens. Le
contrôle des cartes du parti de 1935 avait été décidé par le Comité central du
parti comme une suite logique du nouvel enregistrement des membres d´octobre
1934. Kirov avait en fait pris part à la prise de cette décision laquelle avait
eu lieu deux mois avant son assassinat! Kirov aurait-il décidé une action de
vengeance contre le meurtre ayant entraîné sa mort deux mois avant que celui-ci
n´ait effectivement eu lieu?
Conquest
sème la confusion
Dans son livre, Conquest confond le contrôle des cartes
du parti avec les événements ayant entouré l´enquête policière sur le meurtre
de Kirov. Ceci est la méthode typique de Conquest, utilisée pour semer la
confusion, déformer, falsifier. L´enquête sur la mort de Kirov permet de
découvrir l´existence du Groupe de Leningrad, un groupe terroriste qui avait
planifié la conspiration autour de la mort de Kirov. Le meurtrier de Kirov et
ses compagnons furent condamnés à mort. Mais l´enquête sur la mort de Kirov
avait conduit au soi-disant Procès Zinoviev-Kamenev de janvier 1935, procès
lors duquel un certain nombre de personnalités connues et d´hommes politiques
haut placés furent condamnés soit à mort, soit à la relégation. Les accusés
avaient été condamnés parce qu´ils avaient eu connaissance de l´atmosphère
terroriste existant au sein de l´opposition politique de Leningrad à laquelle
le meurtrier de Kirov appartenait et parce qu´ils avaient discrètement soutenu
ces événements.
Observez que le Procès Zinoviev-Kamenev avait eu lieu
entre le 16 et le 23 janvier 1935. Le
procès avait donc eu lieu pendant le nouvel enregistrement des membres du parti
qui avait été décidé en octobre 1934, et qui, en janvier 1935 avait presque
échoué sans avoir donné de résultat. Le contrôle des cartes du parti qui pour
Conquest a été une action de vengeance contre les opposants fut perçu comme le
résultat du fait que le contrôle antérieur n´avait pu résoudre les difficultés
qui se posaient. Il avait commencé en juin 1935, cinq mois après la clôture du
procès Zinoviev-Kamenev et la condamnation des opposants. Le contrôle des
cartes du parti ne pouvait donc pas avoir une quelconque influence sur le
procès ou être un acte de vengeance contre les condamnés. Conquest est
conscient de l´existence d´une grande ignorance sur l´histoire du socialisme et
n´hésite pas à l´utiliser pour propager sa sale propagande.
Éliminer
les vieux bolcheviques?
Un autre mensonge de Robert Conquest est que l´objectif
du contrôle de 1935 était d´éliminer les vieux bolcheviques. C´est toujours la
vieille histoire de Staline qui, fou du pouvoir, voulait se débarrasser de tous
les vieux bolcheviques pour régner en maître qui est nous encore servie.
L´élimination de vieux communistes est une histoire imaginaire qui n´a que
faire de la réalité. Dans Origins of the Great Purges, Arch Getty
écrit non sans conviction que ”de 455 exclus du Comité de
De plus, Getty ajoute que ”bien que les Grandes Purges soient
souvent associées avec l´élimination de ”vieux bolcheviques”, il semble que ce
soit le contraire qui avait eu lieu à Smolensk en 1935. Les secrétaires du
parti qui avaient été dégradés ou démis de leurs fonctions avaient, en moyenne,
rejoint le parti en 1928, alors que leurs remplaçants avaient, en moyenne, été
admis au parti en 1926, soit deux ans plutôt. Ces remplaçants étaient environs
3,7 ans plus âgés que ceux qui avaient été démis. Par conséquent, ”ceux qui ne
se souciaient pas d´un bon leadership” furent remplacés par de vieux
travailleurs du parti muni d´une plus grande expérience. Le nombre de nouveaux
secrétaires des organisations du parti de la ville d´origine ouvrière avaient
augmenté (30 de 39 par comparaison avec le chiffre antérieur, 26 de 39) et ceux
qui provenaient du monde paysan ou avaient été fonctionnaires avait diminué”[23].
Ce constat montre que ”l’élimination des vieux bolcheviques” n’est pas supporté
pour les recherches faites dans les archives de Smolensk. C´est le pouvoir
accru des travailleurs dans le parti que fait parlé la racaille réactionnaire,
de Conquest à Ahlmark et Skott.
Le
changement des cartes de 1936
Le Comité Central du parti décida, après le contrôle des
cartes de 1935 et comme suite à celui-ci, de changer les cartes pour tous les
membres. L´objectif principal était de ne donner des cartes qu´aux vrais
membres du parti, aux communistes dévoués. Les directives du parti étaient très
précises et plaines de détails que personne n´avait le droit de négliger.
D´abord, aucun changement de cartes ne pouvait avoir lieu quelque part sans que
le contrôle de 1935 n´y fût officiellement clôturé. Ensuite, seul le secrétaire
du parti était autorisé à délivrer des nouvelles cartes. Bien plus, le
changement de cartes ne pouvait se faire que dans le bâtiment où le secrétaire
du parti avait son bureau et seulement en présence du membre concerné et du
secrétaire de la cellule du parti à laquelle ce membre appartenait. Après avoir
décliné son identité, le membre devait remplir un formulaire en deux
exemplaires. Le membre devait par la suite remplir sa carte de membre et les
deux formulaires en présence du secrétaire du parti et avec ce dernier comme
témoin. Le secrétaire faisait aussi la même chose puis cachetait la carte. Les
cartes devaient avoir les photos des membres propriétaires, faute de quoi elles
étaient déclarées non valables. Les nouvelles cartes n´étaient envoyées qu´aux
secrétaires régionaux du parti par l´entremise de la poste du service de
sécurité NKVD; elles n´étaient remplies qu´avec un encre spécialement envoyé
par le comité central. Toutes les signatures des secrétaires du parti qui
avaient été autorisés à délivrer les cartes, étaient gardées dans des archives
spéciales de la direction centrale du parti. Le changement des cartes pour des
millions de membres était, de la part de la direction centrale du parti, une
tentative sérieuse d´établir un véritable document authentique très difficile à
falsifier.
Le changement des cartes n´avait donc pas pour objectif
de découvrir davantage d´ennemis du parti et d´initier une nouvelle campagne
des purges. Le comité central du parti avait mis l´accent sur l´idée contraire
dans sa directive émise à cet effet: ”Si lors du contrôle des cartes, les
organisations du parti visent spécialement la découverte des ennemis infiltrés
dans le parti, les aventuriers et les escrocs, dans le changement des cartes
elles doivent se débarrasser des membres passifs lesquels ne méritent pas la
qualité de membres, et des gens qui sont devenus membres du parti par hasard”[24].
Seulement
2 % d´exclus
Le changement des cartes devait avoir lieu de février à
avril 1936. Mais il dut, dans certains endroits, se terminer beaucoup plus
tard, en novembre 1936. Il n´existe pas de statistiques nationales sur le
nombre de membres exclus enregistrés pendant cette période mais les chiffres de
Smolensk nous donne un nombre très limité. Dans la section du parti de
Smolensk, 4.348 cartes avaient été délivrées et 97 personnes, soit environs
2,1% des membres avaient été exclues[25].
On apprend aussi qu´environs le même pourcentage avait été rapporté concernant
le reste de l´ensemble des districts de
Même le changement des cartes de
Les
procès politiques de 1936-1938 en Union Soviétique
Les procès politiques et les purges du Parti Communiste
étaient deux événements différents qui n´avaient aucun lien entre eux. Les
membres du parti qui avaient été exclus et traduits devant la justice pour
avoir participé à des activités criminelles ou avoir mené des activités
anti-révolutionnaires constituaient un petit groupe d´exclus. Pour bien
comprendre cette affaire, il faut essayer de comprendre l´histoire des procès
des années 1930. La lecture bourgeoise de l´histoire ne donne pas de telles
opportunités. Les bourgeois ont fait des événements de cette décennie 1930 en
Union Soviétique une histoire confuse et un assemblage grossièrement falsifié
des événements et des mythes, des demi vérités et des mensonges, une
falsification où les purges et les procès pour trahison sont présentés comme un
seul et même événement.
Les procès politiques avaient commencé avec le procès
contre le Centre Trotski Zinoviev du mois d´août 1936, en fait le premier de
quatre procès qui eurent lieu entre 1936 et 1938. Dans les médias bourgeois,
ces procès sont désignés sous le vocable de ”procès de Moscou” et sont toujours
décrits comme des histoires macabres sur ”la vengeance de Staline”, histoires
aux cours desquelles des millions de gens furent nuitamment arrachées de leurs
maisons pour être tuées dans les plus répugnantes conditions. Selon le livre de
Peter Englund, Brev från nollpunkten,
ils avaient été tuées avec une balle dans la nuque, dans des chambres
”insonorisées” avec ”la bâche” sur le
plancher ou ”des cannelures descendantes sur le plancher, de même nature que
celles qu´on voit dans des boucheries”.
Englund affirme que ”les cadavres étaient ensuite amenés” par des gens
”portant des manteaux protecteurs, des chaperons, des gants en caoutchouc et
des crochets” et chargés dans des camions où se trouvaient d´autres corps dévêtus
qui attendaient”. Selon Englund la navette laissait derrière elle des goûtes de
sang dans les rues de Moscou[26]!
Les récits de Englund sont puisés directement chez
Conquest et d´autres journalistes écrivant pour
Lors des soi-disant procès de Moscou, 55 personnes
avaient été condamnés à mort et 7 à des peines de prison fermes. La plupart
étaient des personnalités haut placées dans le parti, l´appareil de État, et
l´armée qui étaient accusées de trahison, d´espionnage, de terrorisme, de
sabotage, de corruption ou d´intelligence avec l´ennemi, l´Allemagne nazie. Les
procès de Moscou étaient suivis des procès similaires organisés dans le reste du pays contre les complices
des accusés de Moscou et des centaines de saboteurs, d´espions et de traîtres
de toutes sortes furent condamnés soit à mort, soit à des peines de prison. À
l´exception des procès contre les militaires qui étaient tenus à portes fermées
à cause des préparatifs de guerre contre l´Allemagne nazie, tous les procès
étaient publics. Les procès de Moscou furent suivis par la presse
internationale et par le corps diplomatique accrédité dans la capitale. Le
protocole des trois procès publics de Moscou furent publiés sous forme de livre
par le gouvernement soviétique et traduits dans plusieurs langues étrangères
dont le suédois.
Historique
des procès de trahison de 1936-1938 et les purges du parti
___________________________________________________________
Période
de liberté des années 1920
Pour les historiens bourgeois et les activistes
politiques petits bourgeois d´origine ”socialiste” ou ”de gauche”, la décennie
1920 soviétique est plusieurs fois décrite avec nostalgie par opposition
aux ”dures” années 1930. Pour eux, la
décennie
Il y avait bien sûr la liberté de débattre et de
participer à une vie culturelle au cours de la décennie 1920, mais ceci n’était
pas seulement une caractéristique particulière de cette décennie. Au fur et à
mesure que la société se développait et que se poursuivait la construction
socialiste au cours des années 1930, divers secteurs de la population
soviétique pouvait participer aux débats sociaux et à la vie culturelle riche
et variée à un rythme jamais observé auparavant. Nous parlons ici des dizaines
et des dizaines de millions de gens qui pendant cette décennie 1930, eurent
accès à une société nouvelle, une société moderne offrant des opportunités
diverses dans le domaine de la culture, du débat et de la connaissance. Les quelques milliers de génies ”des années
1920 – la décennie de la liberté” pouvaient donc eux aussi être de bons génies.
Mais il s´agissait d´une petite minorité privilégiée qui jouissait de la
richesse culturelle et des débats sociaux d´alors. On ne peut pas les comparer
aux dizaines de millions de gens qui eurent accès aux opportunités de même
nature pendant la décennie 1930.
Lutte
contre l´instauration du socialisme
Ce que la bourgeoise salue dans la décennie 1920 en Union
soviétique, ce ne sont pas les débats sociaux et le développement culturel,
c´est plutôt la possibilité qu´avait l´opposition politique de lutter contre
l´instauration du socialisme. Ce que la bourgeoisie apprécie davantage dans
cette période, ce sont les activités de sabotage et de division auxquelles se
livraient, au nom de la liberté, les divers groupes d´opposants et des
fractions à l´intérieur du Parti Communiste. Tous ces groupes étaient
constitués de mêmes gens que Trotski, Zinoviev, Kamenev, Boukharine, Smirnov,
Rykov, Piatakov, Radek et Sokolnikov lesquels étaient à la tête du combat contre
l´instauration du socialisme. Pour cette minorité au sein du Comité Central du
parti, il n´existait aucune possibilité d´introduire le socialisme dans un pays
sous-développé comme
Un autre exemple témoignant de la nature des
contradictions ayant prévalu à l´époque
est la vision que développa Boukharine sur le développement du pays en
1925. Dans une déclaration sur la politique agricole en avril 1925, Boukharine,
membre du Comité Central, appela les paysans à ”s´enrichir”. Ceci était son
message sur les possibilités de développement de l´agriculture en Union
soviétique. Même si Boukharine s´autocritiqua et que le Comité Central et
Staline en personne l´acceptèrent[27],
ceux-ci continuaient à s´interroger sur la nature d´une telle politique. Il n´y
a qu´une façon de s´enrichir, c´est en exploitant les autres. Et seuls les
grands fermiers, les koulaks, le pouvaient. Boukharine devait comprendre que
son invitation aux koulaks pour s´enrichir constituait une exploitation
accélérée des paysans pauvres. Le fond de sa pensée devait donc être que les
paysans les plus riches allaient créer de nouveaux emplois aux petits paysans
ruinés et appauvris au même moment où État recevait davantage d´impôts. De
cette façon-là, les roues allaient donc ”commencer à tourner”.
Capitalisme
ou socialisme?
Les contradictions entre l´opposition et la majorité des
membres du Comité Central concernaient le futur du pays, donc la question de
savoir s´il fallait le capitalisme ou le socialisme. Ce fut la question
principale de la 14è Congrès du parti de décembre 1925. Le Congrès se prononça
sur le fait que l´Union soviétique, ”le pays de la dictature du prolétariat, a
tout ce qu´il faut pour construire une parfaite société socialiste” et que
l´objectif principal du parti était ”la lutte pour la victoire de la
construction socialiste en Union soviétique”[28].
La résolution ainsi formulée avait été présentée comme la position officielle
du parti, et elle liait tous les membres de celui-ci. Cette résolution décida
donc de manière déterminante la question du développement politique de l´Union
Soviétique dans l´avenir ainsi qu´au sein du Parti Communiste. Elle ne fut
cependant pas suivie par l´opposition. Immédiatement après le Congrès, celle-ci
commença, de manière organisée, à combattre
le travail du Comité Central du parti pour le socialisme. Au fur et à
mesure que les années passaient et que des preuves concrètes de la justesse de
la politique du Comité Central se manifestaient ouvertement, entre autres les
résultats fantastiques de la production pendant le premier plan quinquennal,
l´opposition devenait de plus en plus isolée et perdait de l´influence au sein
du parti et de État Petit à petit, le
travail secret de l´opposition évolua vers une conspiration contre le gouvernement,
du meurtre au sabotage en passant par l´espionnage et la collaboration avec
l´Allemagne nazie, tout était donc permis.
Manque
d´instruction
Une autre contradiction, mais de nature toute différente
cette fois-ci, existait aussi au sein du Parti Communiste pendant la décennie
1930. Lorsque le niveau d´instruction était très bas -ceci est un héritage des
années 1920-, la bureaucratie avait une influence très importante au sein du
parti. Au cours des années 20, le parti avait des difficultés à trouver des
gens instruits pour les engager en qualité des fonctionnaires. Une partie de
ceux-ci avaient joint le parti pour se procurer des avantages. Les
fonctionnaires du parti eurent donc avec le temps beaucoup de pouvoir au point
qu´ils se permirent, dans certaines situations, de menacer la position des
travailleurs. Le manque d´instruction de ces derniers avait fait en sorte que
la plupart d´entre eux n´osaient pas dénoncer les abus de pouvoir des
fonctionnaires du parti, de s´en prendre aux fonctionnaires corrompus ou
d´argumenter vis-à-vis des plus éloquents d´entre eux. Une fois que le parti s´engagea fermement sur
le chemin du socialisme, après le 15 ème Congrès du parti en décembre 1927,
l´opposition ayant alors été totalement vaincue, le combat pour les droits et
le pouvoir des travailleurs au sein de l´appareil du parti et contre la
bureaucratie fut mis à l´ordre du jour. Les personnages en vue dans ce combat
étaient Staline, Jdanov et d´autres camarades du Comité Central du parti.
Kirov, qui fut assassiné sept ans plus tard, le 1er décembre 1934, était l´un
de ceux-ci. Selon Staline, ce combat concernait ”la façon de penser des gens”.
Ensemble avec Kirov et Jdanov, Staline expliqua que la plus grande partie des
problèmes du parti pouvait être résolu grâce à l´éducation politique des membres
du parti, ce qui fut fait au cours des années qui suivirent.
Le
combat contre la bureaucratie au sein de l´appareil du parti
Au 17ème Congrès du parti de janvier 1934, la question du
combat contre la bureaucratie occupait une bonne place dans l´agenda des sujets
à traiter. La direction du parti se battit pour le renouvellement des idéaux
communistes en exhortant à l´étude, à l´autocritique, à la réorganisation et
aux attaques contre la bureaucratie à tous les niveaux du parti. Le Congrès
avait été organisé à une époque où la production industrielle et agricole avait
atteint des niveaux fantastiques et était considéré comme étant ”le Congrès de
la victoire”. Dans son adresse au Congrès, Staline résuma la situation de cette
manière: ”Pendant cette période, l’U.R.S.S. s’est transformée à fond ;
elle s’est débarrassée de son enveloppe arriérée et médiévale. De pays agraire,
elle est devenue un pays industriel. De pays de petite culture individuelle,
elle est devenue un pays de grande agriculture collectivisée et mécanisée. De
pays ignorant, illettré et inculte, elle est devenue – ou plus exactement, elle
devient – un pays lettré et cultivé, couvert d’un immense réseau d’écoles
supérieures, secondaires et primaires, où l’enseignement se fait dans les langues
des différentes nationalités de l’U.R.S.S.”[29].
Après la mort de Kirov en décembre 1934, la politique
suivie jusqu´alors ne changea pas, au contraire. La campagne pour le
renforcement des pouvoir des membres de base au sein du parti fut poursuivi contre
les fonctionnaires corrompus, contre la bureaucratie. La direction du parti
continua d´exhorter les membres au contrôle des cadres et à l´autocritique. La
direction du parti exigea aussi une correcte application des statuts du parti
de telle sorte qu´on put garantir la démocratie interne au parti et lutter
contre les abus de pouvoir. Des contacts accrus furent aussi exigés entre les
directions locales du parti et les membres. Le fait pour les directions locales
du parti de connaître individuellement les membres du parti fut considéré par
la direction centrale comme un progrès important pour se désengager d´un style
impersonnel et bureaucratique. Il eut de nombreuses exigences de la part des
membres de différents districts du parti mais cette évolution de la situation
n´était pas toujours bien vue par les directions régionales du parti. Les
purges frappèrent donc plusieurs leaders locaux du parti accusés d´abus de
pouvoir ou tout simplement de passivité et d´ignorance. Mais le Comité central
du parti ne put réussir d´approfondir toutes les questions et de les résoudre.
Les exhortations à l´épuration des corrompus ou des leaders locaux négligents ne réussit que partiellement, parfois
pas du tout. Les appareils locaux du parti brillèrent par leur capacité à se
défendre contre les critiques des membres.
Les
succès de l´Union Soviétique et la menace de l´Allemagne nazie
C´est de cette façon que se présentait la situation
politique du Parti Communiste soviétique au cours des années 1930. Le parti avait,
à l´aide de puissantes coopératives, conduit l´Union Soviétique à des succès
incroyables dans la production et la construction de la société aussi bien dans
les villes que dans les campagnes. L´Union Soviétique était dans le monde une
force qui pouvait compter sur ses propres moyens. Mais, au milieu des années 1930, le fascisme
commença à atteindre un tel degré de puissance en Europe qu´il devint une
menace directe contre l´existence même de l´Union soviétique. Appuyé et financé
par la grande finance allemande depuis la fin des années 1920, Hitler avait
construit le parti nazi et gagné des victoires électorales dans un pays où le
chômage atteignait 10 millions de personnes. Nommé chancelier en janvier1933,
Hitler eut bientôt tous les pouvoirs en. Tout naturellement, le gouvernement de
l´Union Soviétique s´était aperçu de la montée en puissance du nazisme en
Allemagne et devait en tenir compte dans sa planification sur le développement
de l´Union Soviétique et la défense du pays. Les nazis avaient pris le pouvoir
en promettant d´éradiquer le communisme et l´Union soviétique.
Résultat
des élections nationales 1928-1932 en Allemagne en millions de voix.[30]
Les
cinq plus grands partis.
L´évolution
du chômage pendant toutes ces années est aussi indiquée.
1924 1928 1930 1931 1932 1932 1932 1934
20
mai 14 sept. 31 juillet 6
nov.__________
Social-démocraties 9,1 8,6 8,0 7,3
Communistes 3,3 4,6 5,3 6,0
Centristes 4,7 5,2 5,8 5,3
Nationalistes 4,4 2,5 2,2 3,0
Nazis 0,8 6,4 13,7 11,7
Chômage 2 millions 4 millions 6
millions 10 millions
Résultat
des élections nationales 1928-1933 en Allemagne.[31]
Nombre
de parlementaires.
1928 1930 1932 1932 1933
20
mai 14 sept. 31 juillet 6 nov. 4 mars
Social-démocraties 153 143 133 121 120
Communistes 54 77 89 100 81
Centristes 62 68 75 71 73
Nationalistes 73 41 37 51 52
Nazis 12 10 7 230 196 288
Parti du Peuple bavarois 16 19 22 19 19
Parti du peuple allemand 45 30 7 11 2
Parti de État allemand 25 20 4 2 5
Parti industriel allemand 23 23 2 2 0
Autres partis 28 49 9 9 7
Total 491 577 608 582 647
Observez que Hitler prit le pouvoir le 30 janvier 1933 et
que les élections du 4 mars 33 eurent lieu pendant le nazisme. C´étaient les
dernières élections auxquelles plusieurs partis avaient participé. Le Parti
Communiste DKP avait été, une semaine avant les élections, faussement accusée
d´être responsable de l´incendie du Parlement allemand qui eut lieu à Berlin le
27 février 1933. Le parti DKP fut poursuivi de manière implacable pendant les
semaines des élections par les nazis. A cette étape, des milliers de membres de
DKP étaient déjà arrêtés et envoyés dans des camps de concentration et des
centaines de camarades dirigeants avaient déjà été assassinés par
L´Allemagne nazie, qui se renforçait militairement chaque
année, était une menace contre l´Union soviétique. Vers le milieu des années
30, Hitler avait déjà dénoncé toutes les conventions internationales limitant
l´armement de l´Allemagne et était entrain de faire de cette dernière la plus grande puissance
militaire d´Europe. Contre les deux milles avions militaires allemands,
Procès
contre le Centre Trotski-Zinoviev, 14-24 août 1936
(Le
Procès Zinoviev-Kamenev)
Après le procès contre le meurtrier de Kirov et le groupe
terroriste de Leningrad ainsi que le procès contre Zinoviev, Kamenev et les
autres en janvier 1935, il y eût des suspicions qu´il existait en Union
Soviétique plusieurs groupes d´opposants planifiant terreur et attentats et
ayant participé à la conspiration contre le gouvernement. Ces suspicions
s´étaient fortement amplifiées au cours des investigations entourant ces
différents procès, et elles permirent de constater que les groupes terroristes
avaient un dénominateur commun – ils étaient inspirés et orchestrés à partir
d´un centre où les personnages clés étaient les opposants frappés de prison et
d´exclusion au procès Zinoviev-Kamenev de janvier 1935. Ceci était du jamais vu
dans l´Union Soviétique de l´époque. La gravité de la situation du moment, avec
la menace que représentait l´Allemagne nazie, aurait dû faire converger
l´attention, la pensée des gens vers un effort commun des forces en vue de
mobilisation et de l´équipement du pays pour faire face au nazisme.
Au milieu de l´année 1935, on engagea une nouvelle
investigation contre les politiciens et les fonctionnaires impliqués dans le groupe
Zinoviev-Kamenev et dans ses activités antérieures. L´investigation conduisit,
en août 1936 au procès contre le Centre Trotski-Zinoviev ou ”le Centre de
Moscou”. Seize vieux trotskistes et des partisans de Zinoviev, tous d´anciens
haut placés dans le parti et État (Zinoviev, Kamenev, Jevdokimov, I. Smirnov,
Bakaiev, Ter-Vaganjan, Mratjkovski, Dreitzer-Golsman, Reingold, Pikel, Olberg,
Berman-Juip, Fritz David(Krugljanski), M. Lurie, N. Lurie) étaient donc accusés
pour avoir, en complicité avec l´organisation de Trotski en Allemagne nazie,
organisé le sabotage, l´espionnage, les activités terroristes et les attentats
contre des personnalités haut placées du gouvernement et du parti. Ce qui, des
années auparavant était une opposition politique, était passé à la violence
organisée. Vaincus aux élections du parti de 1927 sur l´orientation de la
politique du parti où l´opposition récolta moins de 1 % des voix, les accusés
n´avaient trouvé que la violence et le coup État comme moyen de prendre le
pouvoir en Union soviétique. Les résultats fantastiques de la production, fruit
du plan quinquennal et de la collectivisation de l´agriculture avaient mieux
qu´autre chose politiquement éliminé les accusés. Ces résultats ne
laissaient à quiconque aucune
possibilité d´organiser une quelconque plate-forme politique contre le
gouvernement.
Terreur
organisée
Au cours de l´interrogatoire, Kamenev fit lui-même cette
déclaration. ”Nos espoirs que les difficultés que le pays traversait étaient
insurmontables, que la situation de crise dans l´économie et l´échec de la
politique économique initiée par la direction du parti l´était tout aussi,
avaient depuis la première moitié de 1932 déjà ouvertement subi un naufrage.
Sous la direction de SUKP du Comité central, on vainquit toutes les difficultés
et le pays marcha victorieusement, rapidement et fortement sur la voie du
développement économique. Nous ne pouvions pas nous empêcher de le constater.
Nous pensions qu´il nous aurait fallu renoncé à la lutte. Mais la logique de la
contre-révolution, l´ambition irrésistiblement manifeste de prendre le pouvoir nous conduisit dans une autre
direction. La grande capacité du Comité central à résoudre toutes les
difficultés qui se posaient, la victoire que la politique du Comité central a obtenue,
produisirent chez-nous un courant d´amertume et de haine contre la direction du
parti, mais surtout contre Staline”[32].
Le dénominateur commun pour les accusés était que tout
était permis pour combattre le gouvernement de Staline ou bien comme le dit
Zinoviev au cours de l´une des réunions secrètes du groupe tenue en 1932: ” la
terreur est sûrement inconciliable avec le marxisme, mais pour le moment, il
faut se débarrasser de telles réflexions”[33].
Les accusés reconnurent entre autres choses que c´était le Centre
Trotski-Zinoviev qui avait planifié et exécuté le meurtre de Kirov. Les détails concernant l´attentat manqué
contre Staline et Vorochilov furent aussi connus. On révéla en même temps que
de nouveaux attentats avaient été planifiés contre ceux-ci et contre Jdanov,
Kaganovitch et d´autres. Un plan de coup État fut révélé pendant le procès.
Trotski
au centre
Au cours ce procès qui fut public et auquel avait pris
part le corps diplomatique et la presse internationale et où tous les accusés pouvaient
parler librement, il y eut beaucoup de révélations inattendues. On découvrit
par exemple que le personnage principal de la conspiration était Trotski lequel
envoyait des directives à partir de l´étranger et exigeait des attentats contre
les membres du gouvernement ainsi que les actes de sabotage et de terreur.
Selon les récits des accusés, Trotski qui était alors en exil, venait à Berlin
et à Copenhague pour des rencontres directes avec certains membres du groupe.
Pour le reste, la terreur de Trotski fut orchestrée et exécutée par son fils
Lev Sédov qui habitait Berlin et qui était le centre même de la conspiration.
Trois de seize accusés du procès contre le Centre
Trotski-Zinoviev (I. Smirnov, Dreitzer, Goltsman) étaient plusieurs fois à
Berlin en voyage de service et en profitaient pour rencontrer soit Trotski,
soit Sédov qui leur donnaient des instructions directes sur les assassinats et
les actes terroristes à commettre en Union soviétique. Cinq des seize accusés
(Oldberg, Berman-Juirn, Fritz David (Krugljanskii), M. Lurie, N. Lurie)
habitaient en Allemagne nazie et Trotski les envoyait en Union Soviétique pour
commettre des attentats. Certains bénéficiaient de l´aide de
Complicités
au sein du Parti Communiste
Au cours du procès, on découvrit que des personnalités
importantes du centre de terreur, Zinoviev, Kamenev et Reingold, avaient des
contacts au plus haut niveau du Parti Communiste et qu´ils entretenaient avec
eux une collaboration politique dans le but de faire aboutir leur conspiration.
C´était quelque chose de sensationnel. Des fonctionnaires haut placés du parti
qui participent à une conspiration contre le Parti Communiste? Une conspiration
pour commettre des sabotages, de la terreur et des meurtres? À cause de cette
révélation, le procureur déclara, le 21
août, pendant le procès, qu´”il ordonnait l´ouverture d´une enquête sur les
déclarations concernant Tomski, Rykov, Boukharine, Uglanov, Radek et Piatakov”,
et qu´”après les résultats de l´enquête le ministère public laissera le procès
poursuivre son cours légal”. Même Sérébriakov et Sokolnikov qui avaient été
cités à comparaître, ”devraient être mis à la disposition de la justice”[35].
Ceci concernait même le général Putna, un vieux trotskiste, fut aussi cité au
cours du procès comme un participant aux activités de terreur des trotskistes.
Le corps diplomatique, un assemblage de vrais bourgeois
et d´antisocialistes, assistait au procès, et ne douta jamais du sérieux de
celui-ci, de son impartialité et de sa véracité. Un journaliste anglais
internationalement reconnu de l´époque, le juge Denis Nowell Pritt, membre du
parlement anglais, assistait au procès et en rapportait les nouvelles dans le
journal londonien News Chronicle. Le juge Pritt avait fait ses études de droit
au Winchesters et à l´Université de Londres. Il avait appris la procédure
judiciaire en Allemagne, en Suisse, en Espagne et en Union Soviétique. Il
connaissait bien le fonctionnement des tribunaux soviétiques. Le juge Pritt
témoigna, dans News Chronicle, de l´impartialité et de la crédibilité du
procès. Selon Pritt, la culpabilité des accusés ainsi que leurs crimes avaient
été démontrés lors du procès.
Dans un article intitulé The Zinoviev Trial, le juge s´engagea même dans une polémique
contre ceux qui doutaient du caractère correct du procès. Cet article fut
traduit en suédois et publié par Arbetarkultur (1937) sous le titre de Sinovjev
och Kamenjev inför Folkets Domstol. Présenter le point de vue du juge
aujourd´hui est d´un intérêt historique évident. La campagne de mensonges
contre l´Union Soviétique est plus grande que jamais. Nous nous donnons la
liberté de présenter de longs extraits de cet article de 50 pages écrit par le
juge Pritt. Son analyse du procès est par ailleurs applicable aux procès
politiques postérieurs de 1937 et 1938 parce que les conditions étaient
identiques, tout ayant été fait en conformité des pratiques d´usage en Union
Soviétique. Lisons donc ce qu´un juriste anglais écrit de la procédure
judiciaire en Union Soviétique.
”Zinoviev
et Kamenev devant le tribunal du peuple”[36]
Par D.N. Pritt
”Ce qu´il y a de plus courant et de plus important des critiques
qui ont été émises est qu´il est probablement incroyable que des gens se
soient, aussi ouvertement et sans retenue, reconnus coupables des crimes aussi
graves que ceux en question. On voudrait nous faire croire que ces aveux ont
été obtenus par ”le troisième degré” ou par d´autres méthodes incorrectes ...
Il est clair que la démonstration des preuves a été très valable, que les
accusés, lorsque confrontés à ces preuves, ont choisi de se déclarer coupables
alors qu´ils avaient la possibilité de les contredire. C´étaient des gens
expérimentés, intelligents et instruits qui se déclarés coupables; à partir de
ce moment, l´affaire était close. Mais pour beaucoup de critiques, l´affaire
commence d´abord là, car les aveux, sous-entendent-ils, peuvent avoir été
extorqués par brutalité, menaces et promesses. (....) Mais où se trouve la
moindre allusion que des actes pareils ont eu lieu dans cette affaire? (...) Il
est à mes yeux clair, pour plusieurs raisons, qu´il est impossible de parler
d´aveux extorqués de force.
En ce qui concerne la plupart des accusés, on doit se
rappeler qu´il s´agit des gens durs et plus particulièrement, des
révolutionnaires expérimentés, des hommes qui, à voir leurs sources de
connaissances, l´expérience individuelle de chacun d´eux, connaissaient toutes
sortes de prisons et de procédures d´investigation, ils connaissait avant tout
très parfaitement la mentalité et la
position des autorités qui avaient en mains leurs dossiers. S´il arrivait que
le Commissariat du peuple en charge des affaires intérieures qui a repris le
personnel et les fonctions de G.PU. obtenait les aveux par des fausses
promesses de jugements cléments, personne ne serait sûrement mieux placé pour
comprendre le caractère inutile de telles promesses dans des circonstances d´un
procès tel que celui-ci, que les révolutionnaires expérimentés que j´ai vus sur
le banc des accusés à Moscou. Bien plus, s´il rentrait dans les habitudes du
Commissariat du peuple d´obtenir des aveux par violence, personne ne serait
mieux placée que ces hommes pour résister à la violence et pour révéler par la
suite au monde entier comment ils avaient été traités, dans un espoir sûr de
discréditer de cette façon leurs ennemis et gagner la sympathie pour soi. S´il
y avait eu des manipulations ou de la négligence, pour amener l´un de ces
hommes à avouer, ils seraient sûrement mieux placés que quiconque sur cette
terre pour découvrir et neutraliser le complot.
Il était cependant plutôt clair pour tout celui qui a
suivi le procès, que les aveux verbaux qui y ont été faits ne pouvaient
nullement avoir été dictés aux accusés et appris par coeur par eux. Aucun homme
normal ne pouvait accepter de donner sa caution à une telle farce. S´il ne
s´était agi d´un petit nombre de ”faits” bien définis, l´un ou deux individus
parmi les accusés pouvait les avoir appris par coeur et les réciter par la
suite. Mais il y avait seize accusés dans cette affaire, qui étaient entendus
sur un tas de faits survenus au cours de plusieurs années et d´événements, qui
avaient eu lieu à des endroits différents, séparés les uns des autres par des
milliers de kilomètres, et dans lesquels l´un ou l´autre ou deux, trois ou
quatre personnes étaient impliquées. Je doute que, dans une pareille farce,
plus d´une personne ou deux auraient pu accomplir parfaitement son rôle sans
trahir tout le complot ... En plein
interrogatoire, lorsque l´un des accusés disait quelque chose qui concernait un
autre ou niait quelque chose qu´un autre avait affirmé, il arrivait qu´un autre
se lève spontanément ou était invité par le ministère public.
C´est de cette manière que se résolvaient les
contradictions et les malentendus, par un feu croisé des questions et réponses,
d´affirmations et d´infirmations. De longues répétitions conduites par les plus
grands acteurs n´auraient pas mis en scène
les participants dans un faux processus pouvant durer dix minutes dans
une telle lutte sans que cela soit
découvert ... Le fait que cette forme d´interrogatoire ait été utilisée, sans
qu´aucun de nombreux participants critiques eussent élevé sa voix pour dénoncer
un faux ton, était une démonstration très convaincante du caractère correct du procès ... J´ai une
très bonne impression du correspondant de Moscou écrivant pour un journal
conservateur du dimanche, (mieux que celle que j´ai des critiques assis plus
dans la salle du procès, M.S.) qui écrivait: ”Il est inutile de penser que le
procès est une mise en scène et que les accusations ont été fabriquées de
toutes pièces. La cause défendue par le gouvernement contre les accusés est
fondée. Un autre témoignage important sur la véracité des accusations est
l´absence totale de l´allusion habituelle, observée dans tous les pays du
monde, aux déclarations selon lesquelles les aveux ont été obtenus de manière
incorrecte, nommément la tentative des accusés de retirer tout ou partie de
leurs déclarations d´aveux.
Il me faut répéter une fois encore que si l´intelligence
et le courage étaient nécessaires pour revenir sur ses propres déclarations,
les accusés de ce procès avaient les deux à la fois. Si, pour que les accusés
se rendent compte que la chance, au moins pour la plupart d´entre eux d´éviter
la peine de mort, étaient minimale, aussi longtemps que leurs aveux ne pouvaient être retirés, si pour tout cela
l´expérience et le bon sens étaient exigés, alors, ils étaient pleinement
capables d´en faire usage. Et il peut être utile de mentionner ici combien de
chances ils avaient eu pour pouvoir dénoncer ces aveux. Ils auraient pu le
faire immédiatement après la lecture des accusations portées contre eux. S´ils
avaient laissé passer cet instant, chacun d´eux ayant été entendu pendant les
trois premiers jours, ils pouvaient librement retirer les aveux. Bien plus,
pendant l´interrogatoire, chacun des accusés avait, au moment où l´on
interrogeait l´autre, la possibilité de se lever n´importe quand et d´expliquer
à la cour ce qu´il voulait, de la contredire, de confirmer ou d´infirmer les
propos de l´autre. Même lorsque le procès fut terminé et avant que le ministère
public ne fit son réquisitoire, les accusés avaient été invités un à un, en
conformité à la procédure en la matière, à présenter leur propre défense.
Tout naturellement et avec toute la compréhension
possible, en tenant compte du fait que les accusés n´avaient pas, au vrai sens
du mot, cherché à se défendre et que la règle générale, en matière de
procédure, veut que ce soit toujours l´accusé qui a le dernier mot, ils ont
renoncé à dire quelque chose à cette occasion lorsque le procureur avait la
possibilité de répondre à leurs allégations. Ils avaient réservé ce qu´ils
avaient à dire jusqu´au moment où ils allaient avoir ”le dernier mot”. Et
lorsque le procureur fit finalement son réquisitoire au contenu très soutenu et
à la forme bien ordonné, ils eurent finalement chacun son dernier mot, pour
parler librement au tribunal. Ils jouirent tout naturellement de ce droit.
Certains furent brefs, d´autres s´adressèrent au tribunal comme cela était de
leur obligation, certains autres s´adressèrent sans se gêner et sans avoir été rappelés
à l´ordre, au public présent dans la salle. Les répliques rapides de la part du
ministère public et de la cour ne concernèrent même pas un dixième du temps que
les accusés avaient eu à leur disposition. Si ces hommes instruits,
expérimentés mais criminels, courageux, ne pouvaient pas saisir l´une de toutes
ces occasions pour déclarer (sauf dans le cas où Holzman, alors qu´il l´avait
admis pendant l´interrogatoire, expliqua, au début du procès, que lui tout
comme Smirnov niaient leur participation aux actes de terreur) qu´ils
souhaitaient retirer une ou partie de leurs aveux ou qu´ils avaient été traités
de manière incorrecte même lorsque le procureur -et ceci est très important-,
avec détermination, exigea la peine de mort pour eux tous ensemble et non pour
l´un ou l´autre d´entre eux. Ils n´ont même pas fait signe d´exprimer le
souhait de voir cette peine adoucie. Dans ces conditions, on ne peut pas
arriver à une autre conclusion que celle qu´ils avaient avoué parce qu´ils
étaient coupables et non parce qu´il y avait eu menace, procès ou quelque
troisième degré”.
L´ambassade
de Suède à Moscou
Il peut être intéressant de savoir ce que l´ambassade de
Suède à Moscou faisait comme rapport au Ministère suédois des affaires
étrangères sur la situation en Union Soviétique au moment du procès d´août
1936. Nous donnons ci-après deux extraits de longs rapports faits au ministère.
Imaginez que ces rapports avaient été écrits par des hommes de droite avec tout
ce que cela signifie en termes de préjugés contre l´Union Soviétique et le
socialisme. Le premier rapport concerne la situation politique dans le pays.
”Déposé au Ministère Royal des Affaires Étrangères de la
part de l´Ambassade Royale de sa Majesté
Moscou, le 24 septembre 1936
Eric Gyllenstierna (ambassadeur)
Confidentiel.
Concerne: Enquête au sein du Parti Communiste
(11 pages, à la fin de la page 10, ma remarque, M.S.)
Il faut peut-être enfin observer -bien que cela soit
éventuellement un acte inutile- que les
récits captivants mais invraisemblables, qui sont sans préjugés propagés dans
la presse internationale à propos du procès du mois d´août et cela dans
l´intention de faire accroire à un public naïf que toute l´Union Soviétique
était entrain d´exploser, que ceux-ci et d´autres publications excessives
semblables n´ont rien de vrai, si dans certains cas, on cherche donc à se faire
une idée sur les descriptions de guerre de la presse étrangère et certains
faits en Union Soviétique”[37].
La persécution des capitalistes contre l´Union Soviétique
pendant les jours du procès prit des proportions telles que l´ambassade de
Suède à Moscou se sentit obligé de démentir ceci auprès du ministère des
affaires étrangères pour éviter de graves erreurs de jugement sur l´Union
Soviétique.
Le prochain extrait concerne le déroulement du procès
même et la situation des accusés. Bien qu´ayant été fâché qu´il y ait un procès
contre des hommes si gentils, l´ambassadeur Gyllenstierna était toutefois
obligé de constater qu´il y avait effectivement eu actes de terrorisme.
”Moscou, le 25 septembre 1936
Légation de Suède
Le plus grand procès de complot
Confidentiel
(8 pages, à la 3è page, ma remarque, M.S.)
”Par ceci, on ne voudrait naturellement pas dire que les
accusés (Zinoviev et Kamenev, c´est moi qui souligne, M.S.) pouvaient être
disculpés de toute suspicion de participation à certains plans plus ou moins
bien élaborés de détrôner les dirigeants actuels, lesquels sont haïs et dont le
personnage principal est Staline, tout ceci dans le but de prendre le pouvoir.
Que des plans pareils fassent aussi forcément partie d´une certaine
conspiration, qu´au moins la saisie des moyens terroristes dans les cercles
internes des mécontents soit discutable, parait aussi très vraisemblable.
Eric Gyllenstierna (ambassadeur)”[38]
Le
Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste
23-30
janvier 1937
(L´affaire
Piatakov-Radek)
Un parti fort, contrôlé fermement, par les membres de
base ne plaisait pas à tous. Pour l´opposition politique qui s´était alliée au
groupe de Trotski à l´étranger, un véritable parti des travailleurs était une
menace contre leur existence. Le complot contre la direction du parti avait
continué secrètement depuis leur échec politique au vote du parti de 1927. Mais
après la mort de Kirov, la population était sur ses gardes, ce qui ne permit
pas aux comploteurs d´accomplir leurs objectifs.
Les succès réalisés dans le domaine économique du pays
ainsi que les résultats du plan quinquennal et de la collectivisation de
l´agriculture avaient au même moment cassé l´unité des comploteurs. Une partie
d´entre eux qui avaient pendant des années travaillé secrètement pour faire
écrouler le gouvernement soviétique et le modèle socialiste du développement
refusaient de se laisser influencer par les résultats de la production lesquels
confirmait le bien-fondé de la politique du Comité Central du parti. Car il ne
s´agissait plus seulement de théories, l´on pouvait maintenant effectivement
voir les résultats dans la vie pratique. La division au sein du groupe des
conspirateurs permit aux services de sécurité d´avoir plus de renseignements
sur ses activités. Des conspirateurs déçus donnèrent des renseignements dont
les conséquences étaient difficiles à mesurer.
Ils
avouèrent leurs crimes
En raison de l´annonce que 17 fonctionnaires haut placés
de État soviétique étaient accusés, devant la section militaire de
L´interrogatoire de Piatakov, le leader le plus important
du groupe, est intéressant à connaître. Piatakov était plein de regrets, se
sentait trompé par Trotski et il comprenait que son crime était d´une nature et
d´une gravité telles que rien ne pouvait le sauver de la peine de mort.
Piatakov donna au tribunal des informations détaillées sur la conspiration
terroriste qu´il organisait de concert avec Smirnov, Radek, et Sérébriakov.
Piatakov était un vieux trotskiste qui avait abandonné le groupe de Trotski en
1928. Piatakov était en 1931, un haut fonctionnaire de État, membre du Conseil
national de l´économie nationale et président du comité directeur de
l´industrie chimique. Environs un an plus tard, Piatakov allait devenir le vice
commissaire du peuple pour la grande industrie. Piatakov décidait sur nombreux
de grands projets industriels au cours du premier, et, en partie, au cours du
deuxième plan quinquennal. Ses possibilités de saboter la construction socialiste
étaient très grandes et comme nous allons le voir, il en utilisa certaines.
L´ensemble des citations qui vont suivre sont extraites du procès-verbal du
Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste. (23 – 30 janvier 1937), lequel fut
traduit en français et publié par le Commissariat du Peuple de Justice de
L’U.R.S.S.
Piatakov
de retour au trotskisme
Piatakov raconta à la cour qu´il avait été réadmis à
l´organisation trotskiste par Smirnov qu´il connaissait bien depuis les
activités trotskistes des années 20. Ceci avait eu lieu au cours d´un voyage
qu´il effectua à Berlin au printemps/été 1931, voyage au cours duquel il resta
quelques mois en Allemagne. La mission de Piatakov cette fois-là était
d´acheter des machines lourdes et des ascenseurs pour le compte de l´industrie
de charbon soviétique. Ivan Smirnov faisait aussi partie de cette délégation.
Lorsqu´il était dans l´armée soviétique, il tenait une position dans la
direction de la garde de Trotski. D´autres anciens trotskistes comme Loginov,
Moskalov et Chestov faisaient aussi partie de cette délégation. La politique du
gouvernement soviétique de donner une chance à ceux qui avaient été dans
l´opposition contre la construction socialiste lors des durs combats contre
l´opposition vers la fin des années 20, ne fut pas une politique si réussie.
Tous ces trotskistes et d´autres qui appartenaient à la droite ainsi que la soi
disant gauche dans le parti, purent donc garder ou retrouver leurs anciens
hauts postes, ce qui, au cours des années 1930, causa des grands dégâts à
l´Union Soviétique.
Smirnov profitait de ses voyages de service à Berlin pour
entretenir ses contacts avec Trotski à travers son fils Leo Sédov qui dirigeait
l´organisation trotskiste en Union Soviétique à partir de cette même ville. Ce
détail fut raconté par Smirnov à Piatakov lequel en fit à son tour part au
tribunal. Smirnov lui avait aussi raconté que Trotski avait annoncé que la
lutte contre le gouvernement soviétique et la direction du parti allait
maintenant reprendre avec force, mais que les circonstances étaient telles
qu´il fallait éviter la lutte politique. Selon Piatakov, Smirnov avait expliqué
q’il ”fallait renoncer aux méthodes de lutte de masse ; que la méthode
essentielle de lutte à employer était celle du terrorisme et, comme il s’était exprimé alors, la méthode de
l’opposition aux mesures du pouvoir soviétique”[39].
L´opposition devrait, selon Trotski, quitter la lutte politique pour la
terreur, le sabotage et les attentats contre le gouvernement soviétique et les
personnalités importantes du Comité Central. Smirnov avait informé Piatakov que
Sédov voulait bien le rencontrer. Piatakov accepta et la réunion eut lieu
quelques jours plus tard. Sédov confirma à Piatakov la nouvelle ligne politique
de Trotski pour la prise du pouvoir par la terreur, le sabotage et les
attentats, et le travail d´organisation en cours en Union Soviétique. Ils
étaient donc entrain de mettre en place une grande organisation devant couvrir
l´ensemble du pays, une organisation où les partisans de Zinoviev faisaient
parti, et à laquelle la droite, avec des gens comme Boukharine, Rykov et Tomski
étaient invités. Pour Sédov, Trotski considérait que ”la lutte dans le cadre
d’un seul État était un non-sens” et que ”Dans cette lutte, nous aurions aussi
à résoudre nécessairement la question internationale, ou plutôt les question
entre États”[40].
Sédov
recommande de voler
Vers la fin de cette réunion, Sédov affirma que Trotski
avait demandé de savoir si Piatakov était disposé à participer à leur lutte.
Piatakov accepta cette proposition. Lorsqu´au cours du procès le procureur
Vychinski demanda à Piatakov:
”Vychinski – Comment expliquer que vous ayez si vite
consenti à reprendre cette lutte contre le Parti et le gouvernement
soviétique ?
Piatakov – Mon entretien avec Sédov n’en fut pas la
cause ; il fit que me donner l’impulsion.
Vychinski – Par conséquent, avant aussi, vous vous en
teniez à votre vieille position trotskiste ?
Piatakov – Il est certain que je gardais les vieilles
survivances trotskistes, qui, plus tard, se sont de plus en plus accrues”[41].
C´est ainsi que Piatakov avait à nouveau rétabli ses
contacts avec Trotski. Avant que Piatakov ne quitta Berlin, Sédov voulait à
tout prix le rencontrer une fois de plus. De cette réunion Piatakov raconta à
la cour que Sédov l´avait informa ouvertement qu”´il faut de l’argent. Vous
pouvez nous fournir les fonds nécessaires pour mener la lutte ”.
Piatakov raconta davantage sur la proposition de Sédov:
”il donnait à entendre que, étant donné ma position de service, je pouvais
soustraire quelque argent de État, c’est-à-dire tout simplement voler. Sédov
dit qu’on n’exigeait de moi qu’une seule chose : que je passe le plus de
commandes possible aux deux maisons allemandes « Borsig » et
« Demag », et que lui, Sédov, s’entendrait sur le moyen d’en obtenir
les sommes nécessaires à la condition, naturellement, que je n’insisterais pas
trop sur les prix. S’il faut déchiffrer la chose, il était clair que les
majorations de prix qui seraient faites sur les commandes soviétiques
passeraient en entier ou en partie aux mains de Trotski pour ses finns
contre-révolutionnaires”[42].
Par la suite, Piatakov chercha à exécuter ce Sédov lui avait demandé,
Littlepage
parle de Piatakov
Il peut être intéressant de rappeler que l´une de ces commandes
faites au printemps 1931 et qui devrait procurer de l´argent à Trotski ne fut
jamais exécutée. Cette affaire a été exposée par l´auteur dans ”Les mensonges sur l’histoire de l’Union
Soviétique – D’Hitler à Hearst, de Conquest à Soljenitsyne”. L´ingénieur
américain Jonh Littlepage, un expert en industries minières qui travaillait
sous contrat en Union Soviétique, parle de cette affaire dans son livre, In Search of the Soviet Gold. Littlepage
était là comme représentant de la direction des industries des mines d´or dans
la grande délégation que dirigeait Piatakov à Berlin au printemps 1932.
Littlepage refusa de valider une grande commande d´ascenseurs industriels de
mauvaise qualité que Piatakov avait faite, ce qui fit annuler la transaction.
Le récit de Littlepage sur le sabotage dans les mines de cuivre et plomb et sur ses suspicions contre la haute
direction du trust du cuivre et plomb dans lequel Piatakov était le plus haut
placé, n´était pas connu en 1937 lorsque le procès contre ce dernier eut lieu.
Publié à Londres en 1939, le livre de Littlepage est une compilation des
preuves contre l´opposition politique en matière d´espionnage industriel en
Union soviétique.
Littlepage écrit: ”il n´était naturellement pas de mon
droit de mettre en garde mon employeur communiste contre leurs propres membres
du parti, certains russes peuvent cependant témoigner du fait que je leur avais
fait part de ces suspicions depuis 1932 après avoir travaillé deux mois dans
une mine de cuivre en Oural”[43]. Les mines étaient une section du grand trust de cuivre et
de plomb où le responsable le plus élevé était Piatakov, vice commissaire du
peuple pour l´industrie lourde. La situation était catastrophique dans les
mines aussi bien en ce qui concernait la production qu´en ce qui concernait la
santé des travailleurs. La conclusion de Littlepage était que le sabotage était
organisé par la plus haute direction du trust du cuivre et de plomb.
Piatakov
organise le Centre trotskiste et le sabotage
En Union Soviétique Piatakov travaillait à l´organisation
d´un nouveau centre de contre-révolution lequel devrait fonctionner comme une
organisation de réserve au cas où celle de Zinoviev-Kamenev tombait entre les mains de la police. Cette organisation devint, avec la
bénédiction de Trotski, plus tard une vraie organisation trotskiste appelée un
centre parallèle, une alternative à celle de Zinoviev et aux activités de
l´ancienne gauche du parti. Le centre parallèle étendit ses activités jusqu´en
Oural, en Sibérie de l´ouest et en Ukraine, aux villes comme Kharkov,
Dniepropetrvsk, Odessa, Kiev, etc. Kamenev utilisait sa position et l´influence
qu´elle lui procurait pour envoyer saboteurs et meurtriers partout en Union
Soviétique. Ils eurent des postes de chef dans les constructions et les
fabriques dans les plus importants projets industriels. (Chestov: chef de
Chakhtstroï dans le bassin de Kouznetsk, Livchitz: chef des chemins de fer en
Ukraine, Kartsev: ingénieur en chef dans le trust de Kémérovo, Drobnis: chef
adjoint dans les constructions de Kémérovo, Kolégaïev: chef de l´Ouralsredmed -
usine de cuivre de l´Oural central, Julin: chef de Sredouralmedstroï
-construction de l´usine de cuivre de l´Oural central, Rataïtchak: chef de
Glavkhimprom -comité de direction des industries chimiques, Mariassine: chef
des chantiers de l’Usine de Construction de Wagons de l´Oural etc.). Piatakov
décrivit en détail les activités de l´organisation trotskiste devant la cour.
Donnons un exemple.
Piatakov
parle de sabotage en Ukraine, en Sibérie de l´Ouest et en Oural
Piatakov: ” J’ai déjà dit que le sabotage avait été
déployé en Ukraine, surtout dans le domaine de l’industrie chimique du coke. Il
consistait en ceci : les fours à coke en construction étaient mis en
exploitation sans être achevés, ce qui avait pour résultat qu’ils se
démolissaient vite ; à noter surtout que dans ces usines les services
chimiques ne se construisaient presque pas du tout ou leur construction était
retardée ; de ce fait, les fonds immenses investis dans l’industrie
chimique du coke se dépréciaient de moitié, sinon des deux tiers. La partie la
plus précieuse du charbon, sa partie chimique, n’était pas utilisée, se
volatilisait. D’autre part, les nouvelles batteries à coke étaient mises hors
d’usage. Le groupe trotskiste de Sibérie occidentale faisait un travail de
sabotage actif dans l’industrie houillère. Ce travail était réalisé par Chestov
et son groupe. Il y avait là un groupe assez nombreux qui s’efforçait, surtout,
de provoquer des incendies dans les mines de charbons cokéfiables. Le travail
de sabotage s’effectuait au combinat chimique de Kémérovo. Au début, il
consistait à retarder la mise en exploitation des entreprises en
construction ; les fonds en étaient éparpillés entre des constructions
secondaires, et c’est ainsi que d’immenses ouvrages se trouvaient tout le temps
en construction et n’étaient pas prêts pour être mis en exploitation. En ce qui
touche les centrales électriques, il consistait à diminuer l’actif de la
balance énergétique de tout le bassin de Kouznetsk”.
”Dans l’Oural, il y avait deux entreprises fondamentales
su lesquelles se concentraient tous les actes de sabotage. La première, c’était
cette de l’industrie du cuivre, et la seconde, l’usine de construction de
wagons de l’Oural. Dans l’industrie du cuivre, il s’agissait, avant tout, de
réduire les possibilités de production des usines de cuivre en activité.
L’usine de cuivre de Krasnoouralsk dilapidation du cuivre qui entrait à
l’usine ; on enregistrait des pertes et les usines de cuivre de Karabakh
ne remplissaient pas leur programme de production ; il s’y faisant une
immense considérables. L’usine de Karabakh était constamment dans la fièvre. A
l’usine de Kalatinsk, la fabrique d’enrichissement marchait tout le temps de façon
défectueuse ; il y avait aussi des actes de sabotage. Dans l’ensemble, ce
travail était fait par Kolégaïev, administrateur de l’Ouralsredmed”[44].
Découragement
et indécision s´emparent des trotskistes
Piatakov poursuit sa description du sabotage pendant le
procès et démontre qu´en général, c´étaient les chefs qu´il avaient installés à
la tête des usines qui organisaient le travail de destruction. Dans l´industrie
de la défense, Piatakov avait confié à Norkine la mission ”qu’il fallait
préparer, pour le moment de la guerre, la mise hors d’usage des entreprises de
la défense, par des incendies et des explosions”[45].
Piatakov et Radek devirent petit à petit réticents. La raison de cette attitude
fut que Trotski, estimait, dans l´une de ses directives, que le centre
trotskiste parallèle ”ne faisions que bavarder ” et il exigeait que ”que
des actes déterminés de terrorisme et de sabotage fussent accomplis”. Selon la lettre de Trotski, ceci ”n’était pas
quelque chose d’accidentel ou simplement une des méthodes de lutte aiguë qu’il
proposait, mais qu’elle était une partie constitutive, essentielle de sa
politique et de sa position présentes”.[46]
Et Piatakov de poursuivre: ” Dans cette même directive -
on était au milieu de 1934 – il posait la question que maintenant, avec
l’arrivée de Hitler au pouvoir, il était parfaitement évident que sa thèse à
lui, Trotski, sur l’impossibilité d’édifier le socialisme dans un seul pays,
s’était parfaitement vérifiée ; qu’un conflit militaire était inévitable
et que si nous, trotskistes, désirons nous conserver en tant que force
politique quelconque, nous devions d’avance, après avoir pris une position
défaitiste, non observer et contempler passivement, mais encore préparer
activement cette défaite. Pour cela, il fallait former des cadres ; or,
les cadres ne se forment pas rien qu’avec des paroles. Aussi fallait-il
réaliser un travail de sabotage approprié. Je me rappelle que dans cette
directive Trotski disait que, sans l’appui indispensable des États étrangers,
le gouvernement du bloc ne pourrait ni accéder ni se maintenir au pouvoir
(bloc: l´ensemble de l´opposition, avec les trotskistes en tête, c´est moi qui
souligne, M.S.). C’est pourquoi il était nécessaire de réaliser un accord
préalable avec les États étrangers les plus agressifs, tels que l’Allemagne et
le Japon, et que lui, Trotski, avait entrepris des démarches en vue d’un
contact tant avec le gouvernement japonais qu’avec le gouvernement allemand”[47].
La
directive de Trotski de travailler pour l´échec en cas de guerre
La directive de Trotski offrait une autre alternative à
la stratégie de prise de pouvoir par son organisation. Ce n´était plus
seulement par meurtre des personnalités importantes du gouvernement et du
Comité central du parti ainsi que par sabotage avec instabilité politique comme
résultat. C´était maintenant quelque chose de nouveau: Travailler pour la
défaite de l´Union Soviétique dans la guerre à venir et prendre le pouvoir État
avec l´aide de l´Allemagne nazie et les fascistes japonais! Selon Trotski, il était
nécessaire de ”se retirer dans le capitalisme” et ”il s’agissait, par
conséquent, d’obtenir, par en accord correspondant avec les gouvernements de
ces pays, une attitude favorable à l’accession du bloc au pouvoir et, par
suite, grâce à une série de concessions faites à ces pays, à des conditions
fixées d’avance, de s’assurer leur soutien pour se maintenir au pouvoir”[48].
À la question du procureur Vychinski à Piatakov sur son
homme de confiance Radek, celui répondit
que la directive de Trotski concernant la prise du pouvoir par le bloc
trotskiste après l´échec de l´Union Soviétique dans la guerre contre
l´Allemagne nazie, était ”c’était le retour au capitalisme, la restauration du
capitalisme. La chose était voilée. La première variant renforçait les éléments
capitalistes ; il s’agissait de la transmission, à titre de concessions,
d’entreprises économiques importantes et aux Allemands et Japonais ;
d’engagements de fournir à l’Allemagne des matières premières, des produits
alimentaires, des graisses, à des prix inférieur aux prix mondiaux. ”[49].
Les conséquences internes de cette politique étaient manifestes. ”Autour des
concessionnaires allemands et japonais se concentreraient les intérêts du
capital privé en Russie”. Selon Radek, Trotski pensait que ”la transmission aux
Allemands, au cas où ils l’exigeraient, des usines qui seraient d’une valeur
spéciale pour leur économie”. Radek
déclara en plus que Trotski expliquait dans ses lettres, ”Que, probablement,
des concessions territoriales seraient nécessaires… il s’agissait de
satisfaire l’expansion allemande en Ukraine. Pour ce qui est du Japon, Trotski
parlait de céder la région du fleuve Amour et la Province Maritíme”[50] (de l´océan pacifique, MS).
Trotski
confirme sa collaboration avec le nazisme
Piatakov et Radek furent effrayés par la directive de
Trotski et demandèrent de conférer personnellement avec lui. L´occasion s´offre
en décembre 1935 lorsque Piatakov se rendit à Berlin en mission de service. Les
trotskistes allemands, agissant de manière toute secrète, procurèrent un
passeport allemand à Piatakov et c´est avec ce document reçu des mains de
Sédov, que Piatakov se rendit à Oslo où habitait Trotski. L´entretien dura deux
heures et Trotski confirma les directives de sa lettre. Trotski était déçu du
travail du centre parallèle et le trouvait de très mauvaise qualité. En bref,
Trotski exigea davantage de sabotage et de destruction contre les constructions
et les fabriques et souhaita qu´on devait procéder à l´exécution d´une série
d´attentats meurtriers contre les personnalités importantes en Union Soviétique
dont avant tout Staline. Concernant les concessions à faire aux Allemands,
Trotski déclara ”qu’il menait d’assez longs pourparlers avec le vice-président
du parti national-socialiste allemand, Hess”[51] et qu´un accord avait été conclu.
Trotski alla plus encore. Il exigea de Piatakov que le
centre parallèle puisse ”c’est de former des cadres pour une guerre éventuelle,
c’est-à-dire préparer des agents de diversion et de destruction, des auxiliaires
pour l’offensive fasciste contre l’Union soviétique”[52].
Piatakov raconta au procès qu´un nouvel élément était
intervenu dans son entretien avec Trotski.
” Piatakov – Ce qu’il y avait de nouveau, si vous voulez,
a été formulé d’une manière assez nette : l’organisation trotskiste se
transformait au fond en appendice du fascisme. Ce n’est qu’alors que cela
devint clair pour moi”[53].
L’entretien avec Trotski ”provoqué chez Radek et chez moi
une impression fort désagréable et nous nous sommes tracé une ligne de
conduite. Nous n’avons pas renoncé et nous continuions à faire ce que nous
faisions” et Piatakov comprit ”se trouver dans une impasse”[54].
Le centre trotskiste parallèle continua à exécuter les exigences de Trotski,
mais il s´agissait maintenant d´agir rapidement en faisant des attentats pour
tuer les leaders membres du Comité Central -Staline, Molotov, Kaganovitch,
Vorochilov, Ordzjonikidze et d´autres. Piatakov raconta tout ceci au cours de
procès, devant la presse internationale et le corps diplomatique. Les activités
du centre parallèle continuèrent jusqu´au début de 1936 lorsqu´il fut découvert
et que ses membres furent arrêtés.
Les
activités des trotskistes en Allemagne nazie et aux États-Unis
Les informations sur la collaboration de Trotski avec le
parti nazi et
Le jugement contre les membres du centre trotskiste tomba
le 30 janvier 1937 à 3 h 00 du matin. Treize des accusés - Piatakov,
Sérébriakov, Mouralov, Drobnis, Livchitz, Bogouslavski, Kniazev, Rataïtchak,
Norkine, Chestov, Tourok, Pouchine et Hrasche furent condamnés à la plus haute
peine – la peine de mort. Trois des accusés – Radek, Sokolnikov et Arnold –
furent condamnés à 10 ans de prison. Stroïlov fut condamné à 8 ans de prison.
Les condamnés aux peines de prison se virent confisquer les droits politiques
pendant 5 ans. Les biens personnels des condamnés furent confisqués[55].
L´ambassadeur
des États-Unis Joseph Davies parle de l´affaire Piatakov-Radak
Un témoin du procès qui en a laissé un grand rapport et
des écrits sur d´autres sujets relatifs à la situation en Union Soviétique de
1936-1938 est Joseph E. Davies, l´ambassadeur des États-Unis à Moscou à
l´époque des faits. Davies a écrit un livre que l´auteur du présent article
recommande avec insistance. Publié en 1941, le livre ”Comme ambassadeur des
États-Unis à Moscou” rassemble toutes ”les dépêches confidentielles, la correspondance officielle
et personnelle ainsi que les journaux intimes et les notes”[56] que Davies prenait lors de ses contacts avec
le président des Étas-Unis, Roosevelt, le ministre des affaires étrangères et
sa famille aux États-Unis. L´ambassadeur écrivit aussi une petite brochure -Our Debt to Our Soviet Ally- à l´issue
du premier anniversaire de la deuxième guerre mondiale en 1942. La brochure
aborde les questions relatives à l´Union Soviétique et la deuxième guerre
mondiale, elle soutient l´ouverture par les États-Unis d´un autre front de
guerre en Europe contre l´Allemagne nazie.
Joseph Davies n´était pas un diplomate de carrière.
C´était un avocat, un capitaliste et un homme d´affaires. C´était un élément de
l´établissement capitaliste américain, un ami personnel du président Franklin
Roosevelt. Davies était un admirateur de la démocratie américaine, et un
antisocialiste engagé. Dans son discours d´adieu au personnel de l´ambassade, à
la fin de sa mission à Moscou, il déclara entre autres que ”la valeur humaine,
le caractère sacré de la vie et celle de la liberté et le respect de soi sont
les grands avantages de la civilisation. Ces valeurs sont plus répandues aux
États-Unis que nulle part ailleurs dans le monde. Je ne me soucie nullement de la condition
matérielle des enfants et des vieillards dans les régimes totalitaires et
dictatoriaux. Si la liberté et les droits de l´homme doivent être sacrifiés, le
prix à payer est donc très élevé”[57].
Ce qui rend Davies intéressant, c´est que pendant son séjour en Union
soviétique, il s´est efforcé de connaître le pays et la gestion socialiste. Il
avait sollicité, de la part du gouvernement soviétique, de voyager dans le
pays, il y avait été autorisé, avec tout le soutien nécessaire. L´ambassadeur
voyage donc partout dans le pays, visita plusieurs villes, des fabriques, des
coopératives agricoles, des écoles, des hôpitaux etc. Il décrivit tout ce qu´il
vit de manière objective et en fit rapport au département État américain.
La
lettre de Davies au secrétaire État américain
En ce qui concerne le procès contre le groupe
Piatakov-Radek, Davies écrivit une lettre ”hautement confidentielle” au
secrétaire État américain le 17 février 1937:
”J´ai suivi avec beaucoup d´intérêt, avec l´aide d´un
interprète, le déroulement du procès. Je reconnais volontiers qu´au départ,
j´étais sceptique sur la crédibilité des aveux des accusés. Leur long procès,
la durée de leur incarcération et les pressions et la violence éventuelles
contre eux et leurs familles avaient soulevé des doutes rigides dans mon esprit
sur la crédibilité de leurs déclarations. Après une appréciation objective de
la situation et grâce à mon expérience des procès et de leur crédibilité, je
suis donc parvenu, à contre coeur, à la conclusion que le procureur avait
défendu son point de vue, tout au moins, jusqu´à démontrer l´existence d´une
large conspiration, au sein des cercles politiques les plus élevés, contre le
gouvernement soviétique; ce qui, avec l´application des lois existantes
implique les infractions telles que l´accusation les a présentées”[58].
Conquest
et le procès de trahison
Il peut y avoir un certain intérêt à connaître
l´interprétation que se fait la bourgeoisie du procès de trahison de février
1937. La référence principale de la bourgeoisie est comme d´habitude le livre, The Great Terror, de l´agent des
renseignements Robert Conquest. Tous les autres soi-disant écrivains qui
abordent ce sujet aussi bien en Suède qu´à l´étranger, sont seulement les
disciples de Conquest. Il est impossible de citer ici, tous les mensonges de
Conquest sur le procès. Contentons-nous de sa description du procès contre
Piatakov.
Conquest écrit: ”Le fait que Piatakov fut sacrifié est
peut-être l´indication la plus claire sur les motifs de Staline. Il avait
sûrement été un opposant et un homme important. Ayant abandonné l´opposition en
1928, il s´était comporté de manière irréprochable et loyale ... Qu´y avait-il
donc à lui reprocher? Il avait été l´un des critiques acharnés de Staline dans
les années 1920. Il avait laissé dire qu´il considérait l´arrivée de Staline au
pouvoir comme un malheur. Quels que soient ses ambitions, il était avant tout
un leader potentiel”[59]. Nous avons déjà lu ce que ”la loyauté
irréprochable de Piatakov” veut dire dans le procès-verbal du procès. Mais
l´affirmation par Conquest que Piatakov
aurait ”toujours” été ”un leader potentiel” n´a rien à voir avec la
réalité. A cette époque, l´opposition avait été depuis longtemps politiquement
vaincue et n´avait plus d´influence politique en Union soviétique.
L´ambassadeur de Suède à Moscou par exemple, s´est
exprimé dans ce sens lorsqu´il écrivit au ministère suédois des affaires
étrangères le 28 juin 1937 pour faire le rapport du procès Piatakov-Radek.
Gyllenstierna affirme qu´”il n´existe pas une opposition politique pouvant
constituer un danger pour le pouvoir”[60].
Selon Conquest, ce procès pour trahison aura été une
manière pour Staline de se débarrasser davantage d´hommes politiques rivaux dans
le but de rester seul au pouvoir! Pour tout celui qui connait les déclarations
faites par Piatakov au tribunal, les écrits de Conquest sont des affirmations
ridicules. Même le livre de Littlepage paru en 1939, réduit à néant les
mensonges de Conquest et révèle Piatakov comme un voleur et un saboteur. Mais
ce sont les mensonges de Conquest que l´on propage dans les médias pour
influencer les gens moins informés, ce sont ce genre de mythes que la
bourgeoisie sert à la population. Dans les cercles de la classe bourgeoise, les
choses étaient cependant présentées autrement. Jetons un coup d´oeil sur un
autre document confidentiel envoyé par l´ambassadeur Gullenstierna au ministère
des affaires étrangères à Stockholm.
L´ambassadeur
Gyllenstierna parle du procès Piatakov
”Légation de Suède
Points de vue sur les aveux dans le récent procès Trotski
(6 pages)
Moscou, le 3 février 1937
Confidentiel”
(Page 3:)
”On était frappé par le fait que les accusés, à quelques
exceptions près, malgré une longue incarcération et la torture mentale
difficile -et sûrement physique chez la plupart d´entre eux- qu´ils ont subies
n´apparaissent pas particulièrement écrasés et déprimés. Ils étaient plutôt
pleins de vivacité, l´un ou l´autre d´entre eux ayant même un petit sourire aux
lèvres”.
(Page 4)
”Il est difficile de trouver une explication
psychologique satisfaisante au comportement des accusés et à leur stratégie
vis-à-vis du ministère public. Il est facile de se tromper dans
l´interprétation de ce genre de choses, comme l´a montré l´expérience. Comme
d´habitude, on va jusqu´à formuler l´hypothèse que les accusés ont subi une
certaine forme d´influence médicale, qu´ils ont été drogués ou hypnotisés -une
hypothèse qui, par manque de preuves, ne doit pas être prise en compte.
La principale explication habituellement avancée est que
l´espoir de sauver sa propre vie, ou en tout cas, celle d´un membre de famille
le plus proche, était déterminante dans leur attitude si étonnamment
irresponsable vis-à-vis du procureur, et que l´envie si grotesque de passer aux
aveux soit pour ainsi dire à assimiler à un véritable instinct de survie. Pour
ma part, je doute que cette explication soit la bonne. L´expérience de
l´affaire Zinoviev et d´autres affaires similaires devrait avoir enseigné que
même les accusations personnelles les plus frénétiques et les accusations
contre les coaccusés ne peuvent même pas suffi à amener le tribunal à adoucir
les mesures de condamnation.
Pour le reste, il n´a pas non plus semblé que le grand
nombre des accusés au moment des aveux était guidé par une sorte d´envie
exagérée de plaire au tribunal et aux tenants du pouvoir. Au reste, leur comportement individuel contredît, comme j´ai cherché à le
dire, cette affirmation... On ne le dira pas assez, ça ne sert à rien de
fournir tant d´efforts pour comprendre le mystère de ces aveux. C´en est ainsi
et ça devrait aussi demeurer un mystère psychologique.
Eric Gyllenstierna”[61].
Gyllenstierna
(1937) et Arch Getty (1999)
Selon l´ambassadeur Gyllenstierna, les accusés du procès
Piatakov étaient ”pleins de vivacité, l´un ou l´autre d´entre eux avait même un
petit sourire sur les lèvres” lorsqu´ils étaient entendus et avaient reconnu
leurs crimes. Les accusés pouvaient en plus parler librement et ils reconnurent leurs crimes, ce qui, pour
l´ambassadeur Gyllenstierna, était ”un mystère psychologique”. Gyllenstierna
refuse de comprendre que les accusés étaient réellement coupables et qu´ils
n´avaient rien à opposer aux preuves irréfutables exposées par le ministère
public. Gyllenstierna n´était cependant pas le seul. Toute la classe bourgeoise
dans son ensemble et tous ses écrivains à l´exception près, hier comme
aujourd´hui, était complètement étonnés des aveux des accusés. Chaque fois que
cette affaire était d´actualité, à l´occasion d´une nouvelle recherche ou de la
publication d´un livre, il y a eu de nouvelles théories tendant à nier le fait que les accusés
étaient effectivement coupables des crimes pour lesquels ils étaient amenés
devant le tribunal. La dernière de la série de ces théories totalement
incomparables et sans une autre explication que celle basée sur les fantaisies
des auteurs est à lire dans le dernier livre de Arch Getty, The Road to Terror, Staline and the Self-Destruction of the Bolsheviks, 1932-1939[62].
Le professeur Getty qui a été l´un de quelques chercheurs bourgeois sérieux
dans leurs recherches sur l´histoire de l´Union Soviétique, a dans cette
question des aveux des accusés des procès politiques, complètement tapé à côté.
Le professeur Getty n´accepte pas le simple fait que les
accusés étaient coupables. Ce genre d´affirmations n’est pas accepté dans les
milieux fréquentés par Getty, milieux dans lesquels une ligne de pensée hostile
et pleine des préjugés à l´égard de l´Union Soviétique et des louanges sur
Trotski occupent une position dominante. Getty a, de cette manière, construit
sa propre théorie pour expliquer les aveux des accusés. Ce qu´il appelle ”confession rituel”[63].
Pour Getty, ces aveux faisaient partie d´un rituel qui constituait le fondement
de toutes les pratiques qui, sous Lénine, prévalaient au sein du parti
bolchevique. Le rituel consistait dans le fait que les membres devaient se
subordonner au parti ou à sa nomenclature et reconnaître les infractions lorsque
cela était exigé d´eux, même quand ils n´étaient pas coupables. Selon Getty,
des gens non coupables étaient obligés de mentir et se sont laissés déshonorer
devant leurs camarades, tout le peuple travailleur de l´Union Soviétique et le
monde entier et pour l´avenir, et jugés en plus à la peine de mort et fusillés
seulement pour montrer du respect à la nomenclature et pour l´unité du parti!
Et tous ceux qui ne voulaient pas du rituel des aveux de Getty et refusaient de
se reconnaître coupables des infractions qu´ils n´avaient pas commises étaient
de toutes façons condamnés à mort. Pour le moins qu´on puisse dire, cette façon
de voir les choses n´est pas naturelle, pour ne pas dire qu´elle est ridicule.
L´on comprendrait qu´un homme confus pourrais pensé de cette façon, mais que,
bien que non coupables, toutes les accusés aient accepté de se déclarer
coupables, ne peut être accepté que par un scrutateur désordonné et confus.
Dans ces conditions, on ne recherche pas la vérité, on veut tout simplement
faire accepter sa propre théorie.
Les
intrigues et les folies de Getty
Il faut aussi constater que la plupart des accusés dans
le procès de Moscou étaient d´anciens hauts fonctionnaires du Parti Communiste,
des gens de la soi-disant tête du parti, la nomenklatura. Pourquoi donc une
partie de la nomenklatura s´attaque-t-elle à une partie de cette même structure
s´il n´y n’avait pas des crimes et des coupables? Malgré des centaines de page
fatigantes du document et des théories compliquées où l´histoire est
transformée en un récit désordonné truffé d´intrigues et des folies de toutes
sortes, Getty n´arrive pas, dans The Road to Terror, à donner une réponse
à cette question. Tout ce qui finalement se dégage est, comme d´habitude, que
tout était l´oeuvre de Staline, qui se tenait derrière avec son désir effréné
du pouvoir et agissait dans le sens lui permettant de préserver le contrôle du
système politique. Et Getty va si loin dans son livre qu´il s´autorise à
déclarer qu´”aucune révolution des travailleurs n´a jamais exister” en Union
Soviétique, que ”la nomenclature a survécu au socialisme et qu´elle a
effectivement hérité le pays” et qu´elle
est devenue ”non seulement la ”nouvelle” élite dirigeante de 1990 mais aussi la
propriétaire des richesses et propriété du pays”[64].
Peut-on parler de l´histoire dans ces conditions? Essayer
de nous faire croire que tout était si simple, que la nomenclature qui existait
il y a 60 ans est la même qui en
Les
purges du parti de 1937 et la lutte contre la bureaucratie
En 1937 il se posa deux problèmes sérieux de la solution desquels
dépendait l´avenir de la construction du socialisme en Union Soviétique. L´un
de ces problèmes était la conséquence des procès Zinoviev-Kamenev et
Piatakov-Radek. Il était maintenant démontré que la vieille opposition n´avait
pas déposé les armes. L´autocritique de jadis ayant été juste un jeu pour
amuser la gallerie, une façon de se procurer des positions de direction dans la
société. Leurs activités secrètes avaient continué de manière ininterrompue
depuis les 1930 et personne ne savait vraiment combien ils étaient. Le second
problème était la lutte contre la bureaucratie, la corruption et l´opportunisme
dans le parti. Il s´agissait particulièrement des potentats locaux et régionaux
que les membres de base ne pouvaient pas ou n´osaient pas dénoncer et qui, pour
cette raison, restèrent confortablement installés dans leurs positions au
niveau local et régional.
Pour traiter ces questions, le Comité Central dut se
réunir en février 1937. Cette réunion devint donc comme le point de départ du
combat qui fit rage pendant les années 1937-1938. Boukharine et Rykov prirent
part à cette réunion et furent accusés à ses débuts d´avoir collaboré avec les
ennemis du parti. Et même d´avoir fait partie, avec Trotski, d´une ligue contre
révolutionnaire pour faire tomber le gouvernement soviétique. Les accusations
contre eux étaient basées sur les données ayant pour origine les procès-verbaux
du récent procès contre Piatakov, Radek et les autres etc. Boukharine et Rykov
cherchèrent à se défendre mais ils furent, sur décision du Comité Central,
considérés comme traîtres et exclus du parti. Leurs dossiers furent déposés
auprès du parquet pour investigation et traduction devant le tribunal. Nous
reviendrons plus loin sur cette affaire.
Le
discours de Staline
Pendant la réunion du Comité central. Staline fut un
discours important sous le titre: Défauts
du travail du Parti et mesures à prendre pour liquider les gens à double face,
trotskistes et autres[65].
Ce discours, et la conclusion qu´en fit Staline, est un document de base pour
tout celui qui veut comprendre l´histoire des événements des années 1930. Même
d´autres camarades comme Molotov, Jdanov et Ejov soulevèrent d´importantes
questions lors de cette réunion.
Dans son discours, Staline s´adressa aux membres du Comité
central pour leur demander comment il était possible que des agents étrangers,
des trotskistes et leurs alliés politiques pouvaient avoir accès aux
organisations économiques et administratives de l´État soviétique et dans les
organisations du parti pour y commettre des actes de sabotage, d´espionnage et
de destruction. Staline demanda en plus comment ces éléments étrangers
pouvaient avoir des postes de responsabilité et même recevoir de l´aide des
camarades du parti haut placés pour se faire accorder des fonctions si
importantes.
Staline présenta par la suite une liste des actes de
sabotage et d´espionnage perpétrés au cours de l´année écoulées ainsi que la
lettre de mise en garde du Comité central et poursuivit:
”Les faits ont montré que, pour entendre ces
avertissements et signaux, nos camarades avaient l’oreille plus que dure. C’est
ce qu’attestent avec éloquence les faits connus de touts, empruntés à la
campagne pour la vérification et l’échange des cartes du Parti. Comment
expliquer que ces avertissements et signaux n’aient pas eu l’effet voulu ?
… Peut-être, nos camarades du Parti ont-ils perdu les qualités qu’ils avaient
autrefois, sont-ils devenus moins conscients et moins disciplinés ? Non,
certes non. Peut-être, sont-ils en voie de dégénérescence ? Non
plus ! Une telle supposition est dénuée de tout fondement. Mais
alors ? D’où viennent cette badauderie, cette insouciance, cette
bénignité, cette cécité ? La vérité est que nos camarades du Parti,
emportés par les campagnes économiques et les succès prodigieux remportés sur
le front de l’édification économique, ont simplement oublié certains faits très
importants que les bolcheviks n’ont pas le droit d’oublier. Ils ont oublié un
fait essentiel touchant la situation internationale de l’URSS … Ils ont oublié
que le pouvoir des Soviets n’a triomphé que sur en sixième du globe … et qu’il
existe, en outre, un grand nombre de pays, pays bourgeois, qui continuent à
mener un genre de vie capitaliste et qui encerclent l’Union soviétique,
guettant une occasion de l’attaquer, de la briser ou, en tout cas, de saper sa
puissance et de l’affaiblir”[66].
Les
espions des pays capitalistes
Staline passa ensuite à la partie du discours décrivant
les conditions prévalant entre les pays capitalistes.
”Il a été démontré, comme deux fois deux font quatre, que
les États bourgeois se dépêchent mutuellement, sur leurs arrières, leurs
espions, leur saboteur, leurs agents de diversion, et parfois aussi, leurs
assassins ; qu’ils leur donne comme tâche de s’insinuer dans les établissements
et entreprises de ces États, et de les noyauter, et, « en cas de
nécessité », de faire sauter les arrières de ces États, pour les affaiblir
et saper leur puissance. … A l’heure actuelle,
Ce sont ces circonstances que les camarades haut placés
dans le parti avaient, selon Staline, oublié, ce qui a conduit au sabotage et
aux actes d´espionnage auxquels beaucoup ne s´attendaient pas. Concernant les
succès économiques, il fut fait allusion à la négligence et à l´insouciance.
Les véritables grands succès de la construction socialiste avaient amené avec
eux la tendance à surestimer ses propres forces et à sous-estimer celles de
l´ennemi. Les grands succès créent ”une atmosphère de triomphalisme de parade
et des acclamations internes qui tuent le sentiment de la proportion, et à
diminuer l´instinct politique et qui affaiblissent les hommes et les amène à ne
rien entreprendre”[68].
L´encerclement
capitaliste?
Et Staline de continuer en introduisant les pensées d´un
fonctionnaire local du parti dans le sujet.
”L´encerclement capitaliste? Quelles histoires! Quelle
signification peut-il avoir, cet encerclement si nous accomplissons et
dépassons nos plans économiques? De nouvelles formes de sabotage, la lutte
contre le trotskisme? Tout cela est ridicule! Quelle est la signification de
toutes ces bagatelles si nous accomplissons et dépassons nos plans économiques?
Les statuts du parti, le choix des organes du parti, l´obligation pour les
leaders du parti de présenter leurs comptes devant la masse du parti? Tout cela
est-il nécessaire? Est-il vraiment nécessaire de perdre du temps sur toutes ces
petites choses si notre économie croît, et si la situation matérielle des
travailleurs et celle des ouvriers s´améliorent? Tout cela est inutile! Nous
surpassons nos plans, notre parti se porte bien, le Comité Central du parti se
porte aussi bien, - de quoi donc avons-nous en plus besoin? C´est bizarre que
des gens soient assis dans le Comité Central à Moscou et s´imaginent des
choses, discutent sur une quelconque destruction, ils ne dorment pas eux-mêmes
et ne laissent pas d´autres dormir...”[69].
Les
cours du parti et les cours de Lénine
Staline énumère par la suite les erreurs commises dans le
travail du parti et les solutions qu´il trouve nécessaires pour les résoudre.
Il conclut par une proposition sur les études organisées pour les cadres du
parti, des responsables des cellules jusqu´aux leaders des organisations du
parti au niveau des régions et des conseils des républiques. Pour les leaders
des cellules, des ”cours du parti ” de 4 mois étaient à organiser. Pour les
leaders des districts, ”les cours de Lénine” étalés sur une période huit mois
allaient être organisés dans les plus grandes villes de l´Union soviétique.
Pour les leaders des organisations des villes, des cours de six mois, ”cours
sur l´histoire du parti et la politique” étaient organisés auprès de SUKP (b)
du Comité central. Enfin, ”une conférence”
de six mois sur la politique intérieure
et la politique internationale” était aussi organisée auprès de SUKP(b) du
Comité Central pour les leaders au niveau des organisations des régions et des
territoires et à celui des Comités Centraux des partis communistes nationaux.
Les études étaient la seule voie à suivre pour résoudre les problèmes et les
contradictions dans le parti, une ligne politique présentée par Staline, Jdanov
et Kirov depuis Janvier 1934[70].
Dans
Contrôler
les fonctionnaires du parti
Le reste des questions soulevées dans la conclusion
étaient toutes destinées à critiquer les fonctionnaires du parti dans leurs
relations avec les membres de base du parti. Staline ne mâcha pas les mots. Il commença par critiquer le
choix des fonctionnaires du parti.
”Les fonctionnaires du parti ne sont pas élus sur des
bases objectives mais plutôt sur des critères à caractère petit-bourgeois.
D´habitude on vote les soi-disant connaissances, les amis, les gens provenant
du même milieu, des gens auxquels on est attaché, des gens qui savent flatter
leurs chefs -indépendamment de leurs idées politiques et de leurs
connaissances. Il est clair qu´au lieu d´un groupe des dirigeants responsables,
on se retrouve avec une clique de gens familiers, des proches, une sorte de
cartel, dont les membres chercheront à vivre en paix pour éviter d´avoir des
problèmes les uns envers les autres, qui se louent mutuellement et qui de temps
en temps présentent des rapports dégoûtants et vides sur leurs succès à la
direction centrale du parti. Il n´est
pas difficile de comprendre qu´il ne peut pas exister, dans un milieu aussi
familier, de la place pour des critiques et de l´autocritique dans le travail
de la part des dirigeants. Il est clair qu´un tel milieu familier crée un
endroit favorable pour des lécheurs de souliers, de personnes sans dignité qui,
pour cette raison, n´ont rien en commun avec le bolchevisme”[72].
Staline indiqua aussi la nécessité pour les
fonctionnaires du parti d´être contrôlés non seulement par leurs supérieurs, mais
surtout par les membres de base du parti.
”Tous les camarades croient que le contrôle ne peut se
faire que de haut, lorsque les supérieurs contrôlent ceux qui sont sous leur
autorité. Cette conception est mauvaise. Le contrôle d´en haut est naturellement
nécessaire comme une mesure effective pour éprouver les fonctionnaires et se
rassurer que le travail a été effectivement faite. Mais le contrôle exercé de
haut est loin d´être le plus efficace pour éprouver les travailleurs. Il y a
aussi une autre forme de contrôle, le contrôle d´en bas, lorsque ce sont les
masses qui contrôlent les dirigeants, déterminent leurs fautes et expliquent
comment celles-ci seront corrigées. Ce genre de contrôle est l´une des manières
les plus efficaces d´éprouver les gens”[73].
Appliquer
le léninisme
Staline critiquait très sérieusement ceux qui ne
voulaient pas faire l´autocritique ouvertement parce que ceci serait considéré
comme de la faiblesse laquelle serait utilisée au profit de la désorganisation
et de l´affaiblissement.
”Ce sont des stupidités, chers camarades, des stupidités
pures et simples. Reconnaître ses fautes et les corriger de manière honnête ne
pourraient, au contraire, que renforcer notre parti et son autorité ...
Épargner et garder les cadres en cachant leurs fautes est très sûrement la même
chose que les détruire”[74].
En conclusion, Staline exhorta les leaders des sections
du parti à écouter la voix des masses, une manière sûre de diriger. Il critiqua
très fortement ”les relations formelles, bureaucratique et sans coeur de
certains des nos camarades à des autres membres du parti ; pour la
question des purges ou celle de remettre leurs cartes aux membres exclus”[75].
Selon Staline, les leaders doivent apprendre à connaître les membres, leur
développement et leurs façons de vivre pour être à mesure d´apprécier chacun
d´entre eux. Sans une telle connaissance, ”ils agiront sans discernement. Ou
bien ils font une appréciation rapide et fait l’éloge de tout le monde, ou bien
sermonnent tout le monde de manière aussi rapide, et excluent des milliers et
des dizaines de milliers des membres du parti”[76].
Staline s´opposa contre toutes les purges à cause de la soi-disant passivité ou
parce que les membres n´ont pas assimiler les statuts. Assimiler le programme
du parti ne peut être fait que par des marxistes théoriquement éduqués et
éprouvés.
Staline exhortait les leaders du parti à appliquer la
formule léniniste dans le recrutement des membres au parti. Selon cette
formule, ”le membre du parti c´est ceux qui reconnaît le programme du parti,
paye ses cotisations et travaille dans l´une des organisations du parti”[77].
Aucun membre du parti ne devrait être exclu à cause de son manque de
connaissance du programme et de la politique du parti. Staline appela cela de
la politique sans coeur et de la bureaucratie extrême que d´exclure les
travailleurs pour de petites fautes comme des retards a des réunions ou pour
n´avoir pas payé les cotisations. Avant que la question des purges soit
discutée, il faut qu´au préalable, une annotation, une mise en garde ou un
certain temps d´observation ou d´amélioration, soit donnée à la personne
concernée. Il était exigé des responsables du parti qu´ils devaient vraiment se
soucier de la situation des membres. ”C´est cela justement que quelques de nos
camarades manquent”[78],
conclut Staline.
Les
membres du parti se mettent à critiquer
Lorsque le discours de Staline fut publié, comme
d´ailleurs ceux de Molotov, Jdanov et Ejov, il devint un point de départ pour
un débat dans la société. Le thème principal était
Le Comité Central avait pendant toute la décennie 30
exhorté les membres du parti de critiquer la direction du parti et de démasquer
les secrétaires du parti corrompus et insouciants. La discussion fut donc
déclenchée! Il fut organisé, partout dans le pays, des réunions du parti à la
suite de celle du Comité Central de février. Cette réunion récemment organisée
de manière désorganisée et bureaucratique avec des suspicions sur la corruption
amicale, devait être réorganiser après les protestations des membres. Les
archives de Smolensk donne des exemples des responsables du parti qui avaient
été contraints par les membres à l´autocritique. Les masses de membres
n´avaient pas eu pitié. A l´issue de plusieurs réunions de districts, des
réunions tenues sur les lieux de travail et les lieux d´habitation, les
responsables locaux du parti furent tellement foncièrement dénoncés qu´ils
furent immédiatement révoqués de leurs positions et que de nouveaux leaders
bénéficiant de la confiance du peuple furent directement élus. Ces élections
n´étaient pas planifiées par le Comité Central dans son programme sur des élections
secrètes des responsables. Mais ceci n´était encore qu´à un stade embryonnaire.
Toutefois, rien ne pouvait arrêter la volonté des membres de prendre le pouvoir
des mains des bureaucrates du parti corrompus.
L´exemple
du district de Belyi
Un exemple typique de la situation des travailleurs,
après la réunion du Comité central de février 1937, nécessite d´être donné.
Dans le district de Belyi (Belyi Raion), il fut organisé une réunion de 4 jours
pour passer en revue les activités du parti. Le procès-verbal de cette réunion
se trouve dans les archives de Smolensk[79].
Les membres de base qui avant, parlaient rarement, au cours des réunions ou qui
étaient considérés comme passifs, pouvaient cette fois s´exprimer ouvertement
”indépendamment de la personne”[80] concernée. 220 des 240 membres du parti
assistèrent à cette réunion de Belyi. 77 s´étaient exprimés au cours de la
réunion pour critiquer durement le secrétaire de district Kovalev. Celui-ci
était accusé d´être le bureaucrate qui avait maltraité les membres. Il avait
falsifié les rapports sur les cours d´éducation politique et fermé des salles
de cours sous prétexte qu´ils n´étaient pas nécessaires. Ses méthodes étaient
dictatoriales, partiales et brutales. Les membres qui, pour une raison ou une autre,
étaient convoqués au siège du district se sentaient mal à l´aise et savaient
qu´ils allaient beaucoup attendre; ils étaient plusieurs rentrés sans avoir
résolu leurs problèmes.
Vinogradov, chef du NKVD de Belyi vint au secours de
Kovalev exhortant les membres à ne pas discuter le travail du parti. Selon lui,
la directive de la réunion du Comité Central de février recommandait de
discuter les récoltes. Pour sa part, Kovalev chercha à se décharger sur ses
subordonnés des cellules du parti. C´était, selon lui, à ce niveau qu´il y
avait eu des manquements, pas au niveau du district. Selon Golovashenko,
représentant des comités des régions (obkom) vola lui aussi au secours de
Kovalev. Il chercha à calmer la discussion et s´adressa de manière critique contre
les membres qui avaient durement critiqué Kovalev. Mais rien ne pouvait aider
Kovalev. La critique des membres continua de manière ininterrompue pendant la
réunion et la liste des accusations devint très longue. La réunion se termina
par le renvoi de Kovalev sur décision des membres et par l´élection de
Karpovsskij comme secrétaire de district du parti.
”Conclusion” de Staline, une arme dans la
lutte
L´histoire ne s´arrête pas ici. Le chef du NKVD de la
place ainsi que le représentant régional avaient cherché à aider Kovalev. Une
décision du secrétariat régional du parti annula l´élection du nouveau
secrétaire de district, Karpovsskij et proposa un autre membre à la place,
Boradulin. Une autre réunion de membres ayant eu lieu, Boradulin fut déclaré
encore plus incompétent que Kovalev et Kapovsskij fut réélu comme secrétaire de
district. Karpovsskij demanda aux membres d´accepter la décision du secrétariat
régional. Après quoi, le secrétariat régional recula et Kapovsskij devint
secrétaire de district.
Telle était la situation après la réunion du Comité
central. ”Conclusion” de Staline” à
la main, les membres se mirent immédiatement à renvoyer du parti les
carriéristes et les bureaucrates corrompus et à élire leurs propres leaders
sans se soucier un instant des instances supérieures. C´était une lutte spontanée dont on peut lire
le témoignage dans les archives de Smolensk et dont les conséquences pour
l´avenir proche furent d´une grande importance. Les bureaucrates corrompus qui
étaient encore en poste continuèrent au même moment à se protéger
mutuellement.
Les
élections du parti de 1937
L´une des
décisions importantes prises lors de la réunion du Comité Central de
février fut celle de décréter les élections générales au sein du parti,
celles-ci devant avoir lieu dans des conditions soigneusement et rigoureusement
démocratiques dont l´introduction du vote secret. Le 20 mars 1937, deux
semaines après la réunion, le Comité Central prit la directive, Élections au sein des organisations du parti.
Cette directive mit en route, dans la presse, un débat sur la nécessité de
l´autocritique, de la démocratie dans le parti et du contrôle des
fonctionnaires du parti. La direction centrale du parti prit des mesures devant
empêcher la manipulation par des urnes des responsables corrompus.
Les élections eurent lieu en avril 1937. Au cours de différentes réunions électorales,
les dirigeants locaux furent abondamment critiqués. Des réunions antérieures du
parti avait été organisé un peu partout comme des forums de discussions et de
débats portant sur le manque de discipline ou la manière de vivre des membres
de base du parti. La situation était maintenant inversée. Maintenant c´était
les dirigeants locaux qui étaient au centre de la critique. Beaucoup de membres
furent en principe élus à des postes de responsabilité au cours de ces
réunions. Les discussions étaient longues et des procès-verbaux en furent
soigneusement élaborés. Les élections secrètes venaient en dernier lieu. Il y
a, dans les archives de Smolensk, beaucoup de documents ainsi que les urnes de
ces élections
Des
vieux comités de direction furent changés
Les résultats nationaux des élections furent publiés dans
la presse. De 54.000 organisations du parti dont les résultats furent publiés
en mai 1937, environs 55% d´anciens comités avaient été changés. C´était un
résultat incroyable. Ceci démontrait en premier lieu que le manque de confiance
envers les anciens comités était très grand. Ça démontre aussi que les membres
de base avaient, dans les faits, la force collective nécessaire pour pouvoir
renvoyer les politiciens incompétents du parti. La réunion du comité central
avait donc démontré qu´il existait déjà un mécontentement dans le parti.
Ces élections avaient toutefois un autre aspect. De
l´ensemble des dirigeants exclus, la plupart travaillaient au niveau local, au
niveau des districts et à celui des cellules, des niveaux auxquels les membres
ordinaires pouvaient déterminer le bien du mal et dénoncer la corruption, les
abus de pouvoir et le sabotage. Au niveau plus élevés des comités des villes et
des régions, les élections n´eurent pas le même genre de résultat. Les
directions régionales du parti avaient encore une grande capacité à survivre
aux critiques. Des cas bien connus de dirigeants régionaux qui agissaient, dans
leurs juridictions, comme de petits rois bureaucrates, existent et démontrent
que ces personnes avaient réussi à manipuler les urnes en leur faveur. Les
membres de base n´avaient pas la même possibilité d´appréciation des événements
entourant les élections de ces dirigeants qu´au niveau local. Un autre facteur
ayant contribué à désavantager les membres de base mérite d´être souligné. Les
secrétaires des comités des régions et des villes corrompus et incompétents
s´entouraient toujours de fidèles qui les soutenaient en toutes circonstances.
Il ne leur donc pas était facile de percer toutes les barrières pour rétablir
la vérité.
Les
comités des régions furent changés
La campagne contre la bureaucratie et la corruption au sein
du Parti Communiste se poursuivit même au niveau le plus élevé. Au début de
juin, les conférences annuelles du parti se terminèrent comme d´habitude.
N´ayant pas tellement une grande signification, elles consistaient surtout à
faire état de la situation de travail dans les directions régionales du parti.
Toutefois, quelque chose d´inattendu eut lieu cette fois-ci: les dirigeants du
parti furent soumis à des critiques. La direction du parti savait qu´il serait
plus difficile aux membres de base de se faire entendre au niveau régional.
Cette fois-ci, la direction centrale se décida d´envoyer des représentants aux
conférences régionales du parti. Ces représentants vinrent de fois sans se
faire annoncer, et participèrent aux discussions. Ce qui transforma la
conférence en forums de discussion au désavantage des dirigeants régionaux du
parti. De 25 conférences régionales annoncées dans la presse, quatre se
terminèrent par le renvoi des directions régionales. Malgré cette situation, de
petits rois continuèrent à décider au niveau régional, à faire ce qu´ils
voulaient sans se soucier des directives du parti.
Procès
militaire contre les généraux
C´était à l´époque des conférences régionales qu´un
événement décisif pour l´avenir de la vie politique de l´Union Soviétique se
produisit. Le 11 mai 1937,
La conspiration des généraux était la face militaire de
la lutte de l´opposition contre le gouvernement soviétique. Le procès pour
trahison contre Piatakov et Radek avait été un grand coup contre l´opposition,
mais les généraux n´avaient pas pour autant
abandonné le plan de faire un coup État Ils avaient compris que chaque retard
agissait dans à leur désavantage. Les plans ayant été élaborés depuis très
longtemps, il était temps d´agir. Après le procès contre Piatakov et la
révélation du groupe Boukharine-Rykov qui était maintenant sous les verrous,
les conspirateurs militaires avaient augmenté leurs efforts. Vers la fin de
mars 1937, ils décidèrent donc que le temps était mûr pour le coup État.
Celui-ci devait avoir lieu dans six semaines au plus tard le 15 mai.
Le
retour des commissaires politiques
Lorsqu´il fut informé des préparatifs de coup État, le
gouvernement soviétique décida d´agir rapidement. Une résolution importante fut
prise le 8 mai: Les commissaires politiques furent réinstallés dans l´armée à
tous les niveaux. Le système des commissaires politiques devant surveiller les
officiers de l´armée ainsi que l´application des décisions militaires, avait
été supprimé depuis 10 ans, soit le 13 mai 1927, sur proposition de Frounze, un
vieux bolchevique, un cadre très haut placé qui était avec le temps devenu l´un
des dirigeants de l´armée. Frounze avait supprimé les commissaires politiques
et remis en selles le pouvoir des officiers. Il avait choisi des gens qui le
soutenaient à des postes importants dans l´armée.
Bien plus, le 11 mai 1937, le maréchal Toukhatchevski fut
démis de ses fonctions de vice commissaire de la guerre et fut nommé à un
niveau plus bas dans le territoire de Volga. Le général Gemarnik, l´un des
conspirateurs, qui se suicida, fut destitué le même jour comme commissaire de
la guerre adjoint. Le général Yakir et Uborevitj furent aussi transférés à des
niveaux plus bas, et les généraux Kork et Eideman furent emprisonnés pour
espionnage au profit de l´Allemagne nazie. Les conspirateurs n´eurent donc plus
un quelconque moyen pratique de faire le coup État
La
société socialiste se défend
L´intervention rapide du gouvernement soviétique permit
d´empêcher le coup État, mais la grandeur de la conspiration au sein de la société
civile et parmi les militaires n´était pas connue dans toute sa dimension. Le
réseau constitué par les généraux comprenait aussi bien des fonctionnaires du
parti que des officiers de l´armée. C´était dans l´ignorance et dans
l´insécurité que la vie politique du pays se jouait. Tout le contenu de la
conspiration se révéla lors du procès contre Boukharine en 1938. Les
conspirateurs avaient déjà constitué les listes de milliers des cadres qui
devraient être emprisonnés et éliminés. Pendant ce temps, la société socialiste
fut obligée de se défendre en suivant la piste des généraux et celle du procès
Piatakov.
Avant le début du procès, les preuves de la culpabilité
des généraux fut présenté devant un groupe d´officiers et des représentants de
tous les districts militaires de l´Union Soviétique, au cours d´une grande
conférence militaire à Moscou. Le procès fut organisé à portes fermées à cause
des questions militaires traitées à cette occasion. Seulement les officiers
militaires de haut rang y avaient accès. Le siège du tribunal était composé du
juge Ulrich et de 8 officiers de haut rang. Les accusés furent déclarés
coupables et condamnaient à mort. Deux des membres du siège du tribunal, le
maréchal Blücher et le vieux héros bolchevique, le maréchal Boudienny rendirent
publique la peine de mort.
Les
conspirateurs et les liaisons étrangères
Le procès contre les généraux fut l´objet des
spéculations interminables qui donnèrent lieu à des conceptions les plus
ridicules. La raison de ces spéculations fut qu´il y avait eu une conspiration
au sein de l´armée soviétique avec pour but de renverser le gouvernement
soviétique par la violence au cours d´un coup État Même les analystes les plus
réactionnaires admettent qu´une telle conspiration a réellement existé. La
différence entre les différentes interprétations des écrivains n´apparaît que
lorsqu´on cherche à savoir qui ont été les alliés des généraux. Les recherches
historiques des dernières années ont toutefois confirmé les accusations du
gouvernement soviétique: Toukhatchevski et son groupe avaient sollicité l´aide
de l´Allemagne nazie pour son coup État, les groupes de Piatakov et Boukharine
avaient été de la conspiration.
La tentative de coup État aurait eu des conséquences très
dangereuses et imprévisibles. D´un côté
le gouvernement soviétique bénéficiait d´un large soutien de la population et
de la part de l´armée. De l´autre, les conspirateurs avaient agi dans le secret
pendant plusieurs années et préparé leurs forces; les gens comme Toukhatchevski
étaient en grande partie venus du corps d´anciens officiers de l´armée
tsariste. La plupart de ces gens avaient été autorisés à continuer au sein de
l´armée rouge et avaient été placés à des postes de commandement élevés. À
l´heure des procès, l´armée soviétique était devenue une grande armée
modernisée et forte de plusieurs millions de soldats. Une confrontation au sein
d´une telle armée entre les troupes gouvernementales et les conspirateurs, même
si ceux-ci étaient moins nombreux, aurait eu des conséquences de grande
envergure et entraîné beaucoup de pertes.
De l´expérience des situations pareilles intervenues au
cours de l´histoire, nous savons que ce genre d´événements conduit en principe
à la confusion dans laquelle les soldats suivent aveuglément leurs chefs. Si le
coup État avait été mis en marche, on serait en face d´une guerre aux conséquences dévastatrices. Ce qui
était aussi l´espoir des généraux. Pour vaincre définitivement, ils avaient
inévitablement besoin du soutien de l´étranger, de la part des États forts
militairement et qui avaient longtemps constitué une menace pour l´Union
soviétique: l´Allemagne nazie, le Japon et l´Italie. C´était cela d´ailleurs
qui avait été planifié. Les nazis allaient lancer une invasion pour ”libérer”
l´Ukraine et le Japon allait occuper la côte de l´océan pacifique.
Les
réunions régionales du parti et la lutte contre la contre-révolution
La situation était très tendue en Union Soviétique en juin
1937. Personne n´était informé de l´étendue du complot militaire mais tout
indiquait que le complot étais plus grand que ce qui avait été dit. Le Comité
central se décida de mener une enquête approfondie. La conspiration militaire
venait d´en haut et avait des racines dans la société auprès des personnes
hautes placées. Un certain nombre de réunions extraordinaires furent organisées
dans les régions dans le but de faire l´évaluation du travail des directions
régionales du parti et d´enquête sur les ramifications de la conspiration. Dans
la région Ouest, l´on eût une réunion de trois jours, entre le 19 et le 21 juin
1937. Kaganovitch prit part à cette réunion comme représentant du Comité
Central. L´objectif principal de cette
réunion était d´évaluer le travail du secrétaire régional Roumiantsev et de ses
proches collaborateurs.
Roumiantsev
critiqué
Ivan Petrovich Roumiantsev était ”un vieux bolchevique”
qui était entré au parti depuis 1905. En 1925, il fut nommé par le Comité
Central comme premier secrétaire du parti à Smolensk et il y amena un nombre de
vieux camarades qui prirent des postes importants dans la région. Ce genre de
camaraderie fut qualifiée d´antimarxiste par Staline lors de la réunion du
Comité Central de février, mais ceci n´eut aucune influence particulière sur
Roumiantsev. Membre du Comité Central, Roumiantsev, âgé de 61 ans en juin 1937,
occupait une position centrale dans
Les circonstances changèrent radicalement à la réunion du
19-21 juin 1937. Pas seulement parce que Kaganovitch était présent à la réunion
et qu´il soutenait les critiques. Un autre aspect plus important était la
liberté d´expression des membres du parti au cours de la réunion. Il a été
démontré que l´un des généraux conspirateurs condamnés à mort, Uborevitj, était
membre du comité régional dans lequel il collaborait parfaitement avec Roumiantsev.
Celui-ci était suspecté d´avoir été l´un des hauts fonctionnaires du parti qui
avaient participé à la conspiration militaire. Les injustices commises par
Roumiantsev et ses proches furent sans pardon dénoncées devant les membres. La
situation devint plus difficile encore dans
Le
Comité Central mène grande contra offensive
En juillet 1937 le Comité Central avait réuni
suffisamment de preuves sur le fait que le coup État militaire avait été une
partie du complot auquel beaucoup de hauts fonctionnaires du parti avaient pris
part. Il se trouva des complices de ce complot jusqu´au sein du Comité Central.
La construction du socialisme avait, pour certains vieux bolcheviques et
certains nouveaux hauts fonctionnaires du parti, entraîné des conséquences
qu´ils ne pouvaient pas accepter. La lointaine et romantique image du pouvoir
des travailleurs des jours de révolution de 1917 avait maintenant été
matérialisée dans les faits dans une Union Soviétique dirigée par les
travailleurs. Pour ceux qui avaient une bonne vie et s´étaient fait des
privilèges, ceci était un développement effrayant. Ils choisirent donc le
chemin de la contre-révolution. Ils trouvèrent des alliés en dehors de l´Union
Soviétique pour arrêter le développement socialiste. Le Comité Central décida
de combattre le terrorisme blanc et la trahison avec détermination.
La mission de suivre la piste des traîtres auteurs de la
tentative du coup État fut prise en charge par les services de sécurité NKVD
alors sous la direction de Ejov. On rechercha dans tout le pays des gens connus
pour avoir eu des relations avec les conspirateurs du groupe de Piatakov et
ceux de celui des généraux. La situation politique était incertaine et les
contacts étrangers des conspirateurs mal connus. Les généraux avaient filtré
des informations secrètes sur la défense de l´Union Soviétique et personne ne
savait jusqu´à quel point cet acte avait affaibli le pays.
Le
nazisme gagne en Europe
Les armées fascistes avaient commencé à agir librement en
Europe. La guerre battait tambour en Espagne et l´Italie venant au secours de
Franco, y avait envoyé 50.0000 hommes. L´Allemagne nazie contribua
économiquement et matériellement avec des avions de chasse et des bombardiers,
des fusils, des chars de combat et d´autres machines de guerre, tout cela pour
armer les Italiens et les fascistes de Franco. L´une des premières attaques
aériennes historiques contre les civils eût lieu sur Madrid et Barcelone. En
Afrique, l´Italie occupa le royaume de l´Ethiopie-Abyssinie après une guerre
sans merci menée par une armée moderne contre un peuple sans défense. En 1938,
les nazis occupèrent l´Autruche et en mars 1939
L´Union Soviétique était en danger. L´agression fasciste
s´approchait à grand pas. Les dommages que la trahison des généraux avait
causés étaient une menace contre le pays et devraient prendre beaucoup de temps
à réparer. Le gouvernement savait qu´il y avait encore beaucoup à faire pour
être à mesure de faire face aux forces de l´Allemagne nazie, la plus grande et
la mieux équipée de toutes les armées du monde. Lorsque le jour de l´invasion
arriva, en juin 1941, l´Allemagne nazie avait une armée de huit millions
d´hommes! Ni avant, ni plus tard, une aussi grande armée n´avait jamais existé
dans l´histoire de l´humanité. L´Union Soviétique avait dans des conditions
difficiles mis en place une industrie moderne et augmenté sa capacité à 5
millions de personnes.
Les
purges frappent jusqu´au sommet
Les purges du parti s´accélèrent lorsque le Comité central
avait remis en cause la fidélité des secrétaires régionaux du parti envers le
socialisme. Les réunions du parti furent fortement influencées par la situation
tendue qui prévalait dans le pays et les membres de base du parti devinrent de
plus en plus exigeants contre les fonctionnaires corrompus et inefficaces. Des
gens qui se croyaient intouchables furent subitement exclus des positions de
direction par les masses du parti, certains d´entre furent même renvoyés
directement devant les tribunaux après les réunions.
La description bourgeoise de l´histoire, en Occident,
parle de la terreur contre les fonctionnaires de haut rang et les chefs des
entreprises, des gens qui avaient une meilleure situation économique par
rapport à la plupart. Personne ”ne pouvait plus dormir tranquille”, disent les
historiens bourgeois.
Mais pourquoi ne pas mettre en cause les gens qui
s´amusaient ”furtivement” avec les biens du peuple, utilisaient l´argent de l´État
à des fins personnelles, distribuaient généreusement les cadeaux aux amis et
connaissances et s´adonnaient à la corruption? Pourquoi devrait-on spécialement
tenir compte des chefs des partis qui profitaient de leurs positions pour
opprimer les membres de base du parti et les maltraiter? Pourquoi ne devrait-on
pas poursuivre les généraux et d´autres officiers de haut rang qui avaient
trahi le pays en vendant ses secrets à l´ennemi et en collaborant avec lui?
Pourquoi devraient-ils être libres et éviter d´être traités comme des
criminels? En Union Soviétique, contrairement aux démocraties bourgeoises de
l´Occident, tous les citoyens étaient égaux devant la loi. Bien plus, une
position très élevée dans la société était une mission de confiance, ce qui impliquait
que son détenteur devait montrer un bon exemple et suivre scrupuleusement les lois. En vérité, ceci ne parait étrange
que pour la bourgeoisie capitaliste qui a toujours vécu dans le crime, dans la
tricherie et la spéculation.
Les
purges et ”les vieux bolcheviques”
Beaucoup a été dit par les historiens bourgeois sur la
persécution des ”vieux bolcheviques” lesquels seraient le plus touchés pendant
les purges. Les preuves d´une telle théorie n´existent nulle part dans les
archives de Smolensk. Si ”les vieux bolcheviques” ont été arrêtés, c´est parce
qu´ils étaient des cadres de direction dans le parti et qu´ils avaient été
trouvés par les membres de base comme corrompus, oppresseurs et négligents. Des
enquêtes concernant 127 vieux bolcheviques de la génération de Staline qui
avaient participé à la révolution d’ octobre 1917 ont démontré qu´ils n´étaient
pas un objectif spécialement visé par les purges. S´ils étaient tombés victimes
des purges, c´est à cause de leurs hautes responsabilités dans le parti et
parce qu´ils avaient été critiqués par les membres. De 127 ”vieux
bolcheviques”, on a pu suivre l´itinéraire de 109. De ceux-ci, 38 furent exclus
ou portés devant les tribunaux en 1937. [83]
Une comparaison entre les années 1934 et 1937 donne aussi
des résultats très intéressants. Le nombre de ”vieux bolchevique” à l´occasion
du 17è congrès du parti était de 182.600. Au moment du 18è congrès du parti en
1939, ce nombre avait diminué à 125.000. Cette réduction de ”vieux
bolcheviques” actifs pendant ces cinq années toutes causes confondues, y
compris les décès et les maladies était de 56.900, soit 31 %. Une partie de ces
56.900, sûrement la plus grande, fut exclue pendant les purges de 1937. Le
nombre de ”vieux bolchevique” actifs atteignait toutefois 125.000 en 1939[84],
dont la plupart occupaient encore des positions de direction dans le parti à
travers tout le pays. Le mythe selon lequel ”Staline avait éliminé tous les
vieux bolcheviques” n´était justement qu´un mythe, un mensonge supplémentaire
de Conquest-CIA que Trotski alors avait lancé.
Les recherches montrent que la plupart de ceux qui
avaient été exclus pendant cette période avaient été des gens qui occupaient
des positions de responsabilité dans le parti. Ci-après un exemple du district
de Belyi. De 244 membres et candidats de l´organisation du parti de Belyi 36
furent exclus en 1937. De ceux-ci, 30 occupaient des responsabilités
importantes. Deux premiers secrétaires, un président et deux vice-présidents du
comité exécutif du soviet, un secrétaire de district de Komsomol, un procureur
de district, le chef de NKVD du district et son officier, trois directeurs
d´école, le leader de la direction foncière locale, le directeur de la station
des tracteurs de Belyi, quatre chefs d´industries, deux leaders syndicaux, cinq
présidents des coopératives agricoles et cinq présidents de soviet[85].
Le
mythe des exclusions de 1937
Le mythe de l´effrayante année 1937 que la bourgeoisie
par l´entremise de Robert Conquest et de CIA/M15 - les vrais fondateurs du mythe
-, a présenté comme l´un de ses plus grands arguments est mieux révélé par des
statistiques encore disponibles, sur les purges des années 1930.
Exclusion
du Parti[86]
Année des purges Nombre d´exclus % d´exclus
1929
170.000
11
1933
792.000
18,5
1935 170.000
9
1936
-
-
1937
100.000 5
1938
70.000
2
NB. Il n´existe aucune statistique nationale pour l´année
1936. Le nombre d´exclus fut de 2 à 3% à Smolensk.
Lorsqu´on analyse ces statistiques, on comprend alors
l´étendue des mensonges bourgeois. En réalité, l´année
La
question de classes donne la réponse
L´explication est liée à la question de classes sociales.
La grande différence entre les purges de 1937 et le reste des purges
orchestrées dans le parti est que, pendant ces dernières, c´étaient les membres
de base du parti, les travailleurs ordinaires, qui furent en très grande partie
exclus - ils constituaient presque 80 % d´exclus. Les circonstances étaient presque contraires
en
La
politique du parti et les difficultés de la lutte des masses
L´objectif des purges a été d´exclure les bureaucrates
corrompus et les traîtres du parti et de l´armée. Une telle grande lutte
engageant des millions de membres du parti ne pouvait pas se faire sans erreur.
Les vieux conflits de personnes pouvaient conduire à des décisions injustes.
Par ailleurs, il y eut un manque de confiance à l´égard de tous les cadres du
parti dans une organisation où un certain nombre de fonctionnaires de haut rang
avaient été des bureaucrates corrompus et trouvés coupables. Le Comité Central
était conscient de ces difficultés et avait dès le départ mis en garde contre
les exagérations.
La lutte était dirigée contre la bureaucratie et la
trahison et non contre les cadres du parti en général. Il était difficile
d´appliquer ce principes dans certains endroits. C´est l´exemple des membres du
parti qui étaient fonctionnaires de État et qui ne montraient pas un intérêt
particulier pour le parti; ces membres avaient été facilement exclus malgré le
fait qu´ils avaient, dans leur travail, fait preuve de fidélité au socialisme.
Le Comité Central s´opposa a cette démarche et exigea que ces erreurs fussent
corrigées lorsque des recours lui étaient adressés.
En octobre 1937, à l´occasion d´une réception des cadres
de Donbass, Staline se prononça contre ceux qui s´en prenaient aux cadres du
parti. Selon Staline, les nouveaux techniciens et économistes de l´Union
Soviétique étaient d´origine prolétarienne et méritaient le respect du peuple.
Même le service de sécurité NKVD et son chef Ejov qui
avait joué un rôle important dans la conspiration au sein de l´armée avait été
mis en garde par le Comité Central. La police n´avait pas le droit se placer
au-dessus de la société socialiste, elle était le serviteur de cette société et
devait respecter les lois socialistes. Le travail des services de sécurité
était important, ils avaient permis au pays d´éviter la guerre civile mais
leurs pouvoirs étaient subordonnés à ceux des travailleurs et des paysans dans
le parti. Il y avait, au sein de NKVD, des forces dont la tête pensante était
le membre du Comité Central Ejov, voulaient décider qui était contre-révolutionnaire et qui caractérisait
un ennemi. Ces forces voulaient des purges continues, sans tenir compte de la
nature de certains comportements insignifiants. Pour elles, le parti devait
radicalement être débarrassé de tous ceux qui faisaient preuve de la moindre
insécurité dans leur comportement et qui n´étaient pas assez suffisamment
engagés. On devrait chasser tous ceux qui dans leur entourage le plus proche ou
dans leur milieu de travail avait eu à faire à des bureaucrates corrompus et
des traîtres. Ceci était bien entendu une question de la compétence du parti et
du Comité Central, pas de celle des services de sécurité. Ejov fut sérieusement
critiqué pour avoir, par moments, laissé le NKVD dépasser ses attributions dans
la chasse contre les traîtres, des actes qui préjudiciaient des innocents
lesquels subissaient la prison ou enduraient beaucoup de souffrances.
Bien plus, il y eut par la suite la tendance à la
glorification des services de sécurité et de Ejov dans la société et dans la
presse. Staline s´opposa personnellement à cette glorification. Au jour
d´anniversaire de NKVD le 20 décembre 1937, lequel avait été fêté avec de la
musique à la gloire de la police au théâtre de Bolshoi, le siège d´honneur
resta vide. Staline n´alla pas à la manifestation et Mikoyan assura la
présidence de cette dernière de manière improvisée. La critique contre Ejov et
les services de sécurité devait être prise au sérieux. Staline boycotta cette
réunion mais alla le soir au concert de musique du théâtre de Bolshoi.
L´absence de Staline devait être considérée en fonction de ses habitudes
habituelles en cette matière. Il se rendait d´habitude à toutes les réunions,
de celle célébrant les héros de l´aviation, celle des scientifiques, celles à
l´honneur des femmes paysannes membres des coopératives agricoles, à celles des
leaders de l´industrie ou celle des électeurs de sa circonscription.
Le
Procès du « Bloc des Droitiers et des Trotskistes » Antisoviétique
(Le
Procès Boukharine-Rykov)
2-13
mars 1938
Le 27 février 1938 on annonça officiellement que 25
personnalités d´envergure devraient être traduites devant la justice pour haute
trahison. Parmi celles-ci se trouvaient neuf anciens membres du Comité central
et d´autres fonctionnaires de haut rang (Boukharine, Rykov, Yagoda, Krestinski,
Rakovski, Rosengolz, Ivanov, Tchernov, Grinko, Zélenski, Bessonov, Ikramov,
Khodjaev, Charangovitch, Zoubarev, Boulanov, Lévine, Plétnev, Kazakov,
Maximov-Dikovski, Krioutchkov).[89] Ils étaient accusés d´avoir crée un groupe
dénommé ”le bloc des droitiers et des trotskistes” dans le but de faire tomber
le gouvernement de l´Union Soviétique et de restaurer le capitalisme. Les
activités du groupe étaient: le sabotage, la terreur, la collaboration avec
l´Allemagne nazie, le Japon et l´Angleterre, les attentats contre les
personnalités du Comité Central du Parti Communiste et du gouvernement, la
participation dans le meurtre de Kirov
et le meurtre de l´écrivain Maxim Gorki, son fils Maxim Pechkov, le chef des
services secrets Menjinski et le membre du Bureau politique Kouibychev.
Reconnaissance
de la culpabilité
Les accusés
avaient en plus, depuis longtemps eu connaissance de la conspiration révélée
pendant les affaires Zinoviev-Kamenev et Piatakov-Radek et collaboré
étroitement avec les groupes de ce s gens. Ils étaient aussi complices de la
conspiration des militaires et de la tentative de coup État de 1937. Les
personnalités marquantes des accusés étaient Boukharine et Rykov, anciens
membres du Comité Central et Yagoda, ancien chef des services de sécurité, un
homme jouissant de l´influence et du pouvoir dans la société. Même les autres
accusés étaient aussi des fonctionnaires de haut rang qui avaient beaucoup de
pouvoirs dans la construction de la société socialiste. Il existe de nombreux livres et articles sur
ce procès mais ces écrits nient presque tous la culpabilité de Boukharine et
ses compagnons. Pourtant, tous les accusés s´étaient reconnus coupables des
faits qui leur étaient reprochés. Le fait que les accusés étaient coupables
pouvait aussi à partir de l´impression générale constatée au cours du procès notamment par l´attitude
des diplomates présents. Un témoignage
sur l´impartialité et le caractère correct du procès fut donné par
l´ambassadeur des États-Unis d´alors, Joseph Davies, lequel avait assisté à
tous les procès. Nous y reviendrons plus tard.
Sur
ses gardes contre le fascisme!
L´affaire Boukharine-Rykov avait été publique et fut
suivie de manière assidue par le corps diplomatique et la presse
internationale. Comme cela était d´habitude en Union Soviétique, les accusés
étaient tous présents et étaient assis les uns à côté des autres pendant le
procès. Ils avaient toute la liberté de s´exprimer, de poser des questions et
même de donner des points de vue critiques sur les déclarations des autres.
Plus que jamais, il est important aujourd´hui de connaître ce procès, les
accusations du procureur et les réponses des accusés ainsi que les moyens de
défense dont ces derniers disposaient. Connaitre les faits est le meilleur
moyen de combattre la campagne de mensonges de la droite contre l´Union
Soviétique et le socialisme.
Dans les pages qui suivent, nous allons présenter les
faits tels qu´ils résultent du Procès-verbal (PV) de l´affaire lequel PV a déjà
fait l´objet de publication sous forme de livre en français, en anglais et en
allemand en 1938 en Union soviétique, et en suédois par la maison d´édition de
Arbertarkultur sous le nom de På vakt mot
fascismen. Pour des raisons de place, cette présentation sera limitée même
si ce sera de toute façon une longue histoire, avec de longs extraits. Pour
celui qui peut se procurer le texte, nous en recommandons avec insistance la
lecture. Nous présenterons d´abord des parties d´interrogatoire avec trois des
accusés; Tchernov, Zélenski et Ivanov, comme exemple des activités générales du
group de droite pour parler par la suite des chefs du groupe de droite,
Boukharine, Rykov et Yagoda.
Recherche
inexistante
Le travail de recherche et de présentation des affaires
Boukharine-Rykov (et Piatakov-Rydek) n´a été fait que très rarement. Des avis
sur ces affaires sont donnés de temps en temps dans des livres nouvellement
publiés et des articles dans les médias capitalistes. Mais ce sont pour la
plupart simplement des copies des livres et des agents des services de
renseignement (comme Conquest) et des trotskistes. La recherche dans le domaine
de ces procès est presque inexistante. L´auteur du présent document a été amené
à faire cette constatation lorsqu´il recherchait la version anglaise des
procès-verbaux des affaires Piatakov-Radek et Boukharine-Rykov à
L´enquête
menée auprès de Tchernov, commissaire du peuple en charge de l´agriculture
Pendant le procès, les accusés avouèrent des crimes
atroces où le sabotage contre l´appareil de production était une activité très
répandue. Tchernov, Commissaire du Peuple à l´Agriculture de l’U.R.S.S.[90] ancien Commissaire du Peuple au Commerce d’Ukraine[91],
confia au tribunal que Rykov lui avait recommandé d´accomplir ses missions en
Ukraine de manière à créer ”de telle façon que vous puissez provoquer
l’irritation du paysan moyen”. C´était la tactique de la droite de saboter et
de rendre impossible la lutte pour la collectivisation de l´agriculture. Dans
la directive de Rykov à Tchernov, il
était aussi recommandé de ”Aggravez encor les exagérations, tenez
particulièrement compte du sentiment national de la population ukrainienne et
expliquez partout que ces exagérations sont une conséquence de la politique de
Moscou ”[92]! Bien plus, Tchernov raconta à la cour qu´il
avait aussi reçu mission de, lors de ces voyages à l´Allemagne, ”crée une
organisation des droitiers avec les personnes de ma connaissance, si tant est
que j’en eusse parmi les collaborateurs de
Ce que fit Tchernov lors de son arrivée en Allemagne. La
directive de Tchernov dans ce cas précis, ”s’agissait, par l’intermédiaire des
parties de
L´agent
de l´Allemagne nazie
Mais les activités de Tchernov prirent subitement une
tournure différente. Un des membres du bloc de droite qui travaillait même pour
les services de sécurité nazis, parla des activités de conspiration de Tchernov
au profit des services de sécurité allemands. Tchernov fut mis devant le choix
de soit commencer à travailler pour l´Allemagne ou être dénoncé auprès des
autorités soviétiques. Il raconta devant la cour qu´il avait accepté la mission
de travailler pour l´Allemagne. Il commença de manière régulière à pourvoir la
police allemande des informations secrètes sur la production agricole et
industrielle ainsi que d´exécuter les missions de sabotage exigées par la
police allemande. ”La directive essentielle que me donna alors le service
d’espionnage allemand”, confia Tchernov à la cour, ”consistait à organiser la
détérioration des grains dans le pays. Pour cela, il fallait retarder la
construction des dépôts et des élévateurs, en vue de provoquer une
disproportion entre les stockages qui allaient croissant et la capacité des dépôts,
et obtenir, par cela même, comme disait Scheffer, deux choses :
premièrement, la détérioration des grains mêmes et, deuxièmement, provoquer le
mécontentement des paysans, ce qui serait inévitable, s’ils voyaient que les
grains étaient gâtés. Il fallait également organiser l’infestation massive des
greniers à blé par les insectes nuisibles, en particulier par les charançons”
et ”exigeait surtout qu’on organisât l’infestation par les insectes nuisibles
et par les charançons des réserves destinées à la mobilisation”[96].
Tout cet horrible travail de sabotage a été fait par Tchernov pour les
Allemands et a causé de grandes pertes pour l´Union Soviétique. Imaginez que
Tchernov était l´un des hauts fonctionnaires du parti dans le domaine de l´agriculture
pendant de nombreuses années.
Sabotage
dans l´agriculture
Tchernov parla aussi d´autres aspects de ses activités
contre-révolutionnaires. Il s´agissait entre autres de ”en ce qui concerne les
semences, embrouille les choses” en ”mélanger les semences sélectionnées,
faire baisser ainsi le rendement des récoltes dans le pays”. ”Il s’agissait,
par une distribution irrationnelle des surfaces ensemencées, de placer la
paysannerie kolkhozienne dans une situation qui l’empêcherait pratiquement de réaliser
des assolements rationnels”. ”Ce qui devait”, selon Tchernov, ”entraîner une
diminution de la récolte dans le pays, et provoquer en même temps le
mécontentement des paysans”[97].
Pour les stations des machines et des tracteurs, ”la directive fut donnée de
mettre hors d’usage tracteurs, moissonneuses-batteuses, machines agricoles,
d’embrouiller les opérations financières de ces stations”[98].
Pour ce qui concerne l´élevage, la directive de Rykov visait entre autres
”égorger les reproducteurs de race, obtenir de plus grandes pertes de bétail.
Empêcher le développement de la base d’alimentation et utiliser surtout, pour
déterminer des pertes de bestiaux, l’infection artificielle du bétail par toute
sorte de bactéries”[99].
Tchernov était aidé dans son travail de sabotage par les
membres de l´organisation de droite dans tout le pays. Ils empêchaient
l´introduction des médicaments contre les épidémies en Sibérie de l´Ouest, ce
qui eut pour conséquence que la peste du printemps 1936 occasionna la perte de
25.000 chevaux. Les membres de la droite répandirent aussi des infections et
causèrent la peste des porcs à Leningrad et celles des territoires de Voronej,
de Azov et de
Zélenski,
Secrétaire du Comité du Parti de Moscou, président de Centrosoyouz[100]
Donnons un autre exemple des activités d´un traître.
Zélenski raconta lui-même au tribunal qu´il avait travaillé comme informateur au
sein des services de sécurité du temps du tsar et qu´il dénonçait ses camarades
du Parti Communiste pour l´argent. Il
était l´un de ceux qui avaient réussi à cacher son identité et continué à être
actif et à faire carrière au sein du Parti Communiste. Il avait été recruté à
l´organisation de Boukharine et de Rykov par Smirnov en 1929. Sa première
mission était de saboter la collectivisation en Asie du Centre. Il avait reçu
de Smirnov la mission de ”sauvegarder par tous les moyens l’exploitation rurale
cossue, sous-entendant par là les exploitations koulaks” dans le but ”freiner
par tous les moyens le développement du mouvement de collectivisation, freiner
et saboter l’édification kolkhozienne”[101].
La mission de Zélenski à Moscou fut de causer la
destruction des associations coopératives de Moscou et de Centrosoyouz où il
était président. (Centrosoyouz: Organisation soviétique centrale pour la
planification, le transport et la distribution de la production agricole, ainsi
que l´achat et la distribution des marchandises soviétiques et étrangères aux
producteurs agricoles. Centrosoyouz avait des sections dans toutes les
républiques de l´Union soviétiques et des subdivisions au niveau des villages).
L´objectif était ”la désorganisation de l’économie dans les branches qui
touchaient de plus près à la population : habitations, coopératives,
commerce, circulation des marchandises, etc.” afin de ”susciter le
mécontentement de la population en raison du mauvais fonctionnement du
ravitaillement”[102].
Zélenski raconta comment, en 1936, on
”organisaient des à-coups dans le commerce de sucre dans la région de Koursk”
où ”de nombreux magasins restèrent sans sucre durant une ou deux semaine”[103].
Zélenski parla d´un sabotage similaire mais à propos des cigarettes à
Leningrad, du pain en Biélorussie et du sel dans tout le pays.
Le
beurre qui déchira le cou et le ventre du peuple
Lorsque le procureur Vychinski posa une question directe
sur le sabotage du beurre qui fut organisé par le bloc de la droite et les
trotskistes, Zélenski nia d´abord en avoir eu connaissance. Mais comme beaucoup
de questions lui étaient posées sur cette affaire, il finit par débiter toute
l´histoire. L´organisation de la droite s´arrangeait pour faire fabriquer
seulement de le beurre de qualité supérieure et cela de manière périodique et à
des prix très élevés. Ce qui créa un grand mécontentement dans la population.
Mais ce fut pire que cela. En effet, pour se rassurer de provoquer réellement
la colère dans la population, l´organisation de la droite mélangeait les verres
et les clous dans le beurre ”qui déchiraient la gorge et l’estomac du
peuple”. Zélenski était responsable de ces sabotages et même du sabotage contre
les oeufs. Selon Zélenski, la droite avait réussi ”en 1936, on laissa, par
sabotage, se détériorer 50 wagons d’oeufs” et laisser Moscou sans oeufs. Le
slogan était ”saboter par tous les moyens”[104].
Le
parti travailliste anglais favorable au coup d´État
Imaginez que Zélenski était président de Centrosoyouz et
que sa mission était de fournir les biens de consommation et d´autres bien de
première nécessité à la population. Zélenski raconta aussi à la cour
l´organisation ”immobiliser les marchandises en les répartissant d’une façon
irrationnelle et inopportune. C’est ainsi, par exemple, qu’il y eut des cas où
l’on expédia en hiver des marchandise d’été et en été, au contraire, des
marchandises d’hiver”[105],
par exemple, les bottines en feutre en été, et les souliers d´été en
hiver. Pour le reste, l´activité
contre-révolutionnaire de Zélenski s´étendait au détournement de l´argent de la
grande organisation qu´était Centrosojus et à l´utilisation des diverses
directions régionales de l´organisation comme centres des activités
contre-révolutionnaires secrètes. Zélenski utilisait aussi sa position de président
de Centrosojus pour entretenir des contacts avec le parti travailliste anglais
et solliciter de l´aide en vue de l´organisation du coup d´État en Union
Soviétique. Le parti travailliste accueillit favorablement cette idée du coup
État contre-révolutionnaire et offrit des crédits pour sa réalisation.
Ivanov,
Secrétaire adjoint du Comité régional du Parti au Caucase du Nord[106]
Les récits de Tchernov et Zélenski devant la cour
constituent des crimes horribles contre le peuple travailleur de l´Union soviétique.
Pour autant, ces crimes ne constituent qu´une petite partie de ceux commis par
l´organisation dirigée par Boukharine et Rykov. Un autre accusé, Ivanov,
deuxième secrétaire du parti en Caucase du Nord, détailla à l´intention de la
cour la mission qu´il avait reçu de Boukharine, celle ”de commencer à préparer,
à l’aide des organisations des droitiers, la défaite du pouvoir soviétique lors
de l’intervention, lors de la guerre avec les États capitalistes fascistes” et
dans ce sens, ”avec votre organisation de Parti, apporter toute l’aide possible
au résident qui sera là-bas, de manière à satisfaire les besoins du service
d’espionnage anglais”. Ivanov accomplit sa mission conformément aux
instructions de Boukharine et découvrit que ”d’ailleurs, ces instructions
provenant du service d’espionnage anglais coïncidaient entièrement avec les
directives que je recevais du centre des droitiers”[107].
Selon Ivanov, Boukharine parlant des intérêts de
l´Angleterre en Caucase du Nord, ”il disait que le centre des droitiers avait,
avec ce pays, un accord d’assistance aux droitiers pour le renversement du
pouvoir soviétique et le maintien du pouvoir usurpé par les droitiers”. ”Cet
accord garantissait les intérêts des industriels anglais par les exploitations
forestières du Territoire du Nord”. Selon Ivanov, Boukharine avait déclaré
qu’il ”faut remettre les scieries en concession aux Anglais, et les nouvelles
scieries qui ont été construites par le pouvoir soviétique, doivent être
livrées au compte des dettes tsaristes”. Et que Boukharine ”considérait” depuis
1934, ”que dorénavant il fallait tout de même commencer réellement à nous
acquitter… Il dit que nous devions donner des acomptes à la bourgeoisie
anglaise, afin de ne pas perdre son appui, ni sa confiance”. Conformément à
ses indications de Boukharine ”les mesures suivantes furent prises par
l’intermédiaire de Rosengolz et de Lobov. Les bois de la plus haute qualité
étaient vendus à des prix inférieurs. L’État soviétique a subi de ce fait un
préjudice de quelques millions de roubles or”[108].
Terreur
en Caucase du Nord
Ivanov raconta aussi à la cour qu´il avait reçu de la
part de Boukharine la mission de créer un groupe de terreur en Caucase du Nord.
Après la mort de Kirov, Boukharine avait dit à Ivanov que ”que les actes terroristes
isolés ne donnent pas de résultats, qu’il fallait préparer des actes
terroristes en masse et qu’alors seulement nous aurions des résultats. Sa ligne
visait à supprimer les dirigeants du Parti”. Si cela ne marche pas avant
l´imminente guerre contre l´Allemagne, ”nous le ferions alors pendant la
guerre, ce qui jetterait un grand trouble, ruinerait la capacité de défense du
pays et contribuerait considérablement à la défait du pouvoir soviétique dans
la guerre contre les impérialistes”. Le groupe de terreur de Ivanov travaillait
à partir de Arkhangelsk, ”de manière à couper les communications de cette ville
avec les lignes centrales de notre pays, au moment de l’intervention, afin de
faciliter aux Anglais la mainmise sur cette région forestière et ce port très
important”[109].
Le groupe terroriste de Ivanov organisa aussi le sabotage
contre la sylviculture en Caucase du Nord dans le but ”à faire échec au
rèoutillage de l’économie forestière, à encrasser, à détériorer les mécanismes,
à saboter le flottage du bois” de telle sorte que le manque du bois
augmenta dans le pays. Bien plus, le groupe se chargea aussi ӈ saboter le
réoutillage des exploitations forestières, les grands travaux de construction
et surtout l’industrie du papier et de la cellulose pour maintenir dans le pays
la disette du papier et porter de la sorte un coup à la révolution culturelle,
à saboter la fourniture du pays en cahiers et provoque ainsi le mécontentement
des grandes masses”[110].
Mais Ivanov commença petit à petit à douter des possibilités de gagner cette
guerre, ce qu´il fit savoir à Boukharine. ”Je dis à Boukharine que notre
organisation se désagrège … que les masses elles-mêmes démasquent nos
partisans, et je posais la question de savoir si, en raison de la situation qui
s’était créer à l’intérieur du pays, il ne s’ensuit pas que nous faisons
entièrement fiasco … Toute l’organisation vivait dans les transes, je
dirais que toutes l’activité des droitiers était en somme à la veille d’être
complètement démasquée”[111].
Boukharine
s´exprime sur l´interrogatoire de Ivanov
La reconnaissance par Ivanov de ses crimes étaient en
même temps une très sérieuse accusation contre Boukharine qui n’était assis
loin de sa chaise dans la salle d´audiences du tribunal. Le procureur Vychinski
se tourna vers Boukharine pendant l´interrogatoire de Ivanov et en profita pour
lui poser des questions, pour qu´il puisse affirmer ou démentir les
déclarations que Ivanov avait faites.
”Vychinski – L’accusé Ivanov a déclaré que vous lui avez proposé
de crée au Caucase du Nord une organisation des droitiers ayant des tâches
déterminées. Le confirmez-vous aussi ?
Boukharine – Il y a ici une confusion de dates.
Vychinski – Tout d’abor confirmez-vous le fait
même ?
Boukharine – Je confirme que je lui ai donné des
indications au sujet de la constitution d’une organisation.
Vychinski – Organisation conspirative ?
Boukharine – Conspirative, illégale,
contre-révolutionnaire. Mais dans cette période l’acuité de la lutte contre le
Parti et le pouvoir soviétique ne prenait pas les formes qui…
Vychinski – Ce qui m’intéresse c’est la déclaration de
l’accusé Ivanov que
Boukharine – Je confirme cette partie.
Vychinski – Par conséquent, en 1928 vous êtes entré dans
la voie de l’action clandestine illégale ?
Boukharine – C’était le moment d’une telle transition…
Vychinski – Je ne vous demande pas quand cela se passait,
mais si le fait est exact, oui ou non ?
Boukharine – Je le confirme.
Vychinski – Avez-vous dit alors à Ivanov que le centre de
l’organisation de droite fonctionnait déjà ?
Boukharine – Je l’ai dit.
Vychinski – Quelle était sa composition ?
Boukharine – Trois personnes : Tomski, Rykov et moi,
Boukharine.
Vychinski – Avez-vous dit que ce centre préparait le
renversement du pouvoir soviétique ?
Boukharine – Je l’ai dit, mais cela a trait à la période
suivante.
Vychinski – Laquelle précisément ?
Boukharine – Je pense que cela se rapporte à peu près à
1932-1933.
Vychinski – Donc un peu plus tard, mais confirmez-vous
avoir eu avec Ivanov un entretien de ce genre ?
Boukharine – Je le confirme. Je ne me souviens ni du
jour, ni du mois, mais c’était l’orientation générale du centre des droitiers.
…
Vychinski – Et quand avez-vous posé la question des
détachements insurrectionnels ?
Boukharine – Le passage aux mesures de violence se situe
vers l’année 1932.
…
Vychinski – Ivanov déclare avoir appris de vous
l’existence d’un bloc entre les trotskistes, les groupements de droitiers et
les groupes nationalistes. Vous le confirmez ?
Boukharine – Cela, je le confirme.
Vychinski – Étiez-vous informé des pourparlers qu’Ivanov
et les autres menaient avec les pays capitalistes ?
Boukharine – Oui, cela se rapporte à une période de
beaucoup plus récent.
Vychinski – Par conséquent, ces déclarations d’Ivanov sur
la liaison avec le service d’espionnage anglais…
Boukharine – En ce qui concerne le service d’espionnage
et les plans, je n’étais pas du tout au courant.
Vychinski – Et de quoi étiez-vous au courant ?
Boukharine – J’avais initié Ivanov à l’orientation
politique extérieure du centre des droitiers ; je lui disais que dans la
lutte contre le pouvoir des Soviets, on pouvait utiliser la conjoncture de
guerre et tous autres facteurs. En un mot j’étais tenu, comme un des dirigeants
du centre des droitiers, de faire connaître notre attitude à l’un des
dirigeants d’un centre de la périphérie. Quelle était cette attitude ? En
bref, elle admettait dans la lutte contre le pouvoir des Soviets, la
possibilité d’utiliser la conjoncture de guerre et telles ou telles concession
aux États capitalistes afin de les neutraliser et, parfois, pour en obtenir une
aide.
Vychinski – En d’autres termes, c’était s’orienter vers
l’aide de certains États étrangers ?
Boukharine – Oui, on peut le formuler ainsi.
Vychinski – En d’autres termes, c’était s’orienter vers
la défaite de l’U.R.S.S. ?
Boukharine – En somme, d’une façon générale, oui, je le
répète”[112].
L´interrogatoire
avec Boukharine
Voyons maintenant l´interrogatoire avec les trois
principaux accusés: Boukharine, Rykov et Yagoda. D´abord Boukharine, le
véritable leader idéologique du centre de droite qui, ensemble avec Rykov,
décidait de l´organisation pratique. Des falsificateurs de l´histoire ont
parfois prétendu que le procureur Vychinski était perdant dans la discussion
avec Boukharine, que Boukharine avait d´une manière éclatante utilisé le
tribunal pour propager ses idées politiques. C´est facile de faire tomber les
gens dans un tel piège, étant donné que peu de gens connaissent les
interrogatoires dont question ici. Documents à l´appui, jugez vous-mêmes.
Laissez-nous continuer à citer des extraits des PV du procès:
”Vychinski – Formulez brièvement de quoi exactement vous
vous reconnaissez coupable ?
Boukharine – Premièrement, d’avoir fait partie du
« bloc des droitiers et des trotskistes » contre-révolutionnaire.
…
Vychinski – Quels étaient les buts visés par cette
organisation contre-révolutionnaire ?
Boukharine – Elle se proposait comme but essentiel, à
proprement parler, sans peut-être, pour ainsi dire, s’en rendre suffisamment
compte, et sans mettre tous les points sur les « i », la restauration
des rapports capitalistes en U.R.S.S.
Vychinski – Le renversement du pouvoir des Soviets ?
Boukharine – Le renversement du pouvoir des Soviets était
le moyen d’atteinte ce but.
Vychinski – Par quelle voie ?
Boukharine – Comme on sait…
Vychinski – Par la voie d’un renversement violent ?
Boukharine – Oui, par la voie du renversement violent de
ce pouvoir.
Vychinski – A l’aide de…
Boukharine – En utilisant toutes les difficultés qui se
rencontrent dans le chemin du pouvoir des Soviets, et particulièrement
utilisant la guerre dont les pronostics dressaient la perspective.
Vychinski – Dont les pronostics dressaient la
perspective, avec l’aide de qui ?
Boukharine – Avec l’aide des États étrangers.
Vychinski – A quelles conditions ?
Boukharine – A des conditions qui, s’il faut parler
concrètement, prévoyaient de nombreuses concessions.
Vychinski – Y compris…
Boukharine – Y compris des cessions de territoires.
Vychinski – C’est-à-dire ?
Boukharine – S’il faut mettre tous les points sur les
« i », à la condition du démembrement de l’U.R.S.S.
Vychinski – Du détachement de l’U.R.S.S. de régions et de
républiques entières ?
Boukharine – Oui.
Vychinski – Un exemple ?
Boukharine – De l’Ukraine, de
Vychinski – Au profit de qui ?
Boukharine – Au profit des États intéressés qui,
géographiquement et politiquement…
Vychinski – Quels États exactement ?
Boukharine – Au profit de l’Allemagne, au profit du Japon
et, partiellement, de l’Angleterre”[113].
Boukharine raconta aussi au cours du procès qu´il avait
appris de Radek, au cours de l´été 1934, ”que des directives étaient parvenues
de Trotski, que Trotski était en pourparlers avec les Allemands et qu’il leur
avait déjà promis certaines concessions territoriales, entre autres l’Ukraine”[114].
Le
meurtre de Kirov
Le procureur Vychinski aborda aussi la question des
attentats contre des camarades leaders du parti.
”Vychinski – Le bloc
s’orientait-il vers l’organisation d’actes terroristes, vers
l’assassinat de dirigeants du Parti et du Gouvernement soviétique ?
Boukharine – Oui, et je pense qu’il convient de dater
cette organisation à peu près de l’automne de 1932.
Vychinski – Et quelle a été votre attitude envers
l’assassinat de Serguéï Mironovitch Kirov ? Cet assassinat a été également
accompli au su et sur les indications du « bloc des droitiers et des
trotskistes » ?
Boukharine – Je n’en étais pas informé.
Vychinski – Je vous demande : cet assassinat a-t-il
été accompli au su et sur les indications du « bloc des droitiers et des trotskistes » ?
Boukharine – Et moi je répète que je n’en étais pas
informé, citoyen Procureur.
Vychinski – Vous n’étiez pas informé spécialement à
propos de l’assassinat de S. M. Kirov ?
Boukharine – Non pas spécialement, mais…
Vychinski – Permettez-moi d’interroger l’accusé
Rykov ?
Le Président – Je vous en prie.
Vychinski – Accusé Rykov, que savez-vous de l’assassinat
de Serguéï Mironovitch Kirov ?
Rykov – Je n’ai connaissance d’aucune participation des
droitiers ni de la fraction de droite du bloc dans l’assassinat de Kirov.
…
Vychinski – Étiez-vous en liaison avec Énoukidzé ?
Rykov – Avec Énoukidzé ? Très peu.
Vychinski – Était-il membre du « bloc des droitiers
et des trotskistes » ?
Rykov – Oui, depuis 1933.
Vychinski – Quelle partie représentait-il dans ce
bloc ? La partie trotskiste ou la partie de droite, de quel côté
penchait-il ?
Rykov – Je suppose qu’il représentait la partie de
droite.
Vychinski – C’est bien, asseyez-vous, s’il vous plaît.
Permettez-moi d’interroger l’accusé Yagoda. Accusé Yagoda, saviez-vous que
Énoukidzé dont vient de parler à l’instant l’accusé Rykov, représentait la
partie droite du bloc et avait un rapport direct avec l’organisation de
l’assassinat de Serguéï Mironovitch Kirov ?
Yagoda – Rykov et Boukharine ne disent pas la vérité.
Rykov et Énoukidzé ont pris part à la séance du centre où fut examinée la
question de l’assassinat de S. M. Kirov.
Vychinski – Les droitiers avaient-ils un rapport
quelconque à cet égard ?
Yagoda – Un rapport direct, puisque le bloc était celui
des droitiers et des trotskistes.
Vychinski – Les accusés Rykov et Boukharine, notamment,
avaient-ils un rapport avec cet assassinat ?
Yagoda – Un rapport direct.
Vychinski – Aviez-vous un rapport quelconque avec cet
assassinat, en tant que membre du « bloc des droitiers et des
trotskistes » ?
Yagoda – Oui.
Vychinski – Boukharine et Rykov disent-ils la vérité
maintenant, quand ils prétendent avoir ignoré la chose ?
Yagoda – Cela ne peut pas être parce que, quand Énoukidzé
m’a informé qu’ils avaient, c’est-à-dire que le « bloc des droitiers et
des trotskistes » avaient décidé, en séance commune, d’accomplir en acte
terroriste sur la personne de Kirov, j’ai protesté catégoriquement”[115].
Des
contre-révolutionnaires amers
La dénonciation par Yagoda de Boukharine et de Rykov
comme complices du meurtre de Kirov en décembre 1934 rencontra un silence total
de la part de ceux-ci. Ils savaient que l´ex-chef de la police secrète, Yagoda,
avait tous les détails entourant le meurtre de Kirov et ne voulaient pas
continuer une discussion qui allait seulement démontrer leur grande complicité
dans le meurtre.
Vychinski aborde par la suite la question de savoir pourquoi
le bloc de la droite et des trotskistes avait mené cette lutte criminelle
contre l´Union soviétique.
”Boukharine – … je
suis un accusé qui doit porter la responsabilité comme un criminel placé devant
le tribunal du pays prolétarien. …
…
Vychinski – Dites-nous, accusé Boukharine, comment tout
cela a pris pratiquement chez vous la
forme d’une activité antisoviétique ?
Boukharine – Si l’on veut formuler pratiquement ma plate-forme
programme, ce sera en ce qui concerne l’économie : le capitalisme d’État,
le moujik aisé, ménager de son bien, la réduction des kolkhoz, les concessions
étrangères, l’abandon du monopole du commerce extérieur et, comme résultat, la
restauration du capitalisme dans le pays.
Vychinski – A quoi se ramenaient vos buts ? Quel
pronostic général donniez-vous ?
Boukharine – Notre pronostic se ramenait à ceci, que le
pays donnerait fortement de la bande vers le capitalisme.
Vychinski – Et le résultat ?
Boukharine – Et le résultat a été tout autre.
Vychinski – Et le résultat a été la victoire complète du
socialisme.
Boukharine – Oui, la victoire complète du socialisme.
Vychinski – Et la faillite complète du votre
pronostic ?
Boukharine – Et la faillite complète de notre pronostic”[116].
Conspiration
contre Lénine, Staline, et Sverdlov en 1918
Pendant l´interrogatoire de Boukharine, il eut de
nouvelles accusations contre lui, accusations dont le procureur Vychinski
déclara qu´elles ”rendaient les coupables responsables sinon même pas devant
Le procureur Vychinski souleva cette affaire lors de
l´interrogatoire avec Boukharine et demanda à celui-ci s´il avait été partisan
de l´emprisonnement de Lénine. Après hésitation, Boukharine répondit qu’ ”On
avait parlé pour la première fois de l’arrêter pour 24 heures”. Vychinski
continua:
”Vychinski – Je vous demande : aviez-vous en 1918 un
plan d’arrestation du camarade Staline ?
Boukharine – Pas de Staline, il y avait un plan
d’arrestation de Lénine, Staline et Sverdlov.
Vychinski – Et à propos de l’assassinat des camarades
Staline, Lénine et Sverdlov ?
Boukharine – En aucun cas”[117].
Le procureur Vychinski demanda alors au tribunal
d´appeler les témoins Iakovléva, Ossinski et Mantsev, trois anciens membres
actifs dans la fraction de Boukharine d´alors (1918), les soi-disant
communistes de gauche ainsi que Karelin, et Kamkov, deux anciens membres du
Comité Central des socialistes-révolutinnaires de ”gauche”. Selon Vychinski,
une conspiration avait été organisée en 1918 par ”les communistes de gauche” de
Boukharine, les socialistes-révolutinnaires ”de gauche” et le groupe de Trotski
pour empêcher la paix à Brest. Trotski qui était responsable des négociations
avec les Allemands refusa de signer l´accord de paix et proclama la théorie du
”Ni guerre ni paix”. Ceci après une longue et terrible première guerre
mondiale, lorsqu´une continuation de la guerre n´était pas possible, entre
autre parce que l´armée tsariste était écrasée et que l´armée rouge n´existait
pas.
Préparait
le coup État
Le refus de Trotski de signer l´accord de paix amena les
Allemands à continuer à avancer en Russie. Lénine réussit, au cours du débat au
Comité Central, à isoler Trotstki et Boukharine et à amener le Comité Central à
reconnaître l´accord de paix. Mais l´opposition ne voulait pas accepter cette
décision et la politique de Lénine, elle préparait un coup État Le Comité
Central savait que quelque chose se préparait pour lutter contre la proposition
de Lénine mais n´avait ni le temps ni la tranquillité nécessaires pour essayer
de comprendre les intrigues de l´opposition. Au cours des enquêtes sur la
droite et le centre des trotskistes, toute l´histoire fut révélée au public.
Vychinski choisit de soulever cette affaire pendant le procès malgré le fait
que l´affaire avait été prescrite.
Tous les témoins racontèrent qu´un complot des groupes de
Boukharine et de Trotski, ensemble avec la gauche -les socialistes-révolutionnaires,
avait préparé l´emprisonnement de Lénine, Staline et Sverdlov ainsi qu´un
changement du gouvernement. Bien plus, ces groupes s´étaient convenus qu’ ”en cas d’aggravation ultérieure de la
lutte il ne fallait pas même reculer devant leur suppression physique”[118]. En
pointe du complot se trouvait Boukharine, son principal organisateur et
inspirateur. Boukharine reconnut ceci devant le tribunal mais déclara qu´aucune
décision sur ce qu´il fallait faire avec les détenus n´avait pas été prise.
Nous reproduisons ci-après l´échange entre Vychinski et Boukharine sur la
question de savoir qui les conspirateurs entendaient emprisonner.
Qui
devrait être emprisonné?
”Boukharine – Lénine, Staline et Sverdlov.
Vychinski – Pour 24 heures également ?
Boukharine – On ne s’était pas servi de cette formule, à
l’époque.
Vychinski – Et comment arrêter, pour quel but ?
Boukharine – Pour former un nouveau gouvernement.
Vychinski – Et que devait-on faire de ceux qui auraient
été arrêtés ?
Boukharine – Il n’a pas été question de suppression
physique.
Vychinski – Mais elle n’était pas exclue ?
Boukharine – Au contraire, tout le monde pensait qu’il
fallait à tout prix assurer la sauvegarde de ces personnes.
Vychinski – Lorsqu’on renverse un gouvernement et qu’on
le met en état d’arrestation, use-t-on de procédés violents ?
Boukharine – Oui.
Vychinski – Et vous vous proposiez d’user de procédés
violents au moment de l’arrestation ? Est-ce exact ou non ?
Boukharine – C’est exact.
Vychinski – Mais en quoi consistent les procédés
violents ? Avez-vous défini cela exactement ?
Boukharine – Non, nous ne l’avons pas défini.
Vychinski – Par conséquent, vous aviez décidé d’agir
comme le permettraient et le commanderaient les circonstances ?
Boukharine – C’est parfaitement exact.
Vychinski – Mais les circonstances peuvent commander
d’agir très énergiquement.
Boukharine – Oui, mais c’est que les « communistes
de gauches » ne se plaçaient pas non plus au point de vue du fatalisme,
ils tenaient compte des circonstances. Il ne s’ensuit pas que les circonstances
leur dictent n’importe quoi.
Vychinski – Bornons-nous, pour le moment, à établir les
faits indiscutables. Avant la paix de Brest-Litovsk il y eut un entretien en
vue de l’arrestation de Vladimir Ilitch Lénine ; après la paix de
Brest-Litovsk, il eut des pourparlers en vue de l’arrestation de Lénine, de
Staline, de Sverdlov et du renversement violent du Gouvernement. Est-ce
exact ?
Boukharine – C’est exact pour l’essentiel.
Vychinski – Et lorsqu’on parlait du renversement violent
du pouvoir des Soviets et de l’arrestation des camarades Lénine, Staline et
Sverdlov, il était question précisément des méthodes violentes, sans stipuler
quelles seraient ces méthodes ?
Boukharine – C’est exact ; il était dit seulement
qu’il fallait à tout prix assurer leur sauvegarde.
Vychinski – Témoin Iakovléva, que direz-vous à ce
sujet ? Boukharine dit-il la vérité ?
Iakovléva – Je n’ai pas assisté à ses entretiens avec les
socialistes-révolutinnaires « de gauche ».
Vychinski – Que vous a-t-il dit ?
Iakovléva – Il a dit que cette éventualité n’était pas
exclue.
Vychinski – Qu’est-ce que c’est que cette
éventualité ?
Iakovléva – Que l’éventualité de la suppression physique,
c’est-à-dire de l’assassinat, n’était pas exclue”[119].
Le témoin Iakovléva, l´un des proches camarades de
Boukharine en 1918 était assez sûr de l´évolution des événements et de tout ce
qui avait été discuté.
L´interrogatoire
de Rykov
Dans tout le centre de l´organisation de la droite qui
était composé de Boukharine, Rykov, et
Tomski, Rykov était le principal organisateur des activités concrètes. Rykov
commença sa conspiration secrète contre le gouvernement soviétique en 1928. Il
recruta des fonctionnaires du parti de haut rang comme Yagoda, Antipov, Rasumov
et Roumiantsev à l´organisation contre-révolutionnaire sans que ces derniers se
déclarassent ouvertement partisans du parti de droite. Rykov révéla au tribunal
comment lui et son meilleur ami Boukharine (qui était assis à ses côtés)
étaient actifs dans l´organisation de la révolte des paysans propriétaires en
Caucase et en Sibérie où ils envoyaient des saboteurs de la droite. Boukharine
fut obligé de reconnaître tous ces faits au cours du procès. Aussi bien Rykov
que Boukharine reconnurent qu´à partir de 1932, leur travail
contre-révolutionnaire s´était transformé en travail de haute trahison. Selon
Rykov, ”Les tendances au terrorisme avaient, que je sache, commencé à croire
dès avant
Une
alliance avec les socialistes-révolutionnaires
”Rykov – Ces positions une fois adoptées, on arrêta
aussitôt les mesures pratiques qui s’imposaient, c’est-à-dire qu’il se
constitua un assez grand nombre de groupes terroristes. J’ai donné moi-même
tout un ensemble de directives terroristes, non seulement à ceux qui m’étaient
proches, comme Nestérov, Radine, mais à beaucoup d’autres. En outre, j’ai
transmis ces directives à des organisations nationalistes pan-turke et
biélorussienne. Bientôt les directives terroristes avec les conséquences qui en
découlaient furent adoptées sur une vaste échelle. A part ces entretiens-là,
j’en ai eu bien d’autres. Nestérov m’informa par la suite que dans l’Oural, à
Sverdlovsk, une organisation avait été crée d’après mes indications.
Plus récemment encore, en 1935, j’eus un entretien sur le
terrorisme avec Kotov, membre dirigeant de l’organisation des droitiers de
Moscou. Vers 1934, j’ai chargé mon ancienne secrétaire Artémova de surveiller
les automobiles gouvernementales.
Des mesures analogues furent prises aussi par les autres
membres de notre organisation contre-révolutionnaire. Mais nous n’avons jamais
de décision stipulant que tel ou tel membre du Gouvernement devait être
assassiné. Le centre de l’organisation des droitiers n’a pas pris une telle
décision, mais le travail consistait à déterminer une attitude envers le
terrorisme et un état des cadres terroristes tels qu’au moment où le centre
prendrait cette décision, celle-ci puisse être mise à exécution. Pendant la
même période une liaison fut établie, dans la question du terrorisme, avec le
socialiste-révolutionnaire Séminonov, par le truchement de Boukharine.
Personnellement je ne connaissais pas Semionov. Boukharine déclara préparer par
l’intermédiaire de Sémionov un attentat contre Staline”[121].
Le procureur Vychinski voulait obtenir une confirmation
de cette déclaration de la part de Boukharine.
”Vychinski – Donc, en 1932, il a été question entre
Semionov et vous qu’il fallait organiser en attentat contre le camarade Staline
et le camarade Kaganovitch.
Boukharine – Je n’ai pas dit qu’il fallait, je dis ce qui
était.
Vychinski – Je dis qu’en 1932 il a été question entre
vous qu’il se préparait un attentat contre le camarade Staline et le camarade
Kaganovitch.
Boukharine – Si l’on émet cette formule, la chose
prend un caractère absolument concret.
Vychinski – Très concret.
Boukharine – Il était alors question d’actes terroristes
contre les dirigeants du Parti.
Vychinski – Était-ce un entretien théorique ?
Boukharine – Non, l’organisation de groupes n’est pas un
entretien théorique.
Vychinski – Quel était donc le sujet de
l’entretien ?
Boukharine – On parla de plans terroristes visant à
organiser les préparatifs de l’exécution de ce plan contre les membres du
Bureau Politique ?
Vychinski – Y compris ?
Boukharine – Y compris contre Staline et Kaganovitch.
Vychinski – Mais cela est parfaitement concret.
Boukharine – Parfaitement. Je voulais déchiffrer et
désire les choses telles qu’elles sont puisqu’elles correspondent exactement à
la réalité.
Vychinski – Je demande à
Le Président – Je vous en prie.
Vychinski – Folios 105-106. Interrogé par le Procureur de
l’U.R.S.S., vous avez déclaré, accusé Boukharine, le 1 :er décembre :
« Je veux dire la vérité et je déclare, que cette proposition (il était
question plus haut de la proposition de Semionov), a été exposée par moi à une
séance du centre, et nous avons résolu de charger Semionov d’organiser des
groupes terroristes. »
Boukharine – C’est cela.
Vychinski – C’est exact ?
Boukharine – C’est exact.
Vychinski – Cela se rapporte justement à l’année
1932 ?
Boukharine – Parfaitement.
Vychinski – Ainsi, en 1932, sur décision du centre des
droitiers, vous avez chargé Semionov d’organiser un groupe terroriste. Est-ce
bien cela ?
Boukharine – C’est cela.
Vychinski – Dans quel but l’avez-vous chargé d’organiser
un groupe terroriste ?
Boukharine – Pour accomplir des actes terroristes.
Vychinski – Contre qui ?
Boukharine – Contre les membres du Bureau Politique.
Vychinski – Y compris ?
Boukharine – Y compris contre Staline”[122].
Rykov aborda aussi pendant l´interrogatoire la question
de la collaboration avec les Nazis.
”Rykov – Des hommes qui persistent dans leur lutte contre-révolutionnaire,
recourent aux mesures, aux procédés, aux alliés qui nous serviront dans la
période consécutive à l’année 1933. J’entends les relations du
« centre » avec les fascistes allemands. Il est naturel que dans
cette question nous ayons cherché – que j’aie cherché moi-même – à atténuer un
peu nos déclarations, car c’est là une bien vilaine chose. Nous avons présenté
la question de façon à faire croire que nous n’avions préalablement discuté, au
centre, de ces liaisons. Or voici ce qui est advenu, en réalité :
l’initiative émanait de Tomski, Boukharine et moi, nous l’avions appris plus
tard. Mais ce sont là des considérations de pure forme, parce que ni moi ni
Boukharine nous n’avons pas hésité une minute sur la question de savoir si Tomski
avait bien agi. S’il nous avait interrogés, nous aurions dit : il le faut”[123].
Le
centre de contact
Une autre question très importante que le procureur
discuta avec Rykov était de savoir qui faisaient partie du bloc de la conspiration,
le soi-disant centre de contact.
”Vychinski – Ce bloc était composé, avez-vous dit, de
droitiers. Qui encore en faisait partie ?
Rykov – Les droitiers, les trotskistes et les
zinoviévistes”.
Le procureur Vychinski veut avoir la question confirmée
par l´accusé Krestinski.
”Vychinski – Accusé Krestinski, saviez-vous que les
trotskistes faisaient partie du « bloc des droitiers et des
trotskistes », dont il est question ici ?
Krestinski – Je savais par Piatakov, qui m’en avait parlé
en février 1935, qu’une organisation s’était formée groupant les droitiers, les
trotskistes et des militaires, et dont le but était de préparer un coup d’État
militaire. Je savais aussi que le centre dirigeant était composé comme
suit : du côté des droitiers, Rykov, Boukharine, Roudzoutak et
Yagoda ; du côté des militaires, Toukhatchevski et Gemarnik ; du côté
des trotskistes, Piatakov.
…
Vychinski – Vous-même, faisiez-vous partie de ce
centre ?
Krestinski – En 1937, à la suite d’un certain nombre
d’arrestations, faisaient partie de ce centre : Rosengolz et moi, du côté
des trotskistes ; Roudzoutak et Yagoda, du côté des droitiers ;
Toukhatchevski et Gemarnik, du côté des militaires”[124].
Une
alliance avec Toukhatchevski
Dans la suite de l´interrogatoire, Rykov confirma l´alliance
avec les militaires et raconta aussi que le groupe militaire de Toukhatchevski
”s’assignait pour but d’utiliser la guerre afin de renverser le Gouvernement”
et ”à propos de l’ouverture du front” pour l´Allemagne et l´utilisation de la
défaite pour prendre le pouvoir. Rykov raconta aussi que les plans avaient été
discutés au sein du centre pour permettre la cession de
Le procureur Vychinski se tourna vers Boukharine et posa
la question de savoir quels militaires devaient ouvrir le front. Boukharine
répondit: ”Toukhatchevski, Kork, si je ne me trompe, et puis des trotskistes”.
A une question de Vychinski, Krestinski répondit que Toukhatchevski lui avait
dit qu´il s´appuyait sur ”Yakir, Ouborevitch, Kork et Eideman”[125].
Pendant l´interrogatoire avec Rykov, le président de la
cour Ulrich posa une question sur l´existence des provocateurs dans les
organisations communistes. Rykov confirma qu´il était vrai que l´organisation
de droite de Biélorussie, en collaboration avec l´état-major polonais, avait
frauduleusement introduit des provocateurs dans les organisations communistes
étrangères.
A chaque interrogatoire, on obtient une image de plus en
plus claire de la trahison du pays que la droite était entrain d´organiser. Ils
ne voulaient pas accepter une défaite politique et passèrent du combat contre le socialisme à la
contre-révolution. Rykov lui-même avait été une fois président du conseil des
commissaires du peuple, donc premier ministre de l´Union Soviétique.
Yagoda
et le meurtre de Maxim Gorki
L´interrogatoire de Yagoda, ancien chef de la police
secrète OGPU, révéla des crimes terribles. Yagoda avait rejoint les
organisations secrètes de Rykov et de Boukharine en 1928 par l´intermédiaire de
Rykov avec qui il avait des relations amicales. Yagoda était alors chef adjoint
de la police secrète OGPU (plus tard NKVD) et avait pour ainsi dire des
possibilités extraordinairement bonnes pour protéger l´organisation de la
droite de la découverte et de l´arrestation ainsi même que celles de nommer ses
hommes aux postes de responsabilité. Ces possibilités avaient été sérieusement
utilisées par Yagoda. Par son poste de chef de la garde du Kremlin, avec des
troupes de commandement sous son commandement, Yagoda était devenu l´une des
personnalités clés dans le coup d´État qui avait été planifié.
A l´instar des autres membres de l´organisation de
droite, Yagoda reconnut qu´il avait planifié et réalisé le sabotage,
l´espionnage et les attentats pour renverser le gouvernement de l´Union
Soviétique et réinstaurer le capitalisme. Yagoda reconnut aussi qu´il avait
même volé des grosses sommes d´argent qu´il avait remises à Trotski et qu´il
avait été complice du meurtre de Kirov. Ce qui différencie le cas de Yagoda des
autres est le genre d´attentats et de meurtres qui furent commis sous sa
direction. Yagoda utilisait son pouvoir pour obliger certains docteurs et
d´autres personnes, à travers des menaces et des pressions, à poser des actes
criminels et à tuer Maxim Gorki, son fils Maxim Pechkov, le membre du Bureau
politique Kuibyshev et son propre chef, le président de OGPU, Menjinski. Les
médecins qui avaient commis le meurtre de Lénine, le médecin de famille de
Gorki, Plétnev, le conseiller médical de Lévin; Kazakov, le médecin de famille
de Menjinski; et Vinogradov, un autre complice de Lévine, déjà mort de causes
naturelles avant le début du procès. Tous les autres complices de ces meurtres
étaient le secrétaire de Yagoda, Boulanov, le secrétaire de Gorki, Krioutchkov,
et le secrétaire de Kuibyshev, Maximov.
Trotski
contre Gorki
A l´origine, la menace contre Gorki vint de Trotski.
Gorki prit une position très forte contre Trotski qu´il classait comme un politicien
aventurier. Trotski n´avait aucune possibilité de gagner la sympathie de Gorki
pour la lutte contre le gouvernement soviétique. Gorki soutenait énergiquement
la construction socialiste et avait des relations amicales avec Staline. Personne ne pouvait changer cette situation
même si plusieurs traîtres avaient par le passé été proches de Gorki et
cherchaient à gagner sa sympathie. Zinoviev et Kamenev et même Tomski avaient
tenté de le faire. Gorki était une menace contre la contre-révolution. Il avait
de très bons contacts parmi les intellectuels dans beaucoup de pays en Europe
et en cas de coup État, il aurait usé de toute son autorité pour condamner les
contre-révolutionnaires. C´est pourquoi le centre de la droite et des
trotskistes décidèrent de tuer Gorki. C´était une exigence de Trotski.
Krioutchkov, le secrétaire de Gorki, raconta à l´audience
que Yagoda avait reçu mission de tuer le fils de Gorki, Maxim Pechkov pour
déstabiliser Gorki et faire de lui ”un vieillard sans valeur”. Yagoda attira
Krjutjov avec la possibilité de faire de lui l´héritier des biens de Gorki.
C´était la première phase. Krjutjov entraîna Pechkov à l´ivrognerie permanente
avec des vins qu´il recevait de Yagoda. Un organisme faible laissa bientôt
place à la maladie. Ce qui donna la possibilité aux médecins Lévine et
Vinogradov d´examiner Pechkov et de prescrire des médicaments qui aggravèrent
sa maladie et qui finalement causèrent sa mort en mai 1934. Gorki fut très
touché mais il continua à être actif dans la défense de la révolution et du
socialisme. La mission suivante de Krioutchkov était de déstabiliser la santé
de Gorki de telle sorte que les médecins aient la chance de lui prescrire des
médicaments.
Maxim Gorki avait une turbeculose chronique depuis
l´enfance. La directive suivante que Yagoda confia à Krioutchkov fut de se
rassurer que Gorki soit enrhumé. Après plusieurs tentatives infructueuses, une
possibilité de faire tomber Gorki malade se présenta. Sur directive de Yagoda,
Krioutchkov amena Gorki alors en vacances à Tesseli au Kremlin, à retourner,
sous une ville de Moscou pluvieuse et froide, à sa maison où la veuve de
Pechkov habitait avec la fille de son fils. La petite de Gorki était très
fortement enrhumée et Gorki qui était très amoureux de sa petite-fille contacta
vite le rhume. Gorki tomba malade le 31 mai 1936. Ainsi se présentait la possibilité tant
attendue par les médecins Lévine et Plétnev de passer à l´action. Un mauvais
traitement de Gorki fit que la maladie s´aggrava jusqu´à devenir une inflammation
pulmonaire. Les médecins, pleins de regret, témoignèrent à l´audience sur le
traitement qu´ils avaient donné à Trotski, lequel traitement était destiné à le
tuer. Ce qu´ils réussirent à faire quelques semaines après qu´il fut tombé
malade. Gorki mourut le 18 juin 1936.
Plusieurs
meurtres
Maxim Gorki et son fils Maxim Pechkov n´étaient pas les
seules victimes de la conspiration de Yagoda, Boukharine et Rykov avec l´aide
des médecins. Même le membre du Bureau politique Kuibyshev et le président de
OGPU, Menjinski tombèrent victimes de cette conspiration. Le centre de la
droite voulait à travers Yagoda, tuer autant de dirigeants du Comité Central
que possible pour entraîner précipiter le manque des cadres et ainsi causer du
désordre. Le cas de Menjinski importe de signaler. En effet, sa mort joua un
grand rôle dans la promotion de Yagoda, qui avait plus de chance de lui
succéder, comme chef de OGPU. Menjinski qui souffrait du coeur, mourut des
médicaments lesquels avaient eu une influence préjudiciable sur le
fonctionnement de son coeur. Il mourut un jour avant la mort du fils de Gorki
Pechkov le 10 mai 1934. Ce traitement avait été organisé par Lévine et Kazakov.
Le meurtre du membre du Bureau politique Kuibyshev avait
été organisé par les médecins Lévine et Plétnev ainsi que le secrétaire de
Kuibyshev, Maximov. La maladie du coeur de Kuibyshev fut ignorée de manière
intentionnelle. Les médecins lui donnèrent de faux médicaments. Maximov eut la
mission ”dans le cas où la maladie s’aggraverait ou qu’il y aurait des crises,
il ne faudrait pas se précipiter pour appeler le médecin ; en cas de
besoin, on ne ferait venir que les médecins qui le soignaient”[126],
les docteurs Lévine et Plétnev. Un jour qu´il se trouvait à son bureau,
Kuibyshev se sentit mal à l´aise et devint pale. Maximov comprit que le moment
était venu. Il renonça à appeler les médecins et Kuibyshev fut obligé de
marcher seul jusque à sa maison, en montant même les escaliers y conduisant. La
conséquence de cet événement fut qu´il mourut d´une crise cardiaque un petit
moment après son arrivée à la maison. Le membre du Bureau politique Kuibyshev
était parmi les plus importantes personnalités qui se trouvaient derrière le
premier et le deuxième plan quinquennal. Il était, ensemble avec Molotov, l´un
des conférenciers à la 17è conférence du parti de SUKP(b) de 1932 laquelle
faite des conclusions sur le premier plan quinquennal et déposa une proposition
pour le deuxième.
Le
procès de trahison Boukharine-Rykov.
Résumé.
Tous les accusés du procès de trahison Boukharine-Rykov
reconnurent leurs actes devant le tribunal et racontèrent comment tout avait
été convenu et exécuté. C´est des milliers et des milliers des faits qui
présentés au cours du procès où les 21 accusés avaient la liberté totale de se
défendre et de nier leur culpabilité. Il arriva de fois que lorsque de nouveaux
éléments sur le déroulement des événements furent produits à l´audience, que
l´un des accusés se sentant lésé par les personnages principaux de la
conspiration, se leva pour protester. Au cours de la plaidoirie de Boukharine,
vers la fin du procès, lorsque ce dernier nia avoir été au même niveau que
Rykov ”l’un des plus grands organisateurs de l’espionnage”, Boukharine fut
interrompu par Charangovitch. Celui-ci déclara à cet effet: ”Finissez doc de
mentir au moins une fois dans votre vie. Cette fois encore, vous mentez devant
la Cour”[127].
Un
procureur exemplaire
Le procureur général de l´Union soviétique, Vychinski, a
été, pendant des dizaines d´années soumis à des campagnes sales dans les médias
bourgeois, campagnes sans précédent lorsqu´il s´agit des affirmations
mensongères. Tous les falsificateurs de l´histoire, de l´agent de police
secrète Conquest à ses correspondant suédois, se sont consacrés aux fantasmes
sauvages à propos du rôle de Vychinski et de son comportement au cours du
procès. Mais la vérité est toute autre. C´est facile de s´en rendre compte
lorsqu´on lit les PV du procès. Les fortes preuves présentées par Vychinski ne
laissèrent aucune possibilité aux accusés de raconter autre chose que la
vérité. C´est cela qui rend les falsificateurs de l´histoire totalement fous.
Il était très engagé dans le procès; connaisseur de chaque détail, il n´avait
rien laissé de côté. Il avait rendu les choses difficiles pour les accusés les
obligeant à ne pas éviter de raconter ce en quoi ils étaient impliqués et à
révéler tous les détails. Vychinski a eu une attitude correcte vis-à-vis des
accusés pendant tout le procès. Il avait accompli sa mission de procureur d´une
manière exemplaire tirant aussi des conclusions correctes sur les récits des
accusés. Il termina sa plaidoirie par cette formule connue qui a été plusieurs
fois falsifiée dans la presse bourgeoise: ”Notre pays tout entier, jeunes et
vieux, attend et réclame une seule chose : que les traîtres et les espions
qui vendaient notre patrie à l’ennemi, soient fusillés comme des chiens
galeux ! ”[128].
Le tribunal condamna 18 accusés à la peine la plus sévère
– exécution et confiscation de tous leurs biens personnels (Boukharine, Rykov, Yagoda,
Krestinski, Rosengolz, Ivanov, Tchernov, Grinko, Zélenski, Ikramov, Khodjaev,
Maximov-Dikovski et Krioutchkov). Les trois restants furent condamnés à la
prison, à la perte de leurs droits civils pendant cinq ans après la fin de
leurs peines de prison ainsi qu´à la confiscation de tous leurs avoirs
personnels. (Plétnev 25 ans, Rakovski 20 ans, et Bessonov 15 ans).
Les
traîtres russes sont les héros des capitalistes
Après avoir lu les procès-verbaux du procès, il est facile
de comprendre que ceci était la seule issue véritable de ce procès contre les
traîtres, les espions et les meurtriers. Une partie des écrivains contestent la
peine de mort parce que 18 accusés y ont été condamnés. La peine de mort est
aujourd´hui indésirable dans la société humaine. Mais elle était, il y a 60 ans
la pleine la plus ordinaire qu´on appliquait contre la haute trahison dans le
monde entier. Toutefois, la peine de mort n´est pas la question que les
falsificateurs de l´histoire posent réellement, ce n´est qu´un prétexte pour
condamner les procès des années 1930.
Le point d´interrogation que les critiques de l´Union
Soviétique soulèvent réellement est que le procès aurait été une farce, que
l´affaire même du procès n´était que de parvenir à éliminer l´opposition contre
le gouvernement, une opposition qui, selon les critiques, était un ensemble de
penseurs, de philosophes, de poètes et de bienfaiteurs de l´humanité, etc.
C´est ainsi que Ahlmark, Skotte et Englund écrivent dans
leurs livres et leurs journaux. Mais les héros de ces falsificateurs de
l´histoire constituent un groupe de criminels de la pire catégorie qui avaient
conclu une alliance avec l´Allemagne nazie et le Japon fasciste pour renverser
le pouvoir État en Union Soviétique. Ce sont les alliés des nazis et des
fascistes que Ahlmark, Skotte et Englund ont fait leurs héros et veulent avoir
comme modèles pour les enfants dans l´école suédoise. Ce sont des assassins qui
ont tué Maxim Gorki et Kirov, des gens de même calibre que ceux qui ont tué
Olof Palme. Ce sont des gens qui ont saboté les ravitaillements du pays en
papier dans le but de stopper la révolution culturelle et rendre impossible les
livraisons des livres scolaires aux enfants. Ce sont des saboteurs qui
faisaient exploser les usines, les mines et les trains sans hésiter de tuer des
centaines de travailleurs, des gens qui ont mis des glaces et des clous dans le
beurre qui déchira les cous et les ventres de la population, qui firent
répandre la peste qui tua les chevaux et les animaux en milliers. Ce sont les
traîtres russes et les collaborateurs des Nazis qui sont les modèles des médias
et les héros de la droite suédoise.
L´ambassadeur
de Suède à Moscou parle de l´affaire Boukharine-Rykov
L´attitude bienveillante et d´adoration que les bourgeois
d´aujourd´hui montrent aux accusés de Moscou en mars1938 n´a rien de pareil
dans les rapports de l´ambassade suédoise de Moscou adressa au ministère
suédois des affaires étrangères. Nous ne devons pas oublier que le ministère
suédois des affaires étrangères et les ambassades ont toujours été peuplés des
gens de droite, des gens provenant du meilleur groupe de la bourgeoisie
suédoise. Les agents de l´ambassade communiquèrent, dans une lettre, adressée
au ministère des affaires étrangères que les condamnés à mort étaient
réellement impliqués dans une conspiration destinée à renverser le gouvernement
soviétique et à prendre le pouvoir.
”Légation de Suède
Ce que le procès trotskiste récent a démontré.
Moscou le 30 mars 1938
Confidentiel
À Son Excellence M. le Ministre des Affaires étrangères
On ne devrait jamais savoir dans quelle mesure les
accusés du procès récemment clôturé contre ”le bloc de la droite et des
trotskistes” se sont déclarés coupables des faits qui leur avaient été reprochés.
Si la vérité est avant toute chose au monde difficile à se faire entendre, cela
concerne au plus haut point
Les rapports de l´ambassade de l´époque ont donné une autre
image de la société soviétique et cela même si la situation générale de cette
société après les procès de Moscou, et cela malgré le fait que ces procès sont, dans des
articles grossièrement mensongers, considérés comme ayant un entraîné le chaos
avec des millions et des millions des exclus et des condamnés à mort.
”Légation de Suède
Concerne l´épuration terroriste
Moscou, le 14 juillet 1938
Confidentiel.
Son Excellence
Monsieur Sandler, Ministre des Affaires étrangères
Il existe peut-être une relation avec la forte
température d´été que les récits sensationnels provenant de l´Union Soviétique
en premier lieu concernant la terreur, naturellement, aient en ce moment
commencé à se répandre dans les colonnes des journaux étrangers à l’extérieur
de
Après avoir parcouru quelques ”exemples éclairants” et
parlé des personnes ”indésirables” et des personnes ”à capacités assez
moyennes” ou celles qui ne ”valent pas la peine” ou le commissaire du peuple
corrompu qui ”fut transporté du commissariat
à la prison”, le rapporteur de l´ambassade passe aux causes des purges. Selon
le rapporteur, les ennemis du régime sont démissionné (”en réalité très peu des
gens”), mais en plus grande partie sont renvoyé ceux qui se sont fait remarqués
pour abus de pouvoir, négligence ou incompétence et se sont montrés de qualité
inférieur et nuisibles. Le gouvernement soviétique voulait avoir un
rajeunissement de l´administration, avec les gens provenant des classes
travailleuses, ce qui fut en fait et le rapporteur de l´ambassade affirme ”que
ce qui arrive en ce moment en réalité, ne peut et ne devrait être considéré
comme un signe de la décomposition et de l´écroulement, mais doit plutôt être
caractérisé comme un signe d´une consolidation sociopolitique”.
Qu´il nous soit permis d´ajouter que ceci était très
important. Avec l´invasion de l´Autruche, la guerre était déjà en cours, et les
Nazis allaient envahir l´Union soviétique. Dans cette situation, le
gouvernement devait pouvoir se fier complètement aux administrations civiles,
les structures militaires et les infrastructures économiques. Le rapport de
l´ambassade poursuit:
”Mais ce qu´il y a de significatif dans ceci, si l´on
peut ainsi dire la terreur épidémique en Union Soviétique, se trouve, comme on
a eu l´occasion de le rappeler à maintes reprises auparavant, non pas dans des
quelques chutes isolés de hautes responsabilités, lesquelles pour être sûres,
tout naturellement offrent pour un observateur étranger, un spectacle plus
choquant mais sont en réalité, relativement peu en nombre et représentatif
principalement pour le moindre groupe social touché par la terreur. L´important
se trouve depuis tout début de 1935, dans l’épuration massive de temps en temps
changeante en force, dans toutes les branches: civiles, militaires, économiques
etc. et dans toutes les couches sociales. Cette procédure d´épuration inédite
concerne à la fois l´élimination des
opposants du régime actuel auxquels un très petit groupe en nombre dans la
plupart des cas se placent juste les plus haut placés et pour cette raison, les
victimes les plus profondément touchées, et l´épuration aussi large que
possible de tous ces éléments qui soit par négligence, et par abus de pouvoir,
ou par incompétence, se sont montrés faibles et nuisibles. Cette procédure violente est conduite par une
un souci conscient d´un renouvellement social d´un côté et par un
rajeunissement de toute l´administration de l´autre, un souci d´introduire, de
la manière la plus large possible, un personnel provenant des classes sociales
qui ont essentiellement porté la révolution et qui peuvent, maintenant,
raisonnablement exiger de jouir des retombées du nouvel ordre. Ceci veut dire,
en premier lieu, que l´on devrait s´évertuer spécialement à recruter ceux qui,
si l´on peut dire, dans des situations bien précises de l´Union Soviétique,
sont éduqué et formé, les jeunes générations des travailleurs et des paysans,
lesquels après des années d´études supérieures de différentes sortes, sont
maintenant jetés dans la vie courante et exigent d´avoir de la place au soleil
et de pouvoir agir ... Il est important,
il me semble, même pour des raisons pratiques, de faire remarquer et même de
retenir, parce que ceci montre que ce qui se passe ici dans la réalité
actuellement ne peut et ne doit être considéré comme un signe de décomposition
et décadence, mais doit au contraire être caractérisé comme un signe de
consolidation sociopolitique, laisser tomber nos points de vue sûrement
hautement singuliers. Et ils sont singuliers par la cause naturelle que les
conditions existantes dans ce pays -historiques, ethnographiques, géographiques
etc. -sont vraiment singulières”[131].
L´ambassadeur
Joseph Davies parle du procès Boukharine-Rykov
Celui qui assista au procès tous les jours était
l´ambassadeur des États-Unis Joseph Davies. Il assista à tout le procès pour le
compte de son gouvernement et fit rapport sur les circonstances entourant les
accusés et la crédibilité du procès.
Nous citons Joseph Davies sur base de son livre ”Comme ambassadeur des États-Unis
à Moscou.”[132].
La première citation est extraite de sa lettre du 8 mars 1938, lettre adressée
à sa fille Emlen qui se trouvait alors
aux États-Unis mais qui avait vécu à Moscou.
”Pendant la dernière semaine, j´ai été chaque jour au
procès de trahison de Boukharine. Tu as sûrement lu cela dans les journaux. C
´est une histoire terrible. Elle m´a intéressé de manière purement
intellectuelle en réactualisant encore une fois les vieux problèmes liés à la
crédibilité des témoignages et les difficultés de distinguer ce qui est sans
valeur de ce qui est plein de valeur – la vérité des mensonges – lesquels se
sont présentés plusieurs fois lors des procès que j´avais moi-même eu à
conduire.
Toutes les faiblesses de base et les défauts existant
dans la nature humaine – l´égoïsme dans sa pire forme – se révèlent au grand
jour pendant le procès. Ils ont révélé les principaux éléments d´un complot qui
était très près de réussir le
renversement de ce gouvernement.
Les témoignages clarifient ce qui était arrivé au
printemps et en été passés et que nous ne pouvions pas alors comprendre. Tu te
rappelles que les gens sont venues à l´ambassade parler d´un mouvement étrange
autour du Kremlin: les portes furent fermées au public et la montée de la garde
fut modifiée. Souviens-toi qu´il avait été dit que la nouvelle garde n´était
composée que des soldats de Géorgie, le pays d´origine de Staline.
Les témoignages sensationnels qui sont donnés par
Krestinski, Boukharine et les autres semblent indiquer qu´un complot existait
au début du mois de novembre 1936, destiné à mettre en exécution, au mois de
mai de l´année suivante, un coup d´État sous la direction de Toukhatchevski. Il
ne suffisait que de peu pour qua sa réussisse.
Mais le gouvernement est intervenu rapidement et
énergiquement. Des généraux de l´armée rouge furent exécutés et tout le parti
fut soumis à une épuration en profondeur. Il fut alors découvert qu´une partie
des responsables étaient impliqués et partageaient le plan de renverser le
gouvernement et collaboraient effectivement avec l´espionnage allemand et
japonais”[133].
Lettre
au secrétaire d´État des États-Unis
Voici comment écrit un avocat originaire de l´ouest sur
le procès de Boukharine. Citons maintenant dune dépêche confidentielle de
l´ambassadeur Davies au secrétaire État des États-Unis.
”Dépêche numéro 1039
Moscou, le 17 de mars de 1938
Au secrétaire État des États-Unis
Confidentielle
…Malgré les réserves que l´on peut avoir à l´égard d´une pratique
qui accepte les aveux comme mode de preuve et laisse les accusés pratiquement
sans protection, je suis donc après plusieurs jours d´observation des accusés,
leurs façons de se comporter, les confirmations inconscientes que leurs récits
laissent entrevoir et d´autres détails d´intérêt juridique, parvenu à la
conclusion que les accusés sont très convaincus, qu´ils se sont rendus
coupables des crimes contre la loi soviétique, qu´ils doivent pour, cette
raison, être condamnés aux peines prévues par la loi. Les diplomates qui ont de
manière régulière assisté aux audiences ont en général la compréhension que le
procureur a démontré qu´une forte opposition politique et un complot
inattendument sérieux, ont existé; ce qui, pour ces diplomates, explique plusieurs
points jusque-là obscurs au cours de l´évolution de la dernière moitié de
l´année en Union Soviétique. La seule différence de vues concerne le point de
savoir dans quelle mesure, les différents accusés sont impliqués et quel été le
degré de centralisation du complot”[134].
Les
Nazis occupent l´Europe
L´ambassadeur Joseph Davies comprit le sens des crimes
des accusés, crimes dont les conséquences pouvaient devenir horriblement
dramatiques. Les nazis marchaient en fait sur l´Europe et en plein déroulement
du procès du 11 mars 1938, l´Allemagne nazie occupa l´Autruche. Ce serait
bientôt le tour de
L´action du gouvernement soviétique et celle de Staline
arrêta cette catastrophe en devenir pour l´Union Soviétique socialiste et pour
les peuples slaves. Les menaces d´extermination de Hitler sur les peuples
slaves n´était pas que de la vantardise.
Imaginez que pendant trois ans de guerre et l´occupation de l´Ukraine,
de
À la longue, il était déterminant d´éliminer le nazisme
pour donner au monde la possibilité de jouir de la liberté que nous avons
aujourd´hui. Si les nazis avaient conquis l´Union soviétique, ils allaient
prendre le monde entier. Mais ce ne sont pas seulement nous les communistes qui
comprenons cela et le déclarons ouvertement. Même les bourgeois honnêtes se
mettent, dans ce cas, du même côté de la barricade que nous.
Les
procès de trahison écrasèrent la 5è colonne de Hitler en Russie
Laissez-nous une fois de plus reprendre une citation tiré
du livre de l´ambassadeur Joseph Davies, ” Comme ambassadeur des
États-Unis à Moscou”. Il discute les actes de ”la cinquième colonne” en Union
Soviétique. La 5è colonne est l´appellation donnée aux traîtres qui rendent
service à l´ennemi extérieur. Le terme 5è colonne vient de l´attaque des
fascistes contre Madrid pendant la guerre civile espagnole. Les fascistes
arrivèrent en 4 colonnes et proclamèrent qu´ils avaient une 5è colonne à l´intérieur
de Madrid laquelle devait attaquer les défenseurs de la ville de dos. Écoutons
ce que l´ambassadeur Davies écrit de ”5è
colonnes” en Union Soviétique. Remarquez que ce chapitre du livre ” Comme
ambassadeur des États-Unis à Moscou” fut écrit pendant l´été 1941 mais a été
inséré dans le livre après la dépêche confidentielle adressée au secrétaire
État américain le 17 mars 1938. L´ambassadeur Davies explique pourquoi: ”Ceci
est écrit après l´attaque allemande sur
Ambassadeur
Davies:
”La
cinquième colonne en Russie -Une étude après réflexion.[135]
Comme de retour de la promotion de juin dans ma vielle
université je traversai Chicago, on me demanda de faire un discours pour le
club de l´université et
En train, sur mon chemin de retour, je ne pouvais pas me
débarrasser de cette pensée. C´était clair
qu´à l´occasion de cette dernière invasion nazie, rien n´a été dit sur
un quelconque ”travail interne” derrière les lignes russes en collaboration
avec le commandement militaire allemand. La prise de Prague par Hitler en 1939
fut accompagnée par l´aide militaire active des organisations Henlein
tchécoslovaques. La même se passa lors de l´invasion de
Lorsque je pensais à tout ceci, je me rendit compte que
les événements qui avaient eu lieu en Russie pendant que j´étais là-bas,
avaient peut-être une signification à laquelle je n´avais pas pensé avant. Au
retour à Washington, je me précipitais pour lire mes vieux carnets journaliers
à nouveau et avec l´autorisation du département État je parcourus certaines de
mes dépêches officielles.
Personne d´entre nous qui étions en Russie entre 1937 et
1938 ne pensait aux activités d´une quelconque ”cinquième colonne”. Ce terme
n´était pas d´actualité. C´est récemment que nous utilisons dans notre
vocabulaire de telles expressions sur la technique nazie, comme ”cinquième
colonne” et ”agression intérieure”.
Les plus renseignés d´entre nous suspectaient plus généralement
que de telles méthodes pouvaient parvenir à être utilisées du côté de Hitler,
mais c´était l´une des choses qui selon la plupart, n´allait jamais avoir lieu.
C´est seulement au cours de ces dernières années que par l´intermédiaire du
comité de Dies et
Cette activité et ces méthodes existaient en Russie
depuis 1935 comme une composante dans les plans allemands contre l´Union
soviétique. Hitler tint son célèbre discours de Nuremberg en 1936, discours où
il révèle clairement ses intentions contre l´Ukraine.
Il semble maintenant comme si le gouvernement soviétique
déjà à cette époque-là, était complètement conscient des plans militaires et
politiques de la direction allemande et du travail ”interne” qui était entrain
d´être réalisé en Russie en prévision de l´attaque allemande.
Lorsque j´examinais ces questions, je vus subitement
l´image claire devant moi, aussi claire que je devais déjà l´avoir vue à cette
époque. L´histoire avait indiqué dans ce qu´on appela les procès de trahison et
d´épuration auxquels j´avais participé et où j´avais été entendu en 1937 et
1938. Lorsqu´à partir de ce nouveau point de vue je parcourus les PV de ces
procès et les notes que j´avais prises, je trouvai que j´avais toutes les
formules que la cinquième colonne allemande travaille avec et qui, comme nous
le savons maintenant, avaient été révélées à travers les aveux et les récits
des ces traîtres russes pleins de regret.
C´était clair que l´Union Soviétique seule croyait que
cette activité existait, qu´il était sérieusement devenu inquiétant et qu´il
entendait l´écraser littéralement. Lorsque l´attaque allemande vint en 1941,
toutes les cinquièmes colonnes que les Allemands avaient organisées étaient décimées.
Un autre détail indescriptible à cette époque, mais qui
maintenant, après les événements qui sont intervenus, parait sous un autre jour
est l´action du gouvernement soviétique contre les consulats allemand et
italien en 1937 et 1938. Cette action eut lieu sans considération aucune et
avec une indifférence brutale pour les sentiments des pays concernés. La raison
avancée par le gouvernement soviétique était que ces consulats organisaient des
activités politiques secrètes et qu´ils devaient pour cette raison être fermés.
Dans le communiqué sur les procès et les exécutions (les purges) de toutes
parts dans le pays, on condamnait les accusés pour activités secrètes de
trahison, destinées à aider ”une
puissance étrangère” à renverser État soviétique”.
L´ambassadeur Joseph Davies poursuit ensuite son récit en
parcourant certaines questions juridiques touchant aux procès et conclut le
chapitre par ces mots:
”Par ces témoignages, le général Toukhatchevski et
nombreux autres officiers de l´armée et de la marine de haut rang, furent
compromis, et ils furent arrêtés quelques instants après la perquisition de
Boukharine et accusés pour avoir, sous la direction de Toukhatchevski, accepté
de collaborer avec le commandement allemand en cas de guerre contre État soviétique.
Plusieurs cas d´activités souterraines au sein de l´armée furent révélés à
travers les témoignages. Selon ceux-ci, la plupart des officiers de haut rang
avaient soit été corrompus, soit d´une autre manière été amenés à participer à
la conspiration. Une collaboration totale avait, selon les témoignages, été
obtenue dans toutes les branches de la défense et les organisations politiques
avec les commandements japonais et allemands.
Telle était l´histoire qui fut déroulée, racontée, au
cours du procès. Il n´existe aucun doute
sur le fait que les révélations et les aveux des accusés avaient une
influence profonde sur les concernés du Kremlin. Par son intervention rapide et
sérieuse, le gouvernement montra qu´il y croyait. Le gouvernement prit soin de
cette affaire avec la plus grande énergie et la plus grande précision. Le chef
d´État-major de l´armée rouge, Vorochilov déclara: ”c´est plus facile pour un
voleur de s´introduire dans le lieu de crimes s´il a des complices qui lui
ouvrent la porte. Nous avons pris soin de ces complices.”
Le général Toukhatchevski ne participa pas aux cérémonies
d´intronisation à Londres. On rapporta qu´il avait reçu un commandement dans le
district de Volga, mais on apprit qu´il fut arrêté en train avant son arrivée à
destination. Quelques semaines après, le 11 juin, il fut ensemble, avec 11
autres officiers du commandement exécutés après le tribunal de guerre organisé
à portes fermées. Toutes ces perquisitions, ces purges et liquidations qui
paraissaient si brutales et contraires aux valeurs de l´époque, étaient
manifestement un coup de l´action décisive et forte du gouvernement de Staline
de se protéger contre une révolution de l´intérieur, mais aussi contre une
attaque venant de l´extérieur. Le gouvernement avait donc pris au sérieux sa
cause et nettoya le pays des tous les éléments traîtres. Concernant les cas
dans lesquels il persistait des doutes, on condamna au lieu de libérer.
Il n´existait aucun membre de la cinquième colonne en
Russie en 1941 – ils avaient été exécutés. L´épuration avait épargné la
trahison au pays”.
Le récit de l´ambassadeur Davies est aujourd´hui plus
important que jamais. Il soulève la question des purges et des procès de
trahison de manière claire. Mais il soulève aussi d´autres questions jamais traitées par les écrivassiers de
l´histoire bourgeois. Une question importante dans cette perspective est de
savoir comment est-ce qu´il était, après tout, possible pour les nazis, de
vaincre, dans cinq semaines, la grande puissance militaire qu´était
Les
traîtres et la menace contre l´Union soviétique
Ceux qui lisent les quotidiens ordinaires des années 1930
peuvent facilement voir comment la menace contre l´Union Soviétique augmentait
de jour en jour. La menace vint de l´Allemagne nazie mais aussi des autres pays
capitalistes de l´Occident, dont
Mais pendant la période allant de septembre 1939 à juin
1940,
Les gouvernements de
Dans cette situation très tendue, quand tous étaient
obligés de travailler très sérieusement pour la survie de l´Union Soviétique,
il y eut ceux qui, au lieu de cela, aidaient l´ennemi avec information et
sabotage sur la production et la défense. Le gouvernement soviétique s´en prit
durement contre les traîtres et tous les cercles dans lesquels, à travers toute
l´Union Soviétique, ces traîtres avaient des relations ou qu´ils fréquentaient.
Beaucoup furent condamnés à la prison ou à la peine de mort. ”Dans des cas
douteux, on condamnait au lieu de libérer”, écrivit Davies. Il est regrettable
que des innocents aient été préjudiciés. Mais dans les conditions de l´époque,
il n´y avait pas moyen de faire autrement. L´invasion nazie et la guerre
d´extermination contre l´Union Soviétique s´approchaient à grands pas. Avoir
encore, au sein des administrations et de l´appareil de État des gens qui prêts
à collaborer avec les intrus nazis et qui étaient opposés à État socialiste,
était égal au suicide. Le gouvernement
soviétique réussit avec détermination, à sauver le pays – et le monde – de la
barbarie nazie et à exterminer le nazisme. Comment l´histoire aurait-elle jugé
le gouvernement soviétique si l´Union Soviétique avait perdu et que les nazis
avaient pris le contrôle du monde?
Rentrons au début
de cette brochure, au livre de Fainsod, Smolensk Under Soviet Rule, de 1958. Faits à l´appui, nous pouvons
maintenant constater que le livre de Fainsod est fortement trompeur, c´est en
réalité une falsification des événements historiques. Que ce livre ait formé
des générations d´intellectuels et permis à l´agent de police secret de basse
classe, Robert Conquest, de paraître comme une autorité sur la matière ”Union
Soviétique” est pire. Le livre Origins of the Great Purges, de Arch
Getty montre clairement que l´affirmation de Fainsod selon laquelle la vague de
purges planifiées de 1930 laquelle serait devenue de plus en plus grande,
n´existait simplement pas. L´affirmation de Fainsod selon laquelle le Comité
Central avait mis en marche une vague de
terreur lors du changement des cartes du parti de 1936, n´a elle aussi, aucun
fondement dans la réalité. Les procès que Fainsod qualifie de farces pour
exterminer toute opposition contre Staline, apparaissent comme des procès
judiciaires contre les traîtres qui avaient entrepris une collaboration avec
l´Allemagne nazie.
En réalité, le mouvement politique de cette décennie 1930
était, en Union soviétique, une remise en cause radicale du pouvoir des
bureaucrates dans le parti et dans la société.
Tout n´était pas bien et sans faute, mais c´était un combat nécessaire
si l´Union Soviétique devait développer la production socialiste et survivre à
l´invasion nazie. Citons les mots de la fin du livre du professeur Arch Getty, Origins of the Great Purges.
”L´administration de la preuve indique que le temps de
Ejov (1937-Ejovsjtjinan) – ceci représente ce que la plupart considèrent comme
les grandes purges – doit être redéfinie. Elle n´était pas la suite de
l´élimination des dissidents par une bureaucratie insouciante et une
extermination totale des vieux révolutionnaires radicaux. Ça peut avoir été
exactement le contraire. Dire que les grandes purges étaient une réaction
radicale et même hystérique contre la bureaucratie n´est pas inconciliable avec
les preuves. Les fonctionnaires qui s´étaient barricadés dans leurs fonctions
furent épurés d´en haut et d´en bas dans une vague chaotique consistant dans la
volonté de changement et le puritanisme révolutionnaire”[136].
Conclusion
L´ambassadeur Joseph Davies a peu des gens de sa valeur dans
la société libérale d´aujourd´hui. Un verre d´agrandissement de la grandeur
d´un télescope est nécessaire lorsqu´on cherche aujourd´hui un intellectuel
bourgeois honnête. Les mass médias bourgeois sont dominés par des imbéciles
comme Skotte, Ahlmark, Englund et d´autres amoureux de l´argent et des
”écrivains” sans scrupules qui peuplent les universités du pays, les colonnes
politiques des journaux ainsi que les soi-disant fondations qui doivent
enquêter sur les crimes du communisme. Les intellectuels bourgeois rappellent
aujourd´hui plus un assemblage de nains spirituels qui, avec une carte en
plastique dans la main, sont prêts à écouter volontairement la voix du chef de
ménage. Les intellectuels honnêtes qui existent pourtant, ont difficile à
dénoncer les menteurs et à les désigner comme falsificateurs de l´histoire
qu´ils sont. Un peu plus de courage et du courage civil pourrait donner au
public une autre compréhension du débat et amener celui-ci à un niveau
respectable. Bien plus, l´obéissance passive des intellectuels aux ”forces du
marché” constitue un fardeau sur les travailleurs du pays. La libération de
l´abrutissement et de l´exploitation pose des exigences sur la lutte contre les
marionnettes intellectuelles de la
bourgeoisie. La connaissance historique est importante pour comprendre notre
époque et pour détruire les mensonges de la bourgeoisie. Dans la société
d´aujourd´hui, il n´y a, à quelques exceptions près, que les communistes qui
veulent rendre la connaissance sur l´histoire aux travailleurs. Nous ne
décevons pas concernant ce devoir.
Mário
Sousa
2001
mario.sousa@telia.com
[1] Rapportes pressente au XVIe, XVIIe et XVIIIe
Congres du Parti sur l’activité du Comite Central du Parti Communiste
(bolchevik) de l’U.R.S.S.
[2] Hitler, Mein Kampf,
[3] Arch Getty and Oleg V. Naumov – The Road to
Terror, Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, p. 25
[4] Arch Getty and Oleg V. Naumov – The Road to
Terror, Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, p. 27
[5] Arch Getty and Oleg V. Naumov – The Road to
Terror, Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, p. 327
[6] Arch Getty – Origins of the Great Purges. The
Soviet Communist Party Reconsidered, 1933-1938.
[7] Ibidem, p. 3
[8] Merle Fainsod –
[9] Getty – op.cit., p. 6
[10] Lenin, Eighth All-Russia Conference of R.C.P. (B),
December 2-4, 1919. Political Report of the Central Committee. Collected Works,
Volume 30, p. 186.
[11] Arch Getty – Origins of the Great Purges. The
Soviet Communist Party Reconsidered, 1933-1938, p. 46
[12] Ibidem, p. 47
[13] Ibidem, p. 46
[14] Mario Sousa : Les mensonges sur l’histoire de l’Union Soviétique –
D’Hitler à Hearst, de Conquest à Soljenitsyne.
[15] Peter Englund, Moderna Tider, Fevrier 1994, p. 26;
Brev från nollpunkten, 1996 p. 72
[16] Robert Conquest – The Great Terror. Stalin’s Purge
of the Thirties. (Commentaire sur les sources).
(Tradution du suédoise, Den stora terror, Stockholm 1971, p. 495)
[17] Getty: Origins of the Great Purges, p. 54
[18] Getty: Origins of the Great Purges, p. 59
[19] Getty: Origins of the Great Purges, p. 61
[20] Ibidem, p. 63
[21] Getty: Origins of the Great Purges, p. 69
[22] Getty: Origins of the Great Purges, p. 83
[23] Getty: Origins of the Great Purges, p. 85
[24] Getty: Origins of the Great Purges, p. 89
[25] Getty: Origins of the Great Purges, p. 89
[26] Peter Englund – Brev från nollpunkten, p. 66, 67
[27] Stalin – Rapport présenté au XIV Congrès du P.C.(b) de l’U.R.S.S (18 decembre 1925)
[28] Histoire du Parti Communiste (bolchevik) de
l’URSS.
[29] Staline – Rapport au 17e congrès du P.C.(b) de
l’U.R.S.S. Les Questions du Léninisme. Tirana, 1970. Page 606.
[30] DKP
et la lutte contre le fascisme 1928-1935. International Communiste 1935.
[31] Nordisk Familjebod 1933, p. 944
[32] Le Procès du Centre Trotski-Zinoviev. 19-24 Août, 1936. Tradution du suédois.« Sanningen om processen mot De sammansvurna terroristerna i Moskva. Arbetarkultur, Stockholm 1936 », p. 13
[33] Le Procès du Centre Trotski-Zinoviev. 19-24 Août, 1936. Tradution du suédois.« Sanningen om processen mot De sammansvurna terroristerna i Moskva. Arbetarkultur, Stockholm 1936 », p 42
[34] Ibidem, p. 127
[35] Ibidem, p. 78
[36] D. N. Pritt – The Zinoviev Trial, London 1936. Tradution du suédois. Sinovjev och Kamenjev inför Folkets Domstol, Stockholm, Arbetarkultur 1937.
[37] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[38] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[39] Le Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste 23 – 30 janvier 1937, p. 22.
[40] Ibidem, p. 24.
[41] Ibidem, p. 27
[42] Le Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste 23 – 30 janvier 1937, p. 28
[43] John D. Littlepage – In Search of Soviet Gold, George G. Harrap & CO. LTD, London 1939, p. 274
[44] Le Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste 23 – 30 janvier 1937, p. 49, 50.
[45] Ibedem, p. 53
[46] Ibidem, p. 56
[47] Le Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste 23 – 30 janvier 1937, p. 56
[48] Ibidem, p. 59
[49] Ibidem, p. 60
[50] Ibidem, p. 61, 62
[51] Le
Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste 23 – 30 janvier 1937, p. 68
[52] Ibidem, p. 66
[53] Ibidem, p. 70
[54] Ibidem, p. 73
[55] Le Procès du Centre Antisoviétique Trotskiste
23 – 30 janvier 1937, p. 603
[56] Joseph E. Davies – Mission to
[57] Joseph E. Davies –
[58] Ibidem, p. 43
[59] Robert Conquest – The Great Terror, Stalin’s
Purge of the Thirties. New
York 1968. Page 156, 157
[60] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[61] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[62] J. Arch Getty and Oleg V. Naumov - The Road to
Terror, Stalin and the Self-Destruction of the Bolsheviks, 1932-1939.
[63] Arch Getty – The Road to Terror, p. 323, 324
[64] Arch Getty – The Road to Terror, p. 586
[65] Stalin – Défauts du travail du Parti et
mesures à prendre pour liquider les gens à double face, trotskistes et autres,
Brochure, L’Homme, le capital le plus précieux, Editions sociales, 1952, text
non complet. Page 61.
[66] Ibidem, p. 64
[67] Stalin – Défauts du travail du Parti et
mesures à prendre pour liquider les gens à double face, trotskistes et autres,
Brochure, L’Homme, le capital le plus précieux, Editions sociales, 1952, text
non complet. Page p. 65, 66
[68] Stalin – Defects in party work and measures
for liquidating trotskyites and other double-dealears, Report and Speech in
Reply to Debate of the Plenum of the Central Committee of the C.P.S.U.(B),
March 3, 1937. Selected
Works, Tirana 1979, p. 431
[69] Ibidem, p. 431
[70] Stalin – Defects in party work and measures
for liquidating trotskyites and other double-dealears, p. 440
[71] Ibidem, p. 443
[72] Ibidem, p. 444
[73] Ibidem, p. 446
[74] Stalin – Defects in party work and measures
for liquidating trotskyites and other double-dealears, 448
[75] Ibidem, p. 452
[76] Ibidem, p. 452
[77] Ibidem, p. 454
[78] Ibidem, p. 455
[79] Arch Getty – Origins of the Great Purges. The
Soviet Communist Party Reconsidered, 1933-1938.
[80] Ibidem, p. 151
[81] Joseph E. Davies – Mission to
[82] Arch Getty – Origins of the Great Purges, page
169
[83] Arch Getty – Origins of the Great Purges, p.
176
[84] Ibidem, p. 176
[85] Ibidem, p. 175
[86] Arch Getty – Origins of the Great Purges, p.
177
[87] Peter Englund. Moderna Tider, February 1994, page 22; Brev från nollpunkten, 1996, page 73
[88] Arch Getty – Origins of the Great Purges, p.
175
[89] Le procès du « Bloc des droitiers et des
trotskistes » antisoviétique. (du 2 au 13 mars 1938). Publié par Le Commissariat du Peuple de
[90] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 113
[91] Ibidem, p. 94
[92] Ibidem, p. 97
[93] Ibidem, p. 104
[94] Ibidem, p. 100
[95] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 114
[96] Ibidem, p. 108,109
[97] Ibidem, p. 19,110
[98] Ibidem, p. 110
[99] Ibidem, p. 110
[100] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 343
[101] Ibidem, p. 346
[102] Ibidem, . 348
[103] Ibidem, p. 348
[104] Ibidem, p. 351, 352, 353
[105] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 354
[106] Ibidem, p. 126
[107] Ibidem, p. 130, 131
[108] Ibidem, p. 131, 132
[109] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 132, 133
[110] Ibidem, p. 133
[111] Ibidem, p.135, 136
[112] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes antisoviétique », p. 137
[113] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 394
[114] Ibidem, p. 458
[115] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes antisoviétique », p. 398
[116] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 404, 406, 407
[117] Ibidem, p. 402
[118] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 470
[119] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 479, 480
[120] Ibidem, p. 182
[121] Ibidem, p. 182, 183
[122] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 185, 186
[123] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 191, 192
[124] Ibidem, p. 194, 198, 199
[125] Ibidem, p. 200, 201, 202, 211
[126] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 649, 650
[127] Ibidem, p. 817
[128] Le procès du « Bloc des droitiers et des trotskistes » antisoviétique, p. 739
[129] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[130] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[131] Correspondense de l’ambassade de Suède à Moscou. Riksarkivet, Stockholm.
[132] Joseph E. Davies,
[133] Joseph E. Davies,
[134] Joseph E. Davies,
[135] Joseph E. Davies,
[136] Arch Getty – Origins of the Great Purges, p.
206